Le communisme avance
Le mois d’août a été le théâtre d’une histoire assez rocambolesque dans l’univers du développement indépendant. Le célèbre studio Lab Zero Games connu pour ses jeux 2D dessinés à la main comme Skullgirls et Indivisible est entré en guerre contre son lead designer et PDG, Mike Zaimont. Attentionné et amical avec les membres du studio qu’il a fondé avec des amis, il s’avère en réalité qu’il n’était pas du tout attentionné et amical. Le monsieur est en fait un manipulateur qui abusait des faiblesses de ses collègues et dont on reproche de multiples comportements inappropriés.
Résultat des courses, des employés ont commencé à quitter le navire. La véritable raison ? Mike Zaimont a réussi à se débrouiller pour être le seul détenteur de l’entreprise, alors qu’il s’agissait d’un studio à taille humaine d’une vingtaine de personnes. La confiance régnait, alors il n’est pas étonnant que les membres clés des premiers jours soient tombés de haut, comme le producteur artistique Brian Jun :
Mike Z a crée un environnement de travail très inconfortable pour tout le monde. Il est l’unique propriétaire de Lab Zero Games et son retrait est difficile. Il a initialement accepté de partir, mais n’est pas disposé à faire un compromis raisonnable, alors je décide de partir maintenant.
I’m leaving Lab Zero Games.
Short version:
Mike Z creates an unsafe work environment for everyone.
He is the sole owner of Lab Zero Games, and removing him is difficult. He originally agreed to leave, but is unwilling to make a reasonable compromise, so I’m taking my exit now. pic.twitter.com/Uk4GjMt62k— EU03 (@ClickAgain) August 23, 2020
D’autres employés comme l’animateur Jonathan Kim rapporteront des histoires similaires sur Twitter, appuyant l’idée que la bonne chose à faire est de laisser le PDG seul avec sa boîte vide et ses pensées.
Presque tous les employés ont une histoire à raconter où Mike a abusé de sa position de pouvoir pour placer ses collègues dans des situations de stress inconfortables pendant des années, notamment : mentionner fréquemment ses organes génitaux, forcer un contact physique indésirable, faire des commentaires sexuels sur lui-même ou sur le corps des employés, insulter des collègues en privé ou devant d’autres collègues, ou en utilisant des détails très personnels pour menacer ou rabaisser des collègues lorsqu’ils n’acceptaient pas ce qu’il voulait ou n’agissaient pas comme il le souhaitait. Mike a dissimulé son comportement en faisant des choses gentilles, alors quand les gens l’interrogeaient sur ses mauvaises actions, il citait ses bonnes actions précédentes comme raisons pour lesquelles il était autorisé à en faire de mauvaises.
Face à cette vague de départ massive, Mike Zaimont a fini par virer le reste du staff, avant de lâcher chez Kotaku qu’il s’agissait d’une manœuvre pour sauver le studio, alors incapable de payer les employés restants. Le PDG espérait même réunir l’équipe à nouveau, mais il faut reconnaître qu’il s’agit d’une belle parole en l’air pour se sauver la face.
Se tourner vers le turfu
Pas démontés, la grande majorité des anciens employés de Lab Zero Games viennent d’annoncer la fondation de Future Club. Traumatisés par l’expérience avec Mike Zaimont, les fondateurs ont décidé que les parts du nouveau studio seront réparties équitablement entre tous les employés. Même salaire pour tous et pas de patron, à l’instar du studio bordelais Motion Twin (Dead Cells). Un statut pas vraiment reconnu et supporté par l’administration américaine, mais c’est un principe de fonctionnement auquel le studio tient :
Future Club appartient aux employés et nous pensons que nous sommes plus grands que la somme de nos parties. Nous apprécions une communication ouverte et honnête avec nos pairs, partenaires et joueurs, et croyons en notre force en tant qu’équipe.
Le studio affirme déjà travailler sur de nouvelles licences, mais il n’est pas impossible que le suivi de Skullgirls soit remis entre ses mains. En effet, Autumn Games qui détient les droits du jeu de combat avait déclaré vouloir s’éloigner de Mike Zaimont et Lab Zero Games, mais qu’il espérait pouvoir renouer un lien avec les anciens créateurs :
Skullgirls, sous toutes ses formes, a été le produit d’années et d’années d’efforts de la part de dizaines de développeurs, artistes et designers. En tant que tels, Hidden Variable et Autumn Games se sont engagés à investir dans le développement de Skullgirls sans l’implication de Lab Zero ou Mike Zaimont. Nous prévoyons de travailler avec les nombreuses personnes talentueuses qui quittent Lab Zero pour créer du nouveau contenu pour Skullgirls à l’avenir.
Une suite logique, mais un soulagement pour les fans, en fin de compte. En avril 2020, Skullgirls a fêté ses 8 ans et a fait… ah, aurait dû faire sensation au dernier EVO Online, finalement annulé pour comportements déplacés de la part de l’organisateur. Sérieusement, c’est compliqué de ne pas tomber sur des trous du cul dans l’industrie.