Attendu comme le messie par les joueurs qui aiment se faire mal, Sekiro : Shadows Die Twice est le nouveau jeu de FromSoftware, les gens qui vous ont fait faire des roulades et serrer les fesses plus de fois que n’importe quel prof d’acrogym.
Sékiro : Sékiça ?
Sekiro : Shadows Die Twice est un peu la nouvelle créature de Frankenstein d’Hidetaka Miyazaki. Les viscères sanguinolents de Tenchu incorporés à grands coups de poing dans la chair d’un « Souls » ou d’un Bloodborne. On l’avait timidement aperçu lors d’un fugace trailer diffusé pendant les Game Awards 2017, avant qu’il soit officiellement présenté lors du dernier E3. Édité par Activision, l’autre surprise, le titre s’est laissé approcher lors d’une session de jeu pendant la gamescom.
La démo s’ouvre sur le prince Shinobi, protecteur d’un jeu seigneur, toisant de haut le camp d’entraînement du château d’Ashina qu’il s’apprête à attaquer. Le héros, créé de toute pièce par l’équipe de FromSoftware, est le premier signe de la volonté de changement de la part des développeurs. Exit le module de création d’un personnage lambda puisque le protagoniste principal sera au centre d’une histoire qui évolue au fur et à mesure de votre progression.
D’ailleurs, on apprend que le bougre a tenté un combat au sabre contre « The Commander », un bretteur plutôt chaud, qui a coupé court aux discussions en tranchant sec et net le bras de notre ami. C’était une super occasion d’implémenter une nouvelle mécanique de jeu, celle d’un bras, non pas mécanique, mais plutôt prothétique, qu’on appelle un Ningishu. Au bout de ce dernier, un grappin.
Un jeu aérien et flexible
Ni une, ni deux, le premier contact avec la démo de Sekiro se fait en utilisant ce Ningishu flambant neuf. Le temps de prendre en main le personnage, une première accroche apparait sur le bout d’un toit à proximité, la touche appuyée et le fameux grappin s’étire et nous ramène rapidement sur le haut de la bâtisse. Pour les habitués de la rigidité à la Soulsborne (contraction des jeux “Bloodborne” et “Demon Souls”/”Dark Souls”), l’excitation grimpe et les possibilités se décuplent. En plus de pouvoir vous balancer entre des espaces beaucoup plus ouverts et verticaux, vous pourrez désormais sauter et même réaliser des mouvements « mid-air », à savoir, mettre des coups pendant une cabriole. C’est un évènement en soi dans l’univers des jeux signés Miyazaki, qui avait l’habitude de nous balader de manière assez rigide dans des environnements étroits et étouffants.
L’histoire prend place dans un Japon féodal pendant l’ère du Sengoku. Rien avoir avec Dragon Ball : cela renvoie à une époque où le Japon débordait de remous sociaux et de guerres, le tout dans une politique plus que douteuse. Même si certaines références historiques seront distillées ici et là, les producteurs du jeu ont confirmé que cela n’irait pas plus loin que ça.
Bref, arrivé sur mon premier toit comme un vrai ninja, je fais un tour d’horizon du personnel qui m’attend de pied ferme : des soldats au sabre, à l’arquebuse, d’autres avec des armures lourdes, de quoi me faire un petit bouillon de « You are dead » aussi souvent que possible. J’en salive déjà d’avance. N’étant pas un vrai habitué des jeux de Miyazaki, la correctionnelle allait arriver pour moi aussi vite que pour Booba et Kaaris. Je m’élance, je marche d’un pas feutré et constate avec plaisir que, comme tout bons Soulsborne, la mécanique d’assassinat silencieux est possible. Pour cela, on s’approche doucement dans le dos de l’ennemi, une marque rouge s’active et PAF, on tue.
Un peu plus loin, un rebord duquel j’aperçois un soldat en contrebas : je saute et pendant ma chute, j’attends que la marque rouge apparaisse sur mon ennemi avant de lui planter ma lame dans le haut du crâne. En deux minutes de jeu, on a compris et on confirme: Sekiro sera un jeu beaucoup plus aérien et gracieux que les anciens jeux de Miyazaki.
Plus punitif qu’à la fistinière
Évidemment, de haut, je faisais un peu le malin. Au sol, c’est une autre histoire. Je fais trop de bruit, je cours dans tous les sens, j’essaye de grimper un peu partout. Manque de pot, pas de tapis de fleurs à proximité pour me cacher, il faut que je me batte à la vue de tous. Forcément, un ennemi en possession d’une cloche d’alarme fait résonner ce tocsin du cauchemar et me voilà entouré de deux sentinelles et d’un ogre dont les mains et la tête sont encore aux fers.
Attaqué de toute part, je riposte et découvre l’éventail fourni de mouvements qu’il m’est possible de faire. Il est, bien entendu, possible d’accélérer sur les côtés pour mettre en place la technique ancestrale du « tourné-boulé » et faire de la roulade autour de vos adversaires. En sus, on pourra aussi parer, contrer, glisser au sol et même utiliser le grappin pour attraper l’ennemi et l’attaquer d’en haut. Attends, je peux même imprégner mon épée de flammes pour « lui cramer sa barbe à l’autre ogre là » (oui, j’ai dit ça à haute voix pendant la session) ou encore utiliser des breloques offensives, comme des shurikens, qu’il est possible de jeter sur les couards restés sur les côtés de l’arène.
Taillé pour vous faire briller
La gestion de l’endurance est également au centre des combats tout comme le « Clash of Swords ». Cette mécanique se base sur la posture du joueur et de son ennemi : un blocage dans le bon timing vous épargne des dégâts et vous donne l’avantage pour faire une contre-attaque. Un blocage trop rapide vous évitera aussi de perdre de la vie, mais vous rend vulnérable à une riposte ennemie.
Enfin, pour les rageux du fond de la salle, Miyazaki en a, semble-t-il, eu assez de vos plaintes de petits bébés pleurnicheurs. En effet, après votre première mort, si vous avez neutralisé assez d’ennemis, vous aurez la possibilité de vous remettre debout avec la moitié de votre vie. Par contre, si vous mourez une deuxième fois de suite, c’est retour à la case départ. Une mécanique clémente, mais pas tant que ça, surtout quand je vois les dérouillées que j’ai successivement prises pendant vingt minutes de démo.
Cette dernière s’est d’ailleurs terminée sur un souvenir flou pour moi : un gros serpent et un boss qui me retournent plutôt salement. Je crois même l’avoir vu sortir de l’écran pour me conseiller de reprendre mon sac et quitter Cologne très vite.
Cuir, moustache & sabre
Si la personnalisation du personnage n’existe pas dans Sekiro (pas de classe, pas de modifications de pièces d’armures), c’est pour se concentrer sur la forme brute du combat. La multitude de coups possibles combinés aux quelques armes que vous pourrez utiliser fait tout le sel du jeu. En ajoutant une verticalité au level design et une certaine flexibilité dans les mouvements, nul doute que la nouvelle formule Miyazaki saura plaire aux plus ardents aficionados des Soulsborne. À la lumière de ces éléments, Sekiro : Shadows Die Twice s’annonce comme le digne représentant du hardcore gaming de 2019. Disponible en mars prochain, je n’ai qu’une hâte : pouvoir laisser les autres y jouer et me dire si c’est bien, parce que moi, même si ça a l’air incroyable, je ne toucherai pas à ce truc de sadomaso.
Bilan : Très bon
Sekiro : Shadows Die Twice sera disponible le 22 mars 2019 sur PC, Xbox One/X et PS4/Pro.