3 légendes de la plateforme 3D dans une seule cartouche, ça vous dit ? Pour les 35 ans du plombier moustachu le plus célèbre du Jeu vidéo, c’est exactement ce que propose Nintendo. Ni plus ni moins.
Heeee weego !
Nous sommes en 1998 et le jeune Citizen Erased a 8 ans. Déjà biberonné au jeu vidéo par un père informaticien qui est lui-même joueur, notre héros s’éclate sur Quake, StarCraft et moult Points & Clicks de Lucasarts, mais tous ses potes de récré ne parlent que de Megadrive et de Super NES depuis des années. Les uns défendent Sonic, une espèce de raton laveur bleu (tout ça n’était pas très clair), et les autres Mario, un plombier moustachu qui ne fait jamais de plomberie. “On est quand même mieux à dézinguer de l’alien à coup de tatane. C’est autre chose que leurs jeux de bébé, pensait-il”.
Pourtant, lors d’une fatidique promenade à Toys “R” Us, elle était là, posée fièrement au milieu de l’allé : une pile de Nintendo 64. Plus de 1000 francs ? C’est cher, mais après une représentation digne de la Comédie française avec la grand-mère pour seul public, le jeune Citizen Erased repart avec son trophée. Il sera enfin accepté par les kool kids.
Heureusement, il y a un jeu offert avec la console. Pas la peine de faire autre un numéro pour acheter une cartouche qui coûte un bras. Super Mario 64 ? Moui, bon. Faut bien commencer quelque part. Il était sur le point de prendre une belle tarte dans la gueule.
Bordel de merde, Super Mario 64 a plus de 20 ans.
Mémoire morte
Ou plutôt, Mario a 35 ans. En effet, Super Mario Bros. est sorti sur NES en 1985 et dire qu’il a eu un impact considérable sur le monde du jeu vidéo serait un euphémisme. On ne reviendra pas là-dessus, mais Nintendo compte fêter ce 35e anniversaire comme il se doit en sortant une suite spirituelle à Super Mario All-Stars, en compilant les 3 premiers jeux en 3D de la licence pour la Nintendo Switch. Un petit sous-titre “3D”, et le tour est joué.
Nous voilà donc avec Super Mario 64, sorti en 1997 en France, Super Mario Sunshine sorti sur Gamecube en 2002 et Super Mario Galaxy, carton de la Wii depuis 2007. 3 jeux fantastiques qui ont su chacun apporter leur pierre à l’édifice du monument Mario, tout en gardant un core gameplay similaire. Ceux qui aiment bien dire du mal de Nintendo en prétextant qu’ils “sortent toujours les mêmes jeux” n’y ont tout simplement pas joué. C’est impossible autrement.
3 jeux fantastiques qui ont su chacun apporter leur pierre à l’édifice du monument Mario.
À partir de là, vous vous questionnez : “attends, trois consoles représentées, mais pas de Super Mario Galaxy 2 ? Alors que certains le préfèrent au premier ?” Et c’est le moment pour moi de vous répondre en haussant haut les épaules, paumes vers le ciel, de l’air s’échappant de mes lèvres en poussant très fort sur la joue.
Cette omission de la part de Nintendo est inexplicable et inexpliquée par le premier concerné. Même dans une vidéo officielle qui retraçait 35 ans d’histoire de Mario, le jeu n’était pas représenté. Est-ce que Big N a honte de cet épisode ? On ne sait pas pourquoi. On peut imaginer un DLC dans un futur plus ou moins proche pour combler ce manque, mais vu comment Nintendo s’est montré inconsistant dans sa façon d’aborder la sauvegarde et la mise à disposition de ses vieux titres, il ne vaut mieux pas compter là-dessus… même si les jeux accessibles via le Nintendo Switch Online est un pas dans la bonne direction.
3 consoles représentées, mais pas de Super Mario Galaxy 2 ?
Cette — grosse — lacune à part, on se retrouve quand même avec 3 jeux complets et bien long à terminer. La question du prix est toutefois légitime pour 60€. Quand Mario All-Stars a été réédité sur Wii à l’occasion des 25 ans, le prix de 25€ était déjà considéré comme élevé pour 4 jeux Super NES, mais justifié — si on veut —par l’anniversaire au même chiffre. On aurait pas dit non à un tarif de 35€, pour le coup…
La compilation est clairement fainéante sur de nombreux points, mais il y a quand même un point qui fait plaisir : la possibilité d’écouter les bandes originales de chaque jeu en haute qualité de façon indépendante… ce qui nous rappelle encore une fois que Nintendo n’a toujours pas de label pour proposer ses bandes-son de façon légale. Non, Big N préfère clairement faire la chasse sur YouTube plutôt que d’ouvrir un compte Spotify et foutre sa discothèque en ligne contre rémunération. Faire plaisir aux fans de la première heure ? Pourquoi faire ?
Il y a quand même un point qui fait plaisir : la possibilité d’écouter les bandes originales de chaque jeu en haute qualité.
Mais la mode est aux remakes et aux remasters ! On suppose aisément que Nintendo a bien observé la concurrence pour savoir ce qu’il fallait faire et ne pas faire. Et puis, les remasters HD de Zelda: Wind Waker et Twilight Princess n’étaient pas si mal.
Haha, non.
The cake is a lie
Retour en 1997 avec Super Mario 64. Le titre phare de la Nintendo 64 est sûrement celui qui a été retouché le moins avec un affichage en 4:3. La texture de la casquette de Mario est enfin parfaitement symétrique (incroyable), mais le reste est très proche de ce qu’on peut avoir sur un émulateur. La résolution en 720p est très appréciable cependant, bien que le boulot se fasse un peu tout seul.
En appuyant sur le bouton –, on peut ouvrir le menu de la compilation pour vérifier toutes les actions de gameplay possibles et changer de jeu très rapidement. On sent que Mario 64 a bien été pensé pour la manette de la 64 avec son stick cranté qui fait mal au pouce et ses boutons C qui empêchent de régler la caméra de façon un peu plus moderne, mais il ne faut pas oublier qu’il était le premier à faire tout ça. D’ailleurs, le texte intégré en jeu affiche les vrais boutons de la Switch, preuve qu’il y a eu de la vraie bidouille, mais on y reviendra.
Le texte intégré en jeu affiche les vrais boutons de la Switch.
Malgré un petit temps d’adaptation pour ceux qui n’y ont jamais touché, le gameplay de Super Mario 64 n’a pas pris une ride et est toujours très agréable aujourd’hui. Bon, il y a quelques idées de game design qui ont mal vieilli et le titre est parfois un brin frustrant, mais courir après les 120 étoiles disséminées dans le château de Peach est toujours un vrai plaisir.
On accepte volontiers la décision de s’en tenir à la version Nintendo 64 pour respecter l’œuvre originale, mais quand on y pense, on n’aurait pas dit non à la version DS qui ressemblait déjà à son époque à un remaster, avec plus de détails sur les modèles et du contenu en plus. On pouvait jouer Wario, quoi.
On n’aurait pas dit non à la version DS qui ressemblait déjà à son époque à un remaster.
Oh, Nintendo a quand même pris le temps de changer une réplique de Mario. Vous savez, celle quand ce dernier balance Bowser comme un sac à patates pour lâcher un “so long, gay Bowser”. Oui, bon, ce n’est pas vraiment ce qu’il dit, mais l’hallucination auditive était bien là. Voilà, voilà.
Restriction d’eau due à la sécheresse
Super Mario Sunshine sorti en 2002 n’est que le deuxième Mario 3D et déjà une première rupture. Le titre ne fait pas l’unanimité auprès des fans, mais il serait intellectuellement malhonnête de penser que l’inclusion de J.E.T est gadget. Oui, j’ai lâché le terme “intellectuellement malhonnête”. L’équipement de Mario basé sur l’eau apporte énormément de variété au gameplay, avec quelques outils qui permettent même d’être créatif sur la façon d’aborder la plateforme. Et même sans J.E.T, le reste du jeu propose énormément d’idées pour varier les plaisirs.
Le plus gros point fort de ce portage est sans doute la possibilité de jouer en 16:9, et ça change absolument tout. Bon, le framerate n’est pas idéal et très proche de l’époque Gamecube (tiens, tiens) et l’aliasing prononcé ne rend pas le titre parfaitement lisible. La direction artistique du jeu fait toujours un boulot formidable (on en oublie parfois que le jeu a lui aussi… presque 20 ans), mais certains effets visuels, comme cette déformation de la lumière à cause de la chaleur ambiante, qui faisaient mouche à l’époque se transposent mal sur un système moderne sans mettre la main dans le cambouis.
Le plus gros point fort de Sunshine est sans doute la possibilité de jouer en 16:9.
Vous l’aurez compris, on soupçonne fortement la compilation de se reposer sur des émulateurs et non de réels portages. C’est un peu fainéant et ça se ressent. Une vraie solution propre aurait permis de jouer à un meilleur framerate et de corriger ces problèmes visuels, pas forcément présents d’un jeu à l’autre.
M’enfin, tant que le plaisir de jeu est là, tout va bien ? Arf, comme dire… ils ont foiré les contrôles. Étant donné que les manettes Gamecube avaient des gâchettes analogiques, il fallait trouver un moyen de garder la maniabilité intacte avec des boutons classiques. Mais le schéma des contrôles est particulièrement incompréhensible et c’est dur de s’y faire. Il faut désormais 3 gâchettes pour contrôler J.E.T et la carte (inutile) s’ouvre sur la quatrième… alors que les boutons directionnels ne sont pas mappés !
Arf, comme dire… ils ont foiré les contrôles.
“M’en fous, j’ai un adaptateur Gamecube, j’ai qu’à jouer avec” Encore pire ! Nintendo avait prévenu d’emblée, mais la manette de Gamecube n’est absolument pas prise correctement en compte ! Les boutons ne sont plus au bon endroit par rapport à l’époque et les gâchettes n’ont plus rien d’analogique. C’est vraiment du gâchis, à ce niveau-là.
Harmonie, épouse-moi
Reste alors Super Mario Galaxy sorti en 2007. Pour le coup, le portage s’avère clairement plus compliqué, mais ce n’est (presque) pas la faute de Nintendo. Étant donné que le jeu tirait avantage des fonctionnalités de la Wii, il est clairement conseillé de jouer au combo Joy-Con pour viser avec la main droite, le gyroscope étant plutôt efficace pour remplacer le pointeur infrarouge de la Wiimote. Ce n’est pas parfait, mais il est alors possible de jouer avec une expérience très proche de celle de l’époque.
En revanche, avec une manette Pro, ce n’est clairement pas l’idéal. On passe alors son temps à se casser les poignets pour attraper les Fragments d’étoile et viser. On est à la limite de l’acceptable en termes de confort sur les grosses sessions, mais c’était difficile de faire autrement. Le mode portable n’est pas obligé d’en passer par là, merci Miyamoto-sama, le système de pointeur étant remplacé par… l’écran tactile. Très bonne idée en prime abord, il faut alors lâcher les commandes d’une main pour pointer l’élément avec lequel interagir, alors que certaines phases de gameplay nécessitent clairement de faire les deux en même temps. Je plains vraiment les possesseurs de Switch Lite.
Pour Galaxy, il est possible de jouer avec une expérience très proche de celle de l’époque.
Toutefois, tout n’est pas noir puisque le jeu tourne à une très jolie résolution pour un framerate à 60 FPS solide. C’est clairement le portage le plus agréable des trois jeux… à condition qu’on accepte de jouer aux Joy-Cons.
Nintendo, je t’aime beaucoup, mais parfois tu restes un profond mystère.
Tiens, v’là ma mixtape
Super Mario 64, Super Mario Sunshine et Super Mario Galaxy sont des jeux qui n’ont pas pris une ride… et Nintendo en est parfaitement conscient. La firme de Kyoto a regardé ce qu’il était possible de faire pour adapter les jeux sur Switch et s’est contentée du minimum. En soi, il y a vraiment de quoi faire que vous ayez envie de découvrir ou redécouvrir des hits intemporels qui ont fait de Mario la légende qu’il est aujourd’hui, mais c’est tellement fainéant sur certains aspects qu’on a l’impression que cette compilation aurait clairement pu être plus. On y trouve de l’amusement sous couvert de nostalgie et la réalisation que ces jeux sont toujours aussi bon, parfois plus de 20 ans après leur sortie respective. Mais voilà, encore un produit qui nous fait questionner du réel respect de Nintendo pour ses vieux succès.
Ce qu’on a aimé :
- 3 jeux cultes, une seule cartouche
- Mario 64 reste une curiosité agréable
- Sunshine en 16:9
- Galaxy sans aliasing
- Soundtrack complète des trois jeux
- Les commandes visibles depuis la pause
Ce qu’on n’a pas aimé :
- Vous êtes sûr qu’on pouvait pas faire un peu plus avec Mario 64 ?
- Le schéma de contrôle de Sunshine (manette Gamecube non prise en compte, que… quoi ?)
- Sunshine n’est pas très lisible ni très fluide
- Galaxy vraiment pas agréable en mode portable
- Minimum syndical sur l’ensemble de la compilation…
- … mais pas pour le prix
- UNE VENTE EN TEMPS LIMITÉE ?! SÉRIEUSEMENT SÉRIEUX ?!
Ce jeu est fait pour vous si :
Avez envie de faire Mario 64 une trentième fois ; voulez donner une seconde chance à Sunshine ; cherchez à jouer à Galaxy dans de bonnes conditions.
Ce jeu n’est pas fait pour vous si :
Vous vous attendiez à de vrais remasters ; vous trouvez déjà votre bonheur dans les émulateurs.
WarLegend.net a bénéficié d’une copie presse fournie par l’éditeur de ce jeu.
Super Mario 3D All-Stars sera disponible sur Switch du 18 septembre 2020… au 31 mars 2021.