Attendu de pied ferme par les amateurs de 4X après qu’Amplitude ait marqué le genre avec l’univers Endless, le studio parisien va directement à la confrontation avec un titre qui rappelle furieusement Civilization. Plus qu’une synthèse des expériences passées du studio, Humankind est une volonté de vouloir faire évoluer le genre.
Ça laisse des traces
Quand Amplitude Studios a annoncé Humankind à la Gamescom 2019, la réaction naturelle à avoir était : “ah oui, les challengers sont partis péter la gueule au maître”. Le studio parisien est connu pour ses 4X inspirés de la franchise de Sid Meier, mais en restant dans un contexte Space Opera ou Heroic Fantasy, la comparaison coupait court. Humankind, c’est un peu réécrire l’histoire de la réécriture de l’Histoire (j’espère que vous suivez).
Si l’Histoire est écrite par les vainqueurs, on a trop tendance à oublier les autres civilisations qui ont tout de même laissé des traces et légué un héritage à l’humanité toute entière. Les Égyptiens ont disparu, mais leur culture et leurs prouesses nous inspirent encore aujourd’hui (pour faire des films avec Brendan Fraser, c’est vrai, mais vous voyez l’idée). Humankind n’est pas une course entre civilisations pour savoir laquelle atteindra un but abstrait mais commun (conquête spatiale, domination militaire ou culturelle, etc.) en première, mais une compétition pour savoir qui laissera la plus grosse marque.
Quand Amplitude Studios a annoncé Humankind à la Gamescom 2019, la réaction naturelle à avoir était : “ah oui, les challengers sont partis péter la gueule au maître”.
J’ai eu la possibilité de jouer librement pendant 2 heures sur une carte préconçue, rejouable à l’envi pour discerner les différentes stratégies que l’on peut adopter en début de partie. Le titre est encore en plein développement et seul le premier âge était disponible, la partie se terminant en progressant vers l’âge Classique (l’antiquité).
Il y a encore plein de soucis d’équilibrages et d’interface pourtant déjà digne de la réputation du studio, mais ce n’est pas grave. Le but était de comprendre où Amplitude voulait nous emmener avec son Civilization-like (le buzzword est lâché).
Say no more, Fame
Une fois sa première partie de Humankind lancée, on pourrait confondre avec Civilization 6, c’est vrai. La carte procédurale est découpée en hexagones, les villes produisent des bâtiments, des unités, se spécialisent avec des quartiers, l’arbre de recherche… et plein d’autres mécaniques sont très similaires. On retrouve également le principe des quatre facteurs de productivités de votre civilisation : argent, production, nourriture, science, mais avec un petit nouveau : la stabilité.
Une fois sa première partie de Humankind lancée, on pourrait confondre avec Civilization 6, c’est vrai.
À chaque fois que vous accomplissez divers défis ou êtes le premier à accomplir certains exploits (découvrir des merveilles naturelles, découvrir en premier des technologies clés, par exemple), vous gagnez des points de renommée : la Fame. La Fame, c’est tout ce qui compte dans Humankind. Le but d’une partie est d’être le joueur qui en a accumulé le plus à la fin, et tous les moyens sont bons pour y arriver.
Accumuler de la Fame est un travail d’équilibriste de tous les instants. Être balèze en science, c’est cool, mais l’expansion ou la croissance de votre population sont également des facteurs importants pour obtenir de la Fame bonus. Après avoir accompli un certain nombre de défis, vous aurez la possibilité de passer à l’âge suivant, mais vous perdrez les possibilités d’accomplir les défis de l’âge actuelle… et la Fame qu’ils offrent.
La Fame, c’est tout ce qui compte dans Humankind. Le but d’une partie est d’être le joueur qui en a accumulé le plus à la fin, et tous les moyens sont bons pour y arriver.
Humankind vous juge sur votre capacité de réaliser des choses en fonction de votre niveau d’avancement et sur votre performance globale, pas simplement votre capacité à rouler sur l’adversaire ou rusher les bonus de science. De l’aveu d’Amplitude : un joueur même éliminé peut très bien gagner une partie.
On serait tenté de retarder le passage à l’âge suivant le plus possible, mais c’est alors prendre du retard sur l’adversaire qui profitera de ses nouveaux avantages pendant que vous faites encore joujou avec vos cailloux dans le purin tel l’arriéré que vous êtes. Cet aspect du jeu vous accompagnera pendant toute la partie durant 6 ères jusqu’à l’époque contemporaine (pas de turfu, donc).
Humankind vous juge sur votre capacité de réaliser des choses en fonction de votre niveau d’avancement et sur votre performance globale.
Le choix d’une civilisation est cruciale pour votre développement, puisque chacune possède des unités uniques, des bonus passifs et un pouvoir actif très puissant. Ou plutôt, devrais-je LES civilisations. Surprenant, chaque changement d’âge permet de choisir une culture qui n’a absolument rien à voir avec la précédente : les Égyptiens peuvent devenir des Vikings, ou les Harapans peuvent devenir des Romains, etc. Le choix est totalement libre.
La nouvelle culture choisie orientera votre jeu pour l’âge à venir, chacune ayant un point fort bien particulier. Cependant, vous remplacerez votre pouvoir actif par un nouveau, mais conserverez les autres bonus jusqu’à la fin. Cela permet de créer des combinaisons intéressantes tout le long de la partie, mais également de s’adapter selon le contexte. Bien sûr, les défis les plus importants à réaliser dépendront de la nouvelle culture choisie.
Harappan Lives Matter
Avec ce système de Fame, je comprends où Amplitude veut en venir, et associé avec d’autres mécaniques de jeu, l’évolution du joueur a un côté bien plus organique que Civilization manque parfois.
L’évolution du joueur a un côté bien plus organique que Civilization manque parfois.
Au fur et à mesure que vous jouez et accomplissez certaines tâches (cachées), le jeu vous proposera d’adopter des doctrines (Civics) qui devraient booster votre façon actuelle de jouer au-delà de l’accumulation de vos cultures. Mais pour que votre civilisation se créer une personnalité, il faut qu’elle soit suffisamment stable, là où intervient la stabilité. Vous pouvez vous étendre très vite dans Humankind, mais comme l’empire d’Alexandre le Grand, grandissez trop vite et vous vous effondrerez d’un coup. Mais comme le jeu vous invite à vous étendre le plus rapidement possible… vous voyez l’idée.
Au fil de la partie, votre civilisation prend de l’âge, et ça se voit. Vos nouveaux quartiers se différencient des anciens, à la manière du centre-ville de Rome. De ce fait, Humankind est sacrément beau avec une génération du terrain très naturelle. Beaucoup se plaignent de l’aspect cartoon de Civilization 6, mais Humankind a un aspect beaucoup plus nuancé. Cela pourrait donc plaire à ces râleurs derniers.
Surprenant, chaque changement d’âge permet de choisir une culture qui n’a absolument rien à voir avec la précédente.
L’aspect narration n’est pas aussi poussé qu’un Endless Legends ou Endless Space 2 qui permettent d’accomplir des quêtes et de suivre des histoires associées (en dehors de quelques événements aux effets variés), mais on peut retracer l’évolution d’une civilisation d’un simple coup d’œil. La moindre mécanique de jeu qui peut sembler abstrait au premier abord s’ajoute à un tout qui fait qu’on se sent impliqué, et c’est le principal.
L’exemple que je préfère pour symboliser ça, c’est qu’il est tout à fait possible de garder la même culture en passant d’un âge à un autre, mais vous n’aurez alors aucun nouvel avantage. En contrepartie, vous obtiendrez un important bonus de Fame. Un risque à considérer si votre avance sur les autres joueurs est confortable, mais attention aux revers fâcheux sur le moyen terme.
Surprenant, chaque changement d’âge permet de choisir une culture qui n’a absolument rien à voir avec la précédente.
Bon, il subsiste des choix curieux, comme la volonté de réduire le nombre de villes au minimum et il n’est pas encore clair si la Fame servira à autre chose qu’être un score pour la fin de partie, mais la promesse de pouvoir laisser sa marque dans l’Histoire de façon organique avec des actes est tangible. Même s’il reste encore pas mal de mécaniques à implémenter ou à étoffer comme la diplomatie ou les combats (très similaires à Endless Legends), me voilà très curieux de découvrir la suite.
Mention spéciale à la bande-son à nouveau signée par Arnaud “FlyByNo” Roy, déjà compositeur attitré d’Amplitude. On reconnaît son style désormais porté vers la World Music où chaque culture aura sa propre sonorité. Ce que j’ai entendu est déjà très engageant et le studio promet un accompagnement musical qui évolue au fil de la partie, avec un des rappels des racines de votre civilisation désormais avancée. Si je peux devenir nostalgique d’un début de partie alors que je suis sur le point de découvrir l’arme atomique, je dis oui.
Conquer me, i’m famous
Humankind a encore beaucoup à prouver pour se démarquer de la concurrence, mais les bases sont là et elles sont solides comme les pyramides de Gizeh. Sa façon s’aborder l’évolution de la partie est intelligente tout en apportant un côté organique à sa civilisation, mais c’est surtout le système de renommée qui risque de faire toute la différence. Ce changement de condition de victoire oblige le joueur à orienter son jeu selon les moments opportuns, et non se focaliser sur un seul aspect du gameplay. Faites qu’on se souvienne de vous.
Avant de partir, n’hésitez pas à lire notre entrevue avec Romain de Waubert (PDG et cofondateur d’Amplitude) et Jean-Maxime Moris (producteur exécutif de Humankind).
Humankind sera disponible sur PC courant 2021.