Test Space Hulk: Deathwing – “Seule la mort me séparera de mon arme.”
Space Hulk, c’est un peu le Saint Graal des nerds. Le jeu de plateau qui a provoqué moult rêves mouillés aux plus grands férus de jeux de figurines. Ensuite décliné plusieurs fois en jeu vidéo, Space Hulk revient donc pour prolonger l’héritage de ce spin-off de Warhammer 40k si particulier à travers Deathwing. Préparez vos armures Dreadnought tactiques, vos gantelets énergétiques et vos fulgurants, la purge va être intense.
“Donnez-moi cent Spaces Marines ou mille hommes ordinaires“
Space Hulk est le premier produit dérivé de l’univers Warhammer 40 000, apparu dans la fin des années quatre-vingt. Le deal : des joueurs contrôlaient une escouade de Space Marines d’élite pendant qu’un autre contrôlait les effroyables Genestealers, prêts à leur bondir dessus à la première occasion. L’ambiance était complètement pompée sur Alien, mais années quatre-vingt obligent, le sentiment d’oppression et d’angoisse était vraiment présent, même dans un simple jeu de plateau.
Dans les années quatre-vingt-dix, on a eu deux adaptions vidéoludiques à la première personne, où l’action était un peu plus immédiate et encore plus horrifique. Dans des dédales étroits, le danger pouvait surgir de n’importe où et la moindre erreur signifiait une mort immédiate. Les softs se voulaient alors plus tactiques que bourrins et gérer le déplacement et la coordination de ses Terminators était crucial pour mener la mission à bien. La version 2016 est signée Streum-On Studio – petite équipe parisienne à qui on doit le très étrange mais ambitieux et réussi E.Y.E: Divine Cybermancy.
Si Warhammer: Vermintide n’avait pas assez d’armes à feu à votre goût, Deathwing est là pour combler ce manque. En fait, Deathwing est le Left 4 Dead-like à la sauce Space Hulk : une escouade réduite, des armes saintes de Space Marine à plus savoir quoi en faire, et des Genestealers à dézinguer à la pelle. Le jeu n’oublie pas de puiser dans ses origines puisqu’il veut récupérer cet aspect posé et tactique propre au jeu de plateau original et aux précédentes adaptations. Il était évident que le jeu se verrait doté d’un mode coop, mais on y trouve également une campagne complète avec un scénario, une progression, toussa. On va décrypter ça ensemble.
“Et ils tomberont la foi au cœur, car ils se battront pour Lui”
Dans le mode solo, vous incarnez un Archiviste du chapitre Space Marine des Blood Angels, un érudit doué de pouvoirs psychiques doublé d’un soldat d’élite à la gloire de l’Empereur de l’Humanité (loué soit son nom). Un Space Hulk a émergé du Warp dans un système peuplé et il est urgent de purger la chose avant qu’elle puisse contaminer l’Imperium, quoi qu’elle renferme. Les Space Hulks sont des amas de vaisseaux qui s’agglutinent les uns aux autres quand ils sont perdus dans l’Hyperespace. Un Space Hulk peut se former sur plusieurs millénaires et ne prévient généralement pas quand ils refait surface. Accompagné de la meilleure unité de Terminators qui existe – la Deathwing – à vous de découvrir ce que renferme ce morceau de métal gigantesque et difforme.
Premier point positif majeur : le studio est amoureux de la licence Warhammer 40K, et ça se voit. Le jeu est sacrément beau et respecte les codes de l’univers sur le bout des ongles. Le simple fait d’enfiler une armure Dreadnought tactique emplit son petit cœur de Space Marine et donne envie de sacrifier sa vie pour la gloire de l’Empereur éternel. On est complètement immergé dans cette diégèse cauchemardesque où il n’existe plus que l’art de la guerre. Cela se ressent jusque dans le gameplay : le moindre pas que l’ont fait est puissant et déterminé, et la taille de nos armes compense… notre soif de justice. Le Space Hulk est tout ce qu’on attend de lui : sombre, inquiétant, chaotique. À contrario des jeux originaux en revanche, s’il y a souvent des couloirs exigus, certaines salles sont grandioses et gothiques as fuck, cadre idéal pour une purge glorieuse à coups de gantelet énergétique ou de canon plasma.
Vous avancez avec deux autres Terminators qui vous accompagnent d’un objectif à un autre pour mener votre mission à bien tout en tentant de rester en vie. Et voilà, c’est tout. C’est là que le jeu commence à perdre de l’intérêt. Beaucoup de choses sont bancales dans cet opus malgré de très bonnes idées qui pouvaient, sur le papier, ne pas échouer. Le jeu se résume à plein de touches d’enthousiasme, à la découverte d’une nouvelle mécanique avant de se rendre compte quelques temps plus tard qu’elle dessert plus le jeu qu’elle ne participe au succès de son gameplay.
Pour revenir à votre escouade, vous avez la possibilité de donner des ordres à chacun de ses membres afin qu’il réalise une tâche précise. Avancer prudemment est un prérequis important pour éviter d’esquinter son armure Terminator bêtement. Vous pourrez donc commander à vos frères d’ouvrir une porte et d’avancer, ou de fermer la marche en verrouillant derrière vous, empêchant les ennemis de vous prendre à revers. Cependant, tout ça est très laborieux à réaliser, à cause d’une ergonomie largement perfectible. Idem pour les positionnements qui ne servent pas à grand-chose dans le tumulte des combats, qui deviennent alors très bordéliques. Une pause active aurait largement été la bienvenue pour s’assurer de pouvoir couvrir tous les angles.
“… et ils ne connaîtront pas la peur”
Si chaque section du Space Hulk se veut très ouverte avec un level design efficace, le vaisseau est malheureusement saboté par un cheminement déjà tout tracé pour le joueur, qui sera obligé de prendre tel ou tel itinéraire pour arriver au but. Il faut avouer qu’il est plaisant de devoir ouvrir une carte et de bien faire attention où l’on va, surtout qu’on a l’habitude de se perdre pendant qu’on progresse en plein combat, mais on se rend compte trop tôt qu’un seul chemin sera toujours valide. On se retrouve alors avec un vrai FPS couloir (sans mauvais jeu de mot).
Le combat en lui même est à la fois excellent et bancal. Trouez les Genestealers de loin et défoncez ceux qui se trouvent trop près. Le gunfeeling est assez plaisant mais on ne se rend pas bien compte des dégâts qu’on inflige aux rangs ennemis, ce qui rend difficile la maîtrise du combat. Les dégâts reçus sont également mal notifiés. Ceux-ci sont localisés sur les différentes parties de votre armure Terminator, ce qui est plutôt malin au premier abord: parez trop de coups et votre bras sera inutilisable, prenez trop de dégâts aux jambes et vous voilà aussi lent qu’un escargot. Cependant, on a du mal à savoir la quantité de dégâts qu’on peut s’autoriser à encaisser. Ce sont surtout les dégâts à la tête qui sont injustes : une malheureuse roquette dans le casque et vous voilà dans la rubrique chronologique du chapitre – vous êtes mort. Évidemment, l’Apothicaire du groupe sera là pour vous rafistoler, mais l’utilisation du médikit est limitée. À utiliser avec parcimonie.
Le bestiaire est très peu diversifié, puisqu’on se contente de Genestealers classiques, des hybrides capables d’utiliser des armes à distance et le Genestealer Alpha qui fera office de boss de temps en temps. Ce n’est pas forcément un problème en soi, puisqu’on est cohérent avec l’univers, mais le sentiment de répétition, qui s’installe assez vite (en solo, en tout cas), ne s’en trouve que renforcé. Les affrontements avec les boss sont quant à eux souvent carrément ridicules… on se contente de reculer pour esquiver les coups, de bourrer la tronche du méchant à distance, et le tour est joué. Si on se débrouille bien, l’Alpha ne nous touche pas une seule fois. Il existe également des tourelles de défense piratables ça et là dans le Space Hulk, mais vous contrôlez alors directement la tourelle, ce qui est juste pas pratique du tout quand toute la population locale vous saute dessus et que vous êtes sans défense. Vous pouvez l’activer sans en prendre le contrôle, mais elle s’en prendra alors à VOUS et uniquement à vous. Choix de gamedesign bien étranges…
“Ma foi est mon bouclier ! Ma fureur est mon épée !”
Le charme de l’univers est rapidement perdu. On sait que les histoires de Warhammer 40K sont souvent bateaux, vues et revues, mais le jeu fini par être vide. Mis à part votre supérieur qui vous dit quoi faire une fois un objectif atteint, vos frères Terminators sont très peu loquaces et manquent de personnalité, quand bien même ils sont doués de parole. Même la phrase qu’ils utilisent pour confirmer une action effectuée est générique et ne décrit pas du tout la tâche qui vient d’être accomplie. Rajoutez à ça des phrases situationnelles erronées comme : “Par l’Empereur, nous sommes encerclés !” alors qu’il n’y a que trois Genestealers en touriste, on est vite éjecté de l’ambiance.
S’il y a bien un soulagement dans tout ça, c’est que le mode coop rattrape un peu la catastrophe. Adieu les coéquipiers qui ne réagissent pas quand cinq Genestealers leur maravent la tronche, bonjour les copains qui vous insulteront car vous ne les aidez pas. Dit comme ça, ça n’a pas l’air attrayant, mais rien que le fait que tout le monde essaie d’avoir un positionnement cohérent change complètement le jeu. Bon, tout n’est pas parfait, mais privilégiez un bon groupe de potes et vous commencerez enfin à s’amuser. Malgré tout, on sent que les mécaniques de jeu demeurent bancales. Dans Space Hulk, on est censé être intelligent et mentalement fort pour survivre, prendre en compte tous les paramètres et perdre le moins d’hommes possible. Ici, un simple timer vous fait revenir à la vie. Vous êtes tout seul et n’osez pas progresser ? Pas grave, bougez pas trop, attendez un peu, et vous revoilà avec vos trois compagnons. Même la classe de base a une capacité qui permet de faire revenir ses camarades d’entre les morts plus vite, ce qui prouve qu’il y a un souci dans le game design plus général du jeu, alors que Space Hulk se veut vraiment un jeu de survie.
Vous pouvez par ailleurs sélectionner une classe et débloquer du nouvel équipement au fil de la mission. Le problème, c’est que tout l’arsenal présent dans le mode solo n’apparaît pas dans le mode multijoueur, et ce pour diverses raisons (ou pas). La plus cocasse : le lance-flamme lourd, par exemple, est très mal optimisé, et dès qu’un joueur fait feu avec, il fait fondre les Genestealers mais aussi ses coéquipiers (si le friendly fire est activé), et son PC, tant qu’à faire. Je ne vous avais pas dit ? Le jeu souffre d’un gros problème d’optimisation, mais complètement aléatoire. Même si vous avez un gros PC, il se peut que Space Hulk: Deathwing tourne atrocement selon la situation, mais certaines personnes avec des configurations modestes ont déclaré ne déceler aucun problème. La phase bêta du mois dernier a permis de sauver les meubles, mais tout est encore loin d’être parfait.
“J’ai creusé ma tombe ici, et je triompherai ou périrai !“
Je me sens très con avec Space Hulk. Et je déteste me sentir con. J’ai l’impression permanente de ne pas comprendre le jeu. On a la sensation de faire les choses bien à un moment, et n’importe quoi à l’instant d’après. J’ai envie de l’aimer ce Deathwing, sincèrement, mais je n’arrive pas à ne pas voir les défauts. On arrive à un moment où on se dit que le jeu ne se comprend plus lui même et essaie de se rafistoler à la va-vite en espérant que cela ne se voit pas. J’ai essayé de lister les problèmes, mais je me suis rendu compte que je n’arrive pas à savoir précisément ce qui ne va pas dans ce Space Hulk, et j’arrive encore moins à savoir ce que l’on aurait pu faire pour éviter la sensation de frustration liée au gamedesign. C’est dommage, parce qu’on voit de manière évidente que Streum-On a abattu un boulot formidable sur la retranscription de l’univers de Games Workshop. Passable et parfois frustrant en solo, il se rattrape plutôt bien en coop, donnant alors une expérience certes redondante mais plutôt plaisante dans l’ensemble. En espérant que les hypothétiques futures mises à jour de l’Adeptus Mechanicus puissent apporter quelques pistes d’amélioration. L’Empereur de l’Humanité mérite au moins ça.
► Points forts
- C’est beau
- L’univers Warhammer 40k comme on aime le voir
- La sensation d’être un Terminator
- Sympa en coop
- Level design travaillé
- Joli arsenal
► Points faibles
- Optimisation à la rue.
- Level design bridé par la progression.
- Combats brouillons.
- Des bugs gênants
- Interface peu ergnomique
- Carte tactique peu pratique.
- Manque d’ambiance.
- Mécaniques de jeu peu claires.
- Le solo peu engageant.
“Je ne me soucie pas de qui connaîtra la vérité, maintenant, demain, ou dans dix mille ans. La loyauté porte en elle sa propre récompense.” (Jouez-y si vous êtes fan de Space Hulk ou WH40K, on s’y amuse quand même)
War Legend a bénéficié d’une copie presse PC fournie par l’éditeur de ce jeu.
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