L’avenir des consoles : changement de paradigme
Cela fait quelques temps maintenant qu’on sent bien que le vent tourne du côté des consoles de jeux vidéo : nouveau rythme de production et de sortie, nouvelles prétentions… Quel sera le paysage de demain sur le marché des consoles ? Et le consommateur dans tout ça ?
Un nouvel horizon
Il y a maintenant plus d’un an, Sony et Microsoft ont annoncé vouloir s’installer sur le marché de la 4K en hurlant à qui voulait bien l’entendre que de nouvelles consoles Xbox et PlayStation seraient bientôt de sortie. Quoi, déjà ? Oui, déjà. Au moment de cette annonce, cela fait un peu plus de deux ans que la Xbox One et la PS4 ont atterri sur les étals. Trois ans après cette “nouvelle génération” arrivent donc la Xbox One S et la PS4 Pro pour lui faire face. Rappelons que la durée de vie moyenne d’une console jusqu’ici se situait entre neuf et dix ans. Nous assistons donc à quelque chose d’inédit. Manque d’anticipation de la part de Sony et Microsoft ? Les premières consoles nouvelle génération seraient donc des brouillons ? La 4K a commencé à faire parler d’elle auprès du grand public en 2010, et tout comme le 1080p, il était garanti que la tendance serait à la démocratisation. Des entreprises telles que celles sus-nommées ne peuvent arguer méconnaître ce genre de “détail”.
En 2013, la PS3 et la Xbox 360 étant dans leur septième année d’existence et la technologie, ayant fait un bond saisissant et permettant des performances très poussées sur les jeux, les deux firmes ne pouvaient pas être en reste face à un PC regagnant le cœur des joueurs après des années à avoir été boudé par les éditeurs. Tant pis pour la 4K, on partira sur des cycles courts. Car il faut bien comprendre qu’à l’échelle d’une multinationale, ce genre de décision ne se prend pas du jour au lendemain. Dans tous les cas, une chose est sûre : le rythme des sorties de console a radicalement changé, divisé par plus de deux. Les prix, quant à eux, n’ont pas subi la même opération. De ce côté, nous allons donc vers une nouvelle console tous les trois à quatre ans.
La console, ce PC
Force est de constater qu’il n’y a pas que du côté du rythme des sorties que le marché des consoles a changé. Pensées comme des hubs multimédia, ces machines ont quelque peu changé leur fusil d’épaule en tentant par certains aspects de concurrencer le PC. Xbox avait fait couler beaucoup d’encre à la sortie de la One car Microsoft s’obstinait à mettre en avant cet aspect particulier de sa machine. L’encre a également beaucoup coulé au sujet d’un certain nombre de décisions pour la console venue de Redmond, mais il ne faut pas se leurrer : Sony avait prévu exactement la même chose mais a changé ses plans en voyant la volée de bois vert qu’a dû affronter l’entreprise créée par Bill Gates.
Aujourd’hui, en ajoutant quelques attributs à une PlayStation ou à une Xbox One, à commencer par un clavier et une souris, on se retrouve avec des fonctions similaires à un PC, ce qui force encore la comparaison entre les supports. À l’heure actuelle, les consoles sont un peu les versions “accessibles” des PC car moins chères, ergonomiques et occupant une place de choix dans le salon des ménages. Et cette tendance est largement observable justement dans le rythme des sorties : on reproche sans cesse aux consoles de faire traîner la patte aux progrès du jeu vidéo, qu’à cela ne tienne, des nouvelles machines sortiront plus régulièrement pour offrir toujours plus de performances — on l’a vu avec la Xbox One X lors de l’E3 2017.
Des jeux toujours compatibles ?
La question qui découle de cela, bien évidemment, est de savoir si les jeux seront toujours compatibles entre les différentes versions des consoles. Cela est loin d’aller de soi, car dans la course à toujours plus de puissance, de plus en plus régulièrement, il faut bien comprendre une chose et cela s’est vu lors de la conférence Microsoft à l’E3 : le bond est loin d’être saisissant quand le jeu n’a pas été développé spécifiquement pour le nouveau support. Ainsi, si Forza Motorsport 7 était indubitablement à tomber par terre (quoi qu’affligé de ralentissements de framerate, contrairement aux 60 FPS constants promis), tous les autres jeux présentés tourneront bel et bien sur Xbox One X mais n’offrent pas la transcendance que le hardware de la console laisse supposer. La raison est simple : Forza dispose d’un pack d’assets spécifiquement étudié pour la X. Mais cela représente bien entendu un temps de développement supplémentaire et des fonds en rab non négligeables. Va-t-on vers un avenir où il faudra racheter une console et ses jeux tous les 4 ans ? Il y a tout de même de quoi douter.
Il s’agit probablement de la raison pour laquelle les diverses versions Xbox One et PS4 restent estampillées… Xbox One et PS4. Mêmes architectures, potentiels différents. Ainsi, le résultat sera probablement à rapprocher une fois encore au PC puisque les jeux disposeront alors d’options graphiques étendues qui seront simplement sélectionnées par les développeurs à l’avance en fonction de la console que vous posséderez. Prenons un exemple bête et méchant : vous jouerez en preset normal sur Xbox One, élevé sur Xbox One S et ultra-maxi-best-of-plus sur Xbox One X.
Un marché appelé à rester homogène… dans une certaine mesure
Xbox One, PS4, même combat ou presque. Microsoft a fait le choix du Xbox Play Anywhere et tout jeu sortant sur Xbox One est désormais jouable sur un système Windows 10 (tiens donc, le rapprochement PC à nouveau… rien n’est dû au hasard). Si la firme de Redmond a indubitablement fait un pas important pour le monde du jeu vidéo avec ce programme, il n’en reste pas moins qu’elle a perdu un argument de taille pour l’achat de sa console — ce qu’elle souhaite compenser avec la Xbox One X. Les analystes de DFC Intelligence, comme le rapporte GamesIndustry, sont néanmoins très peu confiants, estimant que le prix de 49 9€ rendra la vente difficile et que Microsoft peut s’attendre à vendre 17 millions d’unités d’ici 2021, portant à 63 millions le nombre de Xbox One présentes dans le monde. Effectivement, on s’adresse ici à une niche de joueurs, car même si le marché des TV 4K progresse, on s’attend à une progression bien plus lente des ventes de consoles pour ces écrans, en partie pour les raisons avancées au-dessus. Toujours selon DFC Intelligence, le problème des exclusivités se pose puisque les potentiels déluges graphiques de la Xbox One X seront aussi disponibles sur PC.
De son côté, Sony désamorce la possibilité d’une nouvelle version de la PS4… mais timidement. La firme nippone avait bien déclaré que la PS4 Pro n’était qu’une première mouture d’une version plus puissante de la PlayStation quatrième du nom (Xbox One S et Xbox One X bonjour). Rien qu’avec la PS4 et la Pro, Sony a à l’heure actuelle écoulé plus de 60 millions de systèmes à travers la planète et la concurrence étant ce qu’elle est, il serait assez étonnant que l’entreprise reste sans réagir face à Xbox. Une annonce hardware est possible à la Gamescom. Sony aura voulu éviter l’E3, sachant d’avance que l’événement serait accaparé par la Xbox One X. Et comme d’habitude, la firme aura voulu revoir sa copie en fonction des annonces de son concurrent principal, et cela prend du temps à l’échelle du hardware d’une console. On sait déjà que Sony a gardé un paquet de jeux sous le coude, cela coïnciderait avec une annonce à la Gamescom, un événement qu’elle pourrait s’approprier sachant le terrain dégagé, comme ce qu’à fait Xbox avec l’E3. Et là où Sony risque bien de faire la différence, en plus de damer le pion à Microsoft sur “la console la plus puissante du monde” (tout l’intérêt de voir la copie d’un concurrent pour réviser la sienne), c’est justement sur les fameuses exclusivités, qui restent entières.
Si ces deux acteurs sont très concentrés sur la 4K, il en est un qui récemment a manifesté son mépris pour cette technologie, et c’est Nintendo. Trop occupée à tenter de nous faire gober que 330 € constitue un prix décent pour son morceau de plastique n’affichant pas toujours 1080p sur une TV, la firme a mieux à faire que de s’occuper de la 4K. Plus sérieusement, la décision de Nintendo est parfaitement légitime en ce sens qu’elle n’a jamais aspiré à la course aux graphismes et au hardware dernière génération. La vraie force de Nintendo réside dans le jeu familial et ses licences phares. Jusqu’ici — en dehors de l’échec retentissant de la Wii U — l’entreprise a eu raison de s’axer là-dessus et il s’agit véritablement du seul acteur du marché à se concentrer sur ces éléments, la stratégie est donc parfaitement sensée, d’autant que Nintendo réussit toujours aussi bien à produire de bons jeux avec ses propriétés intellectuelles. Sa place lui est donc pour l’heure réservée et les choses ne risquent pas de changer, ses deux principaux concurrents se concentrant justement sur les performances mais aussi sur le jeu en ligne plutôt qu’en local.
Atari a au passage annoncé son grand retour sur le marché des consoles de salon mais nous n’en savons que très peu pour le moment. Chronique d’un échec annoncé pour beaucoup, l’entreprise aura en effet fort à faire pour s’imposer sur un marché limité et hautement concurrentiel.
La voie de sortie de la VR et du mobile
Le jeu mobile, décrié par une large majorité de la communauté vidéoludique, représente pourtant un bon gros paquet de revenus. Ce n’est pas pour rien qu’iOS 11 remanie l’App Store pour présenter un onglet dédié à la catégorie jeux sur l’écran d’accueil. Par ailleurs, si vous avez suivi la conférence d’annonce de l’iPhone 7 l’année dernière, vous aurez remarqué l’emphase qui a été faite sur la puissance du processeur et les performances graphiques des jeux sur le nouveau téléphone de la marque à la pomme. Le jeu mobile s’impose insidieusement et se développe de plus en plus. Il court d’ailleurs des rumeurs selon lesquelles Apple travaillerait sur son propre casque VR et qu’il serait annoncé avec le prochain iPhone. Cela n’aurait rien d’étonnant, Samsung ayant déjà franchi le pas avant son concurrent. Ce n’est pas pour rien que le jeu vidéo est devenu le premier média culturel au monde.
Côté VR, justement, nous avons assisté à la sortie de la première génération de casques avec le HTC Vive, l’Oculus Rift et le PlayStation VR. Un rêve de science-fiction devenu réalité pour certains, il ne faut pour autant pas perdre de vue que les expériences VR, certes dépaysantes, demeurent largement limitées pour le moment — et aussi qu’avec un casque VR, on a quand même l’air royalement con. Beaucoup d'”expériences”, justement, plutôt que des vrais jeux à part entière. Cette nouveauté est appelée à se développer, comme la 4K (et la 8K après elle), c’est une certitude, mais comme toute première génération, celle-ci essuie les plâtres et il faudra attendre la seconde pour commencer à entrevoir les réelles possibilités que la VR implique. Mais une chose demeure certaine : l’avenir du jeu vidéo sera aussi composé de VR et les exclusivités à ce niveau-là pourraient bien changer la donne à l’heure où les consoles tendent à se rapprocher du PC. Et là, Microsoft a clairement quelque chose à jouer, car même si l’HoloLens est parti pour être le casque le plus cher, il est aussi destiné à être le meilleur sans comparaison possible (même s’il se destine davantage à la réalité augmentée que virtuelle)… dommage qu’il soit si peu axé sur les jeux, mais nul doute que la firme a plus d’un tour dans son sac.
Là tous les membres WL récoltent un bon fruit, bien mur, pas pourri, sucré et goutteux… Comme quoi c’est possible de provoquer de bons articles. ;-p
Bel état des lieux, ample juste ce qu’il faut, des suggestions et du parti pris sans démesure, merci Hexen.
(quand on aime faut le dire aussi hein ^^)
C’est vrai que Nintendo a sans doute bien raison de ne pas suivre l’esprit gros bill à grosses couilles de la 4K pour vaches à lait décérébrées.
Par contre pour ce qui est de tirer la créativité vers le bas et a entretenir un esprit gnan-gnan / infantile, il se pose là avec sa recup éternelle de titres japan-usés désormais.