Dark Souls est devenu un nom qui en impose – que dis-je, une référence ! – dans le jeu vidéo et pour cause : il a donné naissance au terme “Dark Souls-like”. Ce terme fait en fait référence à un jeu difficile, ce qu’avant les années 2000/10 nous appelions sobrement “jeu”. Retour bienvenu d’un aspect résolument “démerde-toi'”, comme Demon’s Souls avant lui, Dark Souls a marqué toute une génération, mais pas seulement à cause de son écran “Vous êtes mort”, loin de là.
Préambule
Pourquoi proposer un test de Dark Souls aujourd’hui ? Tout simplement parce qu’à l’époque de la sortie du titre, le site War Legend tel que vous le connaissez aujourd’hui n’existait pas et, maintenant que le Remaster est sorti, il nous fallait un point de référence afin de pouvoir offrir un test de ce dernier pour ce qu’il est, indépendamment de la qualité intrinsèque du titre original.
Voilà, maintenant vous savez tout. Enfin, ce sera le cas quand vous aurez lu ce test.
Dark prison break
Dark Souls vous place dans la peau d’un mort-vivant – histoire de donner le ton – enfermé dans une cellule du Refuge Nord des Mort-Vivants. Soudain une trappe dans le plafond s’ouvre et un mystérieux chevalier vous jette la clé de votre liberté. Dès lors, vous allez vous embarquer dans un long périple, une histoire mystérieuse qu’aujourd’hui encore des passionnés essaient de décrypter – nous avons fait notre part à cette adresse.
Le principe du scénario est, à la manière du gameplay, de vous laisser vous débrouiller.
Le principe du scénario est, à la manière du gameplay, de vous laisser vous débrouiller. Autrement dit, vous ne savez absolument rien, sinon que vous êtes un mort-vivant emprisonné. Vous connaissez aussi votre nom, puisque vous l’avez défini dans l’éditeur de personnage. Celui-ci est très sommaire et propose des archétypes de classe (chevalier, soldat, sorcier, clerc, etc.). L’édition du physique du personnage en lui-même ne ravira pas les adeptes de la personnalisation poussée, mais vous pouvez vous consoler en vous disant que vous ne verrez pour ainsi dire jamais la tronche de cake de votre héro. Ce qui n’est pas un mal. Parce qu’il n’y a que des tronches de cake. Pour de vrai.
Notez que la classe choisie n’a que peu d’importance puisque la façon dont vous choisirez d’attribuer vos points de compétence par la suite vous permet d’orienter votre personnage dans la direction qui correspond le plus à votre gameplay. Pour bénéficier d’une véritable page vierge, préférez toutefois le mendiant pour un maximum d’optimisation.
L’histoire sans fin
Dès le départ, Dark Souls plante le décor, et il faut avouer qu’il a de la gueule. Vous profiterez de nombreux paysages au cours de votre aventure et tous sont habités d’une atmosphère particulière. Qu’il s’agisse de la majestueuse Anor Londo, du médiéval Village des Morts-Vivants ou des Ruines Démoniaques, la direction artistique est au rendez-vous, de même que la variété. Encore qu’on pourrait avoir quelques réserves sur le Hameau du Crépuscule, mais si l’on part du principe qu’il est fait pour donner une impression malsaine, l’objectif est là aussi rempli.
Les graphismes laissent à désirer comparé à ce qui se faisait sur PS3 à l’époque et cela s’étend aux animations et effets spéciaux, pas franchement ragoûtants.
Les graphismes laissent à désirer comparé à ce qui se faisait sur PS3 et Xbox 360 à l’époque et cela s’étend aux animations et effets spéciaux, pas franchement ragoûtants. On note ainsi une certaine rigidité du personnage qui se ressent dans le gameplay, j’y reviendrai un peu plus tard. Les textures manquent clairement de finesse et c’est bel et bien la direction artistique qui donne tout son charme visuel à Dark Souls.
Comme évoqué un peu plus haut, le scénario ne vous est pas livré clés en main. Certains reprocheront à Hidetaka Miyazaki, créateur de la licence, la facilité de l’amnésie du personnage tandis que d’autres crieront au génie. Sans aller jusque là, nous avons effectivement affaire à un choix délibéré et réfléchi du game designer puisque vous devrez vous-même assembler les pièces du puzzle pour comprendre l’univers de Dark Souls (notez que pas mal de pièces sont manquantes et que d’autres ont été rongées par le temps). Pour parler de son inspiration, Miyazaki invoque les romans de fantasy qu’il lisait ado : tous étaient en anglais et il se retrouvait donc à manquer des passages entiers. Il s’agit d’un choix de game design que j’affectionne particulièrement puisqu’il laisse énormément de place à l’imagination. Il n’y a qu’à voir les nombreuses théories sur l’univers Dark Souls disponibles un peu partout sur le net. Là où l’on voit la vraie maîtrise, ce que malgré le peu qu’on nous donne, tout est cohérent et résolument original.
Vous êtes mort/déchiqueté/dépecé/écartelé/démembré/de la ratatouille
Abordons maintenant la caractéristique de Dark Souls qui demeure sans aucun doute la plus célèbre : la mort. Tout comme pour le scénario, n’attendez pas que le jeu vous prenne la main. Dès le départ, vous pouvez emprunter plusieurs chemins, dont certains mènent à une mort certaine car vous n’avez pas le niveau pour affronter les zones auxquels ils mènent. C’est injuste ? Non, c’est le jeu. Le principe reste de jouer, que le résultat soit la victoire ou la défaite.
Dark Souls est probablement le jeu le moins injuste que je connaisse.
Cela peut sembler étrange pour certaines oreilles, mais Dark Souls est probablement le jeu le moins injuste que je connaisse. Vous assurer la victoire en vous guidant/donnant des indices constamment, n’est-ce pas une forme d’injustice dans le sens où vous n’êtes pas libre de vous planter ? Autant regarder un film ! Vous contraindre à la défaite sans avoir la possibilité de contourner la difficulté ou l’affronter à force d’apprendre, ça aussi c’est injuste. Le jeu de FromSoftware offre au contraire une courbe de progression savamment dosée. Oui Dark Souls est dur, très dur ; oui il vous poignarde régulièrement dans le dos ; oui les boss vous décrocheront la mâchoire (dans tous les sens de l’expression) ; mais oui, vous apprendrez de vos erreurs, vous vous améliorerez et vous finirez par vaincre. Et je crois qu’à l’heure actuelle, il n’existe pas d’autre licence qui m’ait procuré de sensation si enivrante que celle d’enfin éclater un boss (ou plusieurs…) après des heures d’acharnement.
Alors non, Dark Souls n’est clairement pas à mettre entre toutes les mains, vous l’aurez compris au vu de ce que je viens d’écrire, mais il a le mérite de le proposer (et d’avoir émulé des titres dans la même veine à une époque ou le refus de frustrer le joueur est devenu omniprésent).
Pas de pitié mais de la piété
Dans Dark Souls, votre périple vous mènera à des feux de camp qui feront office de points de retour à la vie. Vous y reposer remplira votre fiole d’Estus (potion de santé) – et ce sera la seule façon d’y parvenir – tout en ressuscitant l’immense majorité des ennemis. Vous aurez aussi la possibilité de redevenir humain en utilisant de l’Humanité (petites âmes sombres que vous pourrez récupérer dans des coffres et sur des ennemis). L’un des intérêts est de pouvoir accéder au multijoueur. D’autre part, plus votre compteur d’Humanité est élevé, meilleure est votre chance de trouver du butin sur les ennemis (PNJ) que vous tuez. Enfin, les feux de camp permettent de dépenser les âmes (points d’expérience) que vous avez récolté en éliminant vos adversaires pour augmenter vos caractéristiques. Le deal est le suivant : si vous mourez, vous repartez du dernier feu de camp visité en perdant votre humanité et vous devez partir récupérer votre expérience non dépensée et l’Humanité consommée à l’endroit où vous êtes mort. Si vous êtes abattu en route, vous pouvez lui dire adieu.
Le rapport risque vs récompense est […] important et c’est aussi ce qui rend l’aventure Dark Souls palpitante.
Le rapport risque vs récompense est donc important et c’est aussi ce qui rend l’aventure Dark Souls palpitante. D’autant que, comme signalé juste au-dessus, être humain ouvre la voie au multijoueur. Autrement dit, il est possible d’envahir les parties des autres joueurs pour leur voler une humanité, ce qui implique bien entendu que vous vous trouvez dans la même position de vulnérabilité. Un peu de piment dans un plat à base de piment de Cayenne, quoi de mieux ? Dommage que le netcode de Dark Souls soit radicalement foiré. C’est bien simple, vous frapperez bien souvent dans le vide quand bien même vos yeux vous diront clairement que vous avez touchez votre cible. Un système qui part d’une excellente idée mais qui a été codé avec le postérieur, pour rester poli.
Dark Souls a de plus prévu un système de serments, sortes de religions qui octroient des récompenses particulières en fonction de la quantité des trophées que vous ramenez sur l’autel du vôtre. Pour obtenir un trophée, chaque serment à ses propres règles.
Roule Forrest, roule !
Afin de décalquer vos adversaires, beaucoup d’armes sont à votre disposition. Le but est de coller un maximum au style que vous choisirez : sorts, armes à une/deux main(s), d’estoc, contondantes… Les armures aussi vous permettront de personnaliser votre façon de jouer grâce à différents degrés de protection, des spécialisations élémentaires et un poids qui vous laissera plus ou moins libre de vos mouvements. Quantité d’objets vous attendent, vous aurez donc l’embarras du choix.
Tous les combats sans exception demanderont de vous que vous appreniez à connaître les mouvements de vos adversaires ainsi que leurs enchaînements de coups (bien entendu, ceci est particulièrement vrai pour les boss). Il vous est possible de parer si vous avez un bouclier, ce qui autorise une puissante contre-attaque (notez que les attaques critiques sont également possible en attaquant par derrière). Vous pouvez aussi choisir le camp de la roulade, qui est en fin de compte le plus facile. Il s’agit d’ailleurs d’un reproche que l’on peut faire à Dark Souls : les combats mériteraient de disposer d’autres possibilités que la roulade à la chaîne ou le bouclier levé en permanence. Malgré tout, on ne peut nier le caractère haletant des affrontements et la tension que l’on ressent bien souvent.
Le côté obscur est effectivement bien attrayant
Dark Souls propose une vision du jeu vidéo à la fois traditionnelle et novatrice. Le retour à véritable difficulté, même si indéniablement un peu épicée, accompagne un univers et une histoire formidables pour le peu qu’on ait envie de faire le travail d’archéologue nécessaire à les comprendre. Doté d’un gameplay solide auquel on pourra reprocher l’omniprésence de la roulade, Dark Souls offre des affrontements haletants au cœur d’une direction artistique de dark fantasy dépaysante. L’aventure complète vous promet de plus de longues heures de jeu, durant lesquelles vous apprendrez à la dure mais où le sentiment de récompense se révélera incomparable. On peut aussi mentionner un contenu très étoffé, un rapport risque vs récompense largement au rendez-vous, des boss emblématiques et un level design parmi les meilleurs de cette décennie.
► Points forts
- Possibilité de vous orienter vers le gameplay qui vous correspond le plus peu importe la classe choisie
- Univers et scénario passionnants dont les pièces sont à rassembler (pour celles disponibles)
- Direction artistique variée et de talent
- Une vraie courbe de progression qui met l’accent sur l’apprentissage à la dure
- Beaucoup de contenu
- Durée de vie très, très solide
- Rapport risque vs récompense très bien maîtrisé
- Bestiaire étoffé
- Boss emblématiques et originaux
- Level design génial
► Points faibles
- Éditeur de personnage aux fraises
- Multijoueur foiré (et en plus bourré de tricheurs)
- Rigide dans le gameplay
- Chutes de framerate parfois drastiques (coucou Hameau du Crépuscule)
Il faut souffrir pour réussir
Dark Souls est disponible sur PC, Xbox 360 et PS3.