Bobby est content
Suite et fin d’une saga qui aura duré 22 mois : Microsoft annonce qu’il a entériné son acquisition d’Activision-Blizzard, grâce au feu vert de la CMA qui a réévalué son blocage au Royaume-Uni plus tôt dans l’année. La GAFAM a même réalisé une jolie vidéo inspirante pour l’occasion, rappelant qu’une ribambelle de belles franchises fait désormais partie de l’écosystème Xbox.
Ainsi, Call of Duty, WarCraft, Crash Bandicoot, Diablo, Spyro The Dragon ou encore Tony Hawk Pro Skater sont désormais des licences qui appartiennent à Microsoft (ce qui n’est pas le cas de Sekiro, contrairement à ce que la vidéo veut laisser penser).
Cette acquisition n’aura coûté que la bagatelle de 68,7 milliards de dollars (sans compter les frais de lobbying liés au rallongement de la validation), ce qui fait passer le rachat de Zenimax/Bethesda estimé à 8,1 milliards pour un simple en-cas. Même l’acquisition remarquée de LinkedIn par la firme de Redmond aura coûté presque 3 fois moins.
Cette manœuvre a bien sûr pour but de renforcer toujours plus le portfolio de Microsoft, qui cherche en permanence de rentabiliser son investissement toujours plus grandissant dans l’industrie jeu vidéo, et notamment dans celui d’un certain Game Pass. Il n’est pas très difficile d’imaginer la puissance d’un accès au Call of Duty annuel via un simple abonnement.
Toutefois, ce mastodonte fait partie de ces quelques licences que Microsoft ne veut pas rendre exclusives à sa propre plateforme, à l’instar sans doute des jeux Blizzard. Pour le moment, en tout cas, car les prochains Call of Duty continueront à paraître sur PlayStation, et ce pendant au moins 10 ans selon un accord signé entre Microsoft et Sony. Sans les ventes sur PlayStation, cette acquisition serait sans doute financièrement absurde, même dans un but de consolidation de son propre catalogue.
Ce qui amène à un autre point : à l’instar de Zenimax/Bethesda, on voit mal Microsoft s’immiscer – du moins, pour l’instant – dans le fonctionnement de l’éditeur qui devrait continuer à faire sa propre tambouille pendant quelque temps… même si on appréciait que l’entreprise mette son nez dans la relation toxique qui existe entre Activision et Blizzard. Ces dernières années, les méthodes de management et certaines décisions de la firme d’Irvine ont été largement influencées par l’éditeur de Call of Duty (bien que le studio souffrait de ses propres problèmes en interne).
Et de fait : quid des jeux Activision-Blizzard dans le Game Pass ? Cela arrivera inévitablement, mais la semaine dernière, l’éditeur a assuré que ses titres majeurs ne seront sans doute pas concernés avant 2024.
Pot de départ
Justement, en parlant des sujets qui fâchent : est-ce que Bobby Kotick va quitter ses fonctions de PDG d’Activision-Blizzard-King, comme il l’avait promis ? Limite formulée comme un point positif pour encourager les commissions de régulation des marchés à valider le deal ?
Dans une lettre ouverte destinée aux quelque 17 000 employés du groupe, Kotick affirme que Phil Spencer, patron de la division Xbox chez Microsoft, lui aurait demandé de rester encore en fonction pendant un temps, afin d’aider au mieux à l’intégration du groupe dans l’écosystème Xbox.
Toutefois, que les détracteurs se réjouissent, Bobby Kotick devrait quitter ses fonctions début 2024, après 33 ans de leadership à la tête d’Activision.
J’ai toujours dit je resterais pleinement engagé dans cette transition. Phil m’a demandé de rester PDG d’ABK, sous ses ordres, et nous avons convenu que je le ferai jusqu’à la fin de 2023. Nous sommes tous les deux impatients de travailler ensemble pour une intégration fluide de nos équipes et de nos joueurs. Brian et moi ne pourrions être plus excités pour le prochain chapitre d’ABK. Nous rejoignons désormais l’une des sociétés mondiales les plus prospères, prêtes à saisir des opportunités sans précédent pour connecter le monde grâce à nos jeux.
Depuis 1991, le fameux patron d’Activision aura su tout de même transformer un éditeur mineur en faillite en l’une des plus impressionnantes machines à cash de l’industrie, notamment par le succès sur le long terme de Call of Duty, dont l’impact culturel mondial n’est pas à sous-estimer.
En revanche, ces dernières années, son bilan est fortement contrasté par plusieurs scandales qui se chevauchent, à une époque où les conditions de travail et les cas de harcèlements moraux et – surtout – sexuels sont de plus en plus pointés du doigt dans l’industrie. Le management d’Activision-Blizzard serait particulièrement toxique, et Bobby Kotick aurait été un principal moteur de cette ambiance délétère au sein du groupe, au point d’avoir camouflé des faits graves à ses actionnaires et des commissions d’enquête.
Bon vent, comme on dit. C’est toujours plus agréable pour manœuvrer son beau parachute doré.
Comment ça, Ubisoft est là aussi ?
Le plus étonnant dans cette affaire, c’est sans doute la manière dont Microsoft s’est débrouillé pour se débarrasser du point bloquant de la CMA qui voyait d’un très mauvais œil cette acquisition qui a le potentiel de changer la trajectoire de l’industrie. Toutefois, ce n’est pas l’intégration de Call of Duty dans le Game Pass qui a fait tiquer la commission chargée de la régulation des marchés britannique… mais le fait que cela pourrait renforcer Xbox sur le marché du Cloud Gaming.
S’invite alors un nouvel acteur dans cette affaire : Ubisoft, qui permet à Microsoft d’acter le rachat sur le sol britannique, mais en cédant ses droits en ce qui concerne les jeux Activision-Blizzard-King à l’éditeur français dès qu’il est question de jouer sur via le Cloud, grâce à une intégration à l’abonnement Ubisoft+ qui propose un tel service dans quelques pays.
Je parie que vous ne saviez même pas qu’Ubisoft avait son propre service de Cloud Gaming.