Scourge Bringer est le dernier roguelite en pixel art à la mode qui déboule dont ne sait où et qui tranche dans le vif. Enfin, si : il paraît que ça vient de Metz. Je ne m’attendais à le recevoir ce weekend, en tout cas.
Cheveux cendrés au vent
On peut facilement penser que le marché des roguelites est saturé. Ils offrent souvent un gameplay engageant, mais ça repompe pas mal d’un titre à l’autre. Pas toujours facile de trouver la perle rare qui aurait la qualité de nous scotcher pendant des heures afin de compléter, après moult morts plus ou moins justes, la fameuse première run. Alors quand on me dit qu’un énième roguelite en pixel-art cherche à faire du gringue aux amateurs du genre, je me dis : « à quoi bon ? ».
J’avais posé les yeux vite fait sur ScourgeBringer lors son annonce en mars de l’année dernière, mais mon regard passif ne m’avait pas laissé d’impression particulière. Tout a changé jeudi dernier quand je suis tombé sur le trailer qui accompagnait le lancement de l’accès anticipé du jeu, et je me suis dit : « ouat ze… »
Et vous savez quoi ? Le vrai jeu est encore mieux de ce que vous voyez dans la vidéo. ScourgeBringer a l’audace de laisser les pleins pouvoirs au joueur, cependant, le véritable ennemi que j’ai rencontré dans le jeu n’est pas un monstre bon qu’à se faire trancher : c’est moi. Et j’ai passé une bonne partie de mon dernier weekend de vacances à me détester.
Au premier abord, on pourrait croire qu’il s’agit d’un énième jeu d’action en vue de côté comme il en existe plein, mais il oblige le joueur à désapprendre tout ce qu’il sait pour en offrir toutes ses subtilités. Il faut savoir une chose : le jeu va vite, très vite.
Alors, moi, les jeux qui vont vite, j’aime bien, mais il serait bien mal avisé de confondre vitesse et précipitation (vous savez, ce conseil de vie qui agace tout le monde). On est surpris au début, voire dubitatif : le dash n’a pas vraiment de cooldown, l’attaque au sabre peut être enchaînée à l’infini et on peut courir sur n’importe quelle surface sans souci. Ce manque de restriction dans le gameplay étonne et puis… c’est des mandales dans la gueule.
Toutes les facettes du gameplay qui paraissent assez classiques finissent par subir le petit twist qui change tout : attaquer un ennemi ne l’empêche pas d’agir, ce qui fait que le rouer comme un sourd n’est pas une technique viable. Le plus sournois, c’est sûrement ce dash qui ne permet pas de traverser les balles pour autant, qui a de surcroît un peu trop tendance à foncer sur les ennemis proches du curseur de la souris.
Ah, et c’est pas parce que vous venez de prendre un gnon qui le jeu va vous laisser respirer, oh non. Les points de vie sont rares et la frame d’invincibilité après coup est de l’ordre de la seconde, max. Avant d’entreprendre la rondellisation des ennemis dans la pièce, il faut être certain que vous avez le champ libre. Difficile d’avoir l’œil au début, mais si vous mourrez, vous ne pouvez que vous en prendre à vous-même, et vous savez pourquoi.
Garder les pieds sur terre, c’est surfait
Il y a énormément d’influences qui se mélangent dans ScourgeBringer. Beaucoup le comparent déjà comme la rencontre d’un plateformer pointu comme Celeste et la science du combat de Dead Cells… et ce n’est pas entièrement faux. Il y a clairement une science du flow à l’œuvre avec une animation des plus soignée, mais après les premières déconfitures, on commence par s’étonner nous-mêmes. C’est clairement le genre de titre qui vous fait plonger dans la Zone, où instinct et réflexions rapides s’entremêlent pour une effervescence des sens.
J’ai l’air d’en faire des caisses, mais il y a que dans un fast FPS que je ressens ce genre de truc. Oserais-je dire qu’il y a une influence DOOMesque ? Quel jeu d’action un brin huilé n’en a pas, après tout, mais je reconnais un Cacodémon quand j’en vois un. Au fur et à mesure des runs, on visualise immédiatement les différents types d’ennemis, et dans quel ordre il faut les terrasser pour s’en sortir sans trop de bobos.
On zoome à travers les décors pour bloquer les lignes de vue et surprendre les adversaires les plus dangereux, et tout ça à la vitesse de l’éclair. Si vous aimez mettre la pression plutôt que de fuir entre deux attaques, un smash bien placé peut annuler les attaques les plus dangereuses ou renvoyer des boulettes mortelles qui foncent droit sur vous. Seulement, elle vous rend rapidement vulnérable et il est donc bon de ne pas en abuser.
J’ai beau avoir compris tout ça, j’ai l’impression d’être encore beaucoup trop bourrin. C’est surtout handicapant sur les combats de boss qui se transforment rapidement en Bullet Hell où il est possible de perdre trois points de vie en un clin d’œil. En forçant, ça peut passer, mais ce n’est pas recommandé si on compte aller loin.
C’est pour ça que les armes à feu tirées depuis un drone qui colle l’héroïne permettent de faire du dégât dans les cas où il est impossible de s’approcher. Est-ce que ScourgeBringer serait un twin stick shooter ? C’est bien possible.
On est vraiment face à un gameplay épuré qui fait des merveilles avec un bon sens de l’observation. On fait rapidement des erreurs si on relâche l’attention, mais tout se fait d’un tel naturel qu’on reste rapidement scotché… et pendant longtemps. Quand on a envie de relancer une run juste après une défaite cuisante, c’est bon signe.
Avec la tronche qu’il a, ScourgeBringer avait tout pour avoir droit à une bande-son signée The Toxic Avenger ou Perturbator (la DA me fait un peu penser à Furi), mais c’est vers Joonas Turner (Nuclear Throne, Tormentor X Punisher) que Flying Oak Games s’est tourné pour avoir un truc qui tabasse et qui rythme bien les combats. Je veux plus de gros riffs dans mes jeux en pixel-art.
Paradoxalement, ScourgeBringer semble avoir un peu de mal avec son aspect roguelite. Les templates des salles sont rapidement mémorisés, la navigation dans les étages est simpliste, les objets et les bonus passifs ne permettent pas vraiment de s’orienter vers tel ou tel build, l’économie est anecdotique et la plupart des capacités qui encadrent le gameplay sont bloquées derrière un arbre de talent assez curieux dans son contenu.
Je soutiens la bonne idée d’éviter tout superflu avec un système de progression simple, mais ça manque clairement de profondeur pour l’instant. De ce fait, pas de quoi en écrire un Early Test encore, mais heureusement que l’apprentissage du joueur offre une jolie courbe de progression.
Après, n’oublions pas qu’on est à peine dans la première semaine d’accès anticipé et vu son plébiscite de la part du public, Flying Oak Games devrait être à l’écoute des joueurs sur la marche à suivre. Franchement, c’est vraiment pas cher pour un bon produit du terroir de la Moselle (également disponible dans le Xbox Game Pass) . Avec le contenu supplémentaire à venir et un peaufinage de sa meta, ScourgeBringer pourrait rapidement devenir un incontournable.

En revanche, je déplore une aversion malsaine pour les concombres. Mauvais point. C’est très bon le Tzatzíki.