L’ascension des machines
Les jeux narratifs plus ambitieux que réussis sont légions, mais rares sont ceux si mal écrits qu’on les soupçonne d’avoir été générés par intelligence artificielle. Silent Hill Ascension s’impose donc dores et déjà comme une œuvre unique dans le monde – pourtant large – de la création, puisque le CEO de son développeur en est arrivé à devoir affirmer sur Twitter que si si, ce sont bien des humains qui en sont à l’origine.
Every word in Ascension was written by real people, many of whom have long-running careers in writing including Telltale titles, Pixar titles, GoW Ragnarok, Resident Evil Village and more. Across our 100,000+ words, zero are authored by LLMs or AI, and all are from dedicated work…
— Jacob Navok (@JNavok) November 27, 2023
Chaque mot a été écrit dans Ascension par de vrais gens, dont beaucoup ont eu de longues carrières dans l’écriture, notamment dans des titres de Telltale, de Pixar, dans God of War Ragnarok, Resident Evil Village et plus encore. Sur nos 100 000+ mots, aucun n’a été rédigé par LLM [NDLR : grand modèle de langage] ou IA. Ils viennent tous du travail acharné d’une équipe talentueuse.
Parler de “jeu narratif” est sans doute un poil exagéré pour décrire Silent Hill Ascension. Derrière ce nom plutôt sobre, il y a en réalité un projet sur le papier assez novateur : celui d’une série interactive en streaming que les spectateurs peuvent influencer en votant. Bref, a priori, pas de quoi crier au loup, et à l’inverse, on aurait même pu s’attendre à une expérience sociale sympathique ou intéressante. C’était sans compter sur une monétisation digne des pires free-to-play coréens, mais surtout sur des dialogues si délirants qu’ils en paraissent carrément surréalistes.
Old: “It’s bread”
New: “I like to make jams” pic.twitter.com/GzVTdKrqIz— VoidBurger (AKA Jess) (@VoidBurger) November 25, 2023
Cette séquence partagée par Voidburger sur Twitter, et que PCGamer a eu la bonté de retransmettre à nos yeux écarquillés, incarne apparemment le paroxysme de ces bizarreries narratives : un homme mis en joue par un autre avec un fusil, explique devant un écran trop occupé à afficher le nom du joueur qui a payé pour son apparition, qu’il est venu dans les bois pour chercher des baies, refuse d’élaborer, puis quitte la scène – et peut-être même l’histoire – définitivement, sans rien avoir apporté d’autre qu’un sourcil circonspect sur le visage du spectateur.
Autant de curiosités (assez rigolotes, il faut bien l’admettre) qui font que Jacob Navok, le PDG de Genvid, a choisi de revenir en détail sur son rapport à l’intelligence artificielle : certes, le développeur aurait bien tenté d’accorder un rôle grandissant à l’IA dans ses productions notamment en 2021, mais son efficacité n’aurait pas été très convaincante. Une déclaration qui fera lever le fier poing des humanistes, et prouve une bonne fois pour toute que les Hommes font décidément tout mieux que les IA. Y compris écrire comme des IA.