Nous sommes à un mois de la sortie de Hitman 2 et le chauve le plus célèbre du monde du jeu vidéo s’est laissé approcher le temps d’une session sur la nouvelle mission située en Colombie. Le plat de résistance de cette prise en main était surtout constitué d’un tout nouveau mode multijoueur compétitif en ligne, encore gardé secret jusqu’à maintenant.
L’assassinat, un secteur qui ne connaît pas la crise
Voilà déjà deux ans que l’excellent reboot d’Hitman est sorti, et malgré son format épisodique qui a pu faire grincer des dents, le package complet s’en sort pas trop mal. On avait effacé l’affront d’Absolution et on était reparti avec de bonnes vieilles valeurs : une grande ouverte, une infinité d’approches des cibles et un gameplay aux petits oignons qui mettait en avant la créativité du joueur (avec la possibilité de créer des situations hilarantes).
Hitman 2 était censé être à la base une deuxième saison avec le même nombre d’épisodes que le titre de 2016, mais le support d’un nouvel éditeur (Warner Bros. Games) a permis d’assurer la sortie d’un jeu complet à la mi-novembre et d’abandonner la distribution du contenu au compte-gouttes. Pour l’instant, nous n’en connaissons que deux : la course de voiture de Miami et Santa Fortuna, une petite bourgade de Colombie.
Si Miami s’est laissé approché à plusieurs reprises par la presse, le niveau de la Colombie était jouable.
La Colombie, sa culture, sa jungle, sa farine artisanale…
Teasée comme un enfer vert avec son environnement tropical, la carte de la Colombie est en fait pas si vert que ça. On irait presque dire que la brochure de l’agence de voyages était mensongère, mais une fois qu’on se balade pour se familiariser avec les lieux, on se rend compte que le travail de IO Interactive est toujours aussi bien foutu.
Le petit village où débarque 47 est crédible et la population vit son petit train-train quotidien. L’environnement fourmille de détail et les itinéraires ou autres points d’accès aux zones sensibles sont nombreux. On scrute les bâtiments un à un et on essaie de déduire s’il sera utile pour la suite des opérations. Comme un tueur à gages qui fait son repérage, quoi.
Cependant, le contraire aurait été fichtrement décevant. C’est le minimum syndical qu’on exige d’une bonne carte d’Hitman : être ouverte et généreuse en nombre de choses à faire.
Le but de la mission est d’éliminer les trois membres principaux d’un cartel très puissant. Chacun possède son petit territoire et il faudra alors s’en occuper les uns après les autres. Comme les missions sont un peu longues les premières fois qu’on les joue, on pourrait presque croire à différents arcs “narratifs”.
Je passe alors les 15 premières minutes de ma session à me balader tout simplement sur la carte en jouant le simple touriste (en profiter pour admirer le travail d’IO Interactive sur le level design). Le but de la manoeuvre étant bien sûr de trouver des points faibles dans la sécurité et découvrir des opportunités pour approcher les cibles.
Ça va couper
Au détour d’un chemin, je croise un couple de touristes — un peu hipsters sur les bords — qui discutent, en train de prendre des photos de piafs. Apparemment, un tatoueur mondialement célèbre est en ville pour exprimer son art sur le chef du cartel. Ce dernier serait en train de baliser dans un bar local et flippe sa race à l’idée de tatouer un criminel très dangereux.
Je le trouve. Il est en train d‘appeler un ami pour qu’il vienne le chercher, trouvant que c’est finalement une très mauvaise idée. Accoudé au comptoir, je me déplace vers un jukebox et active la machine. La musique latinos empêche l’éminent tatoueur de communiquer et ce dernier s’éloigne du bruit à côté du bâtiment, loin des regards indiscrets. Que ferait 47 dans une situation pareille ? L’assomer, le mettre dans une benne et lui piquer ses fringues bien sûr. Même les tatouages de la pauvre victime sont transférés sur le corps de l’agent.
Les costumes sont toujours un élément aussi important dans le gameplay d’Hitman 2. Bien sûr, leur utilité est de pouvoir accéder à des secteurs qui vous sont interdits.
Ressemblant furieusement au tatoueur à présent, je me présente à l’hacienda de la première cible. Il a furieusement envie d’un tatouage.
Je vais te tatouer l’oreille
Devant la porte de la propriété, les gardes me fouillent. Bien sûr, j’ai mon pistolet à silencieux sur moi, ce qui n’est pas très malin. Cependant, plutôt que d’être fouillé pour découvrir qu’un Silverballer dépasse de ma chaussette, le jeu l’empêche, donnant une chance au joueur de pouvoir revenir plus tard quand il sera clean.
Ce n’est pas très réaliste de faire demi-tour devant une fouille au corps, mais ça permet d’éviter les bourdes grossières et de charger une sauvegarde un peu trop vieille. Les fouilles ont aussi l’intérêt de limiter le choix du joueur dans sa quincaillerie et de l’obliger à improviser avec ce qu’il a dans la zone qu’il a infiltrée. Heureusement, j’ai toujours ma corde à piano.
Arrivé à la grande maison, c’est la femme du patron qui m’accueille en nuisette. Alors qu’elle m’accompagne à ma cible (son mari), s’enclenche une scène surréaliste où elle papote sur le travail de l’artiste tatoueur alors que ce n’est manifestement pas lui. 47 répond alors de façon monocorde et stoïque — à sa manière — de la façon la plus décalée et drôle qui soit.
Hitman 2 n’oublie pas d’être très marrant. Soit pas l’action du joueur qui entraîne des catastrophes ou/et des morts humiliantes, soit par un humour méta autoconscient qui sait que la situation est ridicule, mais qui en joue énormément tout en étant bien écrit. La femme du baron de la drogue se prendra même en selfie avec “l’artiste”. Il aurait été intéressant qu’il faille récupérer le téléphone pour supprimer la photo, mais on se contentera du gag.
Quand le joueur décide de s’engager dans une narration construite, son enchaînement est toujours bien conçu et naturel. Une fois au travail, 47 finit par être seul avec la cible. Après lui avoir fait des gribouillis dans le cou, on peut enfin décider de lui planter le dermographe dans l’oreille, afin de “marquer les esprits”.
Maintenant que la couverture ne sert plus à grand-chose, il faut dégager de là.
Ne zappez pas
Le truc qu’on pourrait quand même reprocher au level design des deux récents Hitman, c’est qu’il y a toujours des chemins tout fabriqués à emprunter pour l’infiltration. Cela reste gratifiant de les repérer, mais cela peut nuire un peu à l’improvisation du joueur qui se contente de suivre la marche à suivre imaginée par le développeur. Après, cela fait partie d’un des nombreux scénarios possibles pour cette cible uniquement. Il faut relativiser.
Après avoir tué la cible, la seule issue est de passer par le balcon de la pièce. Forcément, il n’y a aucun garde dans les environs pour surprendre un chauve suspendu à trois mètres du sol. Je me faufile derrière la grande terrasse en évitant un garde sans difficulté et je me retrouve derrière une télé géante tournée vers une terrasse où des narcotrafiquants s’amusent avec des escort girls.
En débranchant la télé, l’un des hommes de main s’interroge et va voir de lui-même. Bien sûr, j’étais prêt à l’accueillir afin de lui piquer ses fringues. Il y avait même une caisse toute proche pour pouvoir le cacher, toujours hors de portée du champ de vision du reste du monde. Il existe beaucoup de zones comme celle-ci, uniquement prévues pour les embuscades.
Maintenant que je suis déguisé comme l’un des leurs, je me dirige vers la deuxième cible qui n’est pas très loin. Elle se trouve dans la plantation de coca, juste à côté de l’hacienda. Là encore, ça grouille de vie : de nombreux ouvriers sont à la tâche et des gardes armés de fusils d’assaut font des rondes.
J’ai petit problème dans ma plantation…
On doit à nouveau analyser la scène et choper la subtilité de la zone afin d’en tirer profit. Et c’est ainsi que se manifeste le truc particulier la carte : il est possible de se cacher et de se déplacer furtivement dans les plantations. Tel un Racaillou (un pokémon chauve) planqué dans les hautes herbes, je bondis sur un garde, le traîne au milieu de la végétation et enfile son beau poncho en plastique bleu.
À ce moment-là, une alerte s’active sur ma minicarte et une image montre le cadavre de la première cible : son corps a été découvert. Si cela révèle un peu de l’omniscience (comme le sens de l’assassin qui permet de voir les personnes à travers les murs), c’est quand même bien pratique pour savoir où on s’est foiré quand l’alarme retentit.
Du coup, toute la zone est en alerte. Passant inaperçu avec mon beau poncho bleu, j’erre entre les bâtiments et les rangées de plantes. Encore une fois, il y a de nombreuses choses à découvrir, comme des indices à collecter qui révèlent de nouveaux embranchements et de nouvelles opportunités pour chaque cible.
Par exemple, j’apprends qu’une grande statue à l’effigie du baron du cartel était instable. J’aurais pu très bien lui faire tomber dessus alors qu’il venait l’inaugurer, faisant passer sa mort pour un accident, la manière la plus élégante en somme. C’est pour ça qu’il ne faut pas hésiter à farfouiller longtemps avant d’entreprendre une action.
Alors que je suis en train de fouiner, je me rends compte que je suis dans le bureau de la deuxième cible, le chef de la production. Ce dernier rentre et se penche sur son bureau. M’étant occupé du garde en faction devant la porte juste avant, nous sommes seuls. Ne voulant pas laisser passer une occasion pareil, je décide de me le faire à l’ancienne : la corde à piano. Je ne prends même pas la peine de cacher le corps et quitte les lieux d’un pas vif.
Alors que j’étais parti pour tuer la troisième cible et ayant déjà quelques indices à son sujet (une histoire de lettre d’amour, si si), ma session se termine. Je me rends compte que j’ai pas mal traîné, mais j’ai pu tester à peu près ce que je voulais. Le plus gros morceau de cette session était à venir.
S.O.S Fantôme
Lors de cette session de prise en main, l’attraction principale était en fait le mode Ghost : un mode multijoueur tout nouveau qui fait son entrée avec Hitman 2. Il s’agit d’un mode compétitif en un contre un, à contrario du mode Assassin jouable en coop avec un ami.
Le bail est simple : vous et votre adversaire êtes lâchés dans un des niveaux du jeu (ce qui comprend ceux d’Hitman 2016) et une cible est générée au hasard dans le niveau. Le premier qui la tue sans être vue et sans que le corps soit découvert dans les 15 secondes gagne un point. L’autre joueur a alors un temps limité pour tuer sa cible, sinon, elle ne gagne rien.
Toutes les portes sont débloquées par défaut (pas la peine de retenir par coeur l’emplacement d’une clé), mais les zones d’intrusion sont toujours actives. Vous commencez sans équipement et il faudra aller quêter des caisses réparties dans le niveau pour récupérer des outils.
Si j’ai un peu d’appréhension au départ de l’idée d’une course à l’assassinat dans un jeu qui met en avant l’observation et la planification, on se rend compte que la précipitation est toujours votre pire ennemi, et c’est une bonne nouvelle. Seulement, une bonne connaissance du niveau donnera un avantage indéniable. Le premier arrivé sur la cible gagne la plupart du temps. Avoir le bon costume pour ouvrir un maximum de portes est généralement la première chose à faire.
Les joueurs se voient mutuellement dans le niveau, mais ils ne peuvent pas interagir entre eux. J’ai toujours du mal à savoir s’ils partagent le même monde ou si chacun joue dans sa propre instance du niveau. Ce n’était pas très clair de ce point de vue là, mais une chose est sûre, si vous vous faites tué, vous réapparaissez à un endroit aléatoire. Un moment très amusant de la démo était quand j’empêchais mon adversaire de viser avec son fusil sniper avec mon beau crâne luisant, planté devant. Il suffit simplement d’être créatif.
Si les développeurs d’IO Interactive nous ont prévenus que le mode de jeu est toujours en bêta et qu’il le sera encore lors de la sortie d’Hitman 2, ce n’est clairement pas encore au point, même si on arrive quand même à s’amuser.
La majorité des joueurs présents n’ont pas eu trop de soucis, mais j’ai personnellement bataillé avec mon adversaire pendant PRESQUE UNE HEURE, sans qu’un vainqueur soit déclaré au final. Il y a pour l’instant plusieurs points très frustrants : il n’y a pas de timer de fin de partie, tuer un innocent enlève un point (alors que c’est pas facile à avoir), les costumes deviennent inutiles à force de se faire griller et les conditions d’éliminations rendent les armes à feu totalement inutiles la plupart du temps.
De même, les caisses de matériel ne se régénèrent pas. Il arrive un moment où vous ne vous pouvez même plus trouver d’outils pour vous faciliter le boulot. Il m’est surtout arrivé de réapparaître pile devant un vigile alors que votre couverture avait déjà sauté.
Heureusement, les points problématiques semblent faciles à corriger et IO est au courant de ces soucis.
Finalement, le mode Ghost est un bon compromis entre l’expérience Hitman de base et un mode multijoueur où il faut être le premier arrivé. Ça manque de finitions, mais cela pourrait être un bon défouloir une fois qu’on maîtrise bien une carte.
Extension de contrat
Hitman 2 ne révolutionnera pas la formule du reboot d’Hitman 2016 et encore moins de la série entière, mais pourquoi changer quelque chose qui fonctionne encore et toujours ? La carte de la Colombie est dans la droite lignée de la qualité des cartes précédentes et possède suffisamment de personnalité et de voies possibles pour mériter sa place dans ce nouvel opus. Quant au mode Ghost, ce dernier semble encore trop juvénile pour avoir un avis définitif, mais vu que cela n’a pas l’air d’influencer le développement du jeu principal avec un concept de base sympathique, on se dit : “pourquoi pas”. Maintenant, on espère que la qualité des prochaines missions et les futures situations proposées par Hitman 2 permettront à l’agent 47 de mériter sa place dans le line-up décidément bien chargé de cette fin d’année.
Bilan : Bon
Hitman 2 sera disponible le 9 novembre sur PC, Xbox One et PS4.