Diverses rédactions françaises spécialisées et d’anciens employés pointent Quantic Dream (Detroit, Heavy Rain, Beyond: Two Souls…) et son fondateur David Cage du doigt. Ces derniers entretienderaient un environnement de travail plus que toxique.
Cage dorée
C’est le drama de ce weekend, et David Cage n’a pas dû passer un bon dimanche.
Divers confrères chez CanardPC, Médiapart et Le Monde travaillent depuis un moment sur la question des conditions de travail dans le monde du jeu vidéo, connu pour être un environnement de travail très compliqué, voire toxique, pour des raisons variées et diverses, surtout dans les gros studios. Pendant leurs différentes investigations, un élève “modèle” se serait élevé au-dessus du lot, devenant alors un parfait exemple de ce qui voulait être dénoncé, et qui est de surcroît un studio français : Quantic Dream.
Dans les diverses accusations, on retrouve le fait que l’ambiance de travail du studio soit particulièrement toxique, entre un crunch permanent (plus de 70h de travail hebdomadaire pour boucler Detroit) et des collaborateurs bien situés dans la boîte qui abusent de leur influence pour faire subir à leurs collègues des blagues sexistes et homophobes de mauvais goût, voire insultant, avec un dossier hébergé sur l’intranet de la boîte avec plus de 600 photomontages qui utilisent comme ressources le trombinoscope des employés, on est en droit de se dire qu’il y a effectivement un souci chez Quantic Dream. Le turnover est plus que conséquent et ces accusations sont amplifiées à l’unisson par d’anciens employés. D’autres estimes que c’est justement l’ambiance bon enfant qui règne globalement dans le studio qui est la seule chose qui fait tenir le tout, l’atmosphère étant en permanence en équilibre sur une échasse.
D’autres accusations viennent aussi de diverses libertés salariales prises par la direction. En effet, des magouilles liées aux contrats de travail auraient été rapportées, comme des renouvellements contournés de CDD qui ne donnent pas de situations stables pour des employés qui sont payés à peine plus que le smic (rattrapés par des heures supplémentaires juteuses, choppez la logique du truc). Il en va de même pour certains employés en CDI, où des mises en scènes de litiges ont été montées afin que le salarié puisse partir sans que QD paye de charges supplémentaires. Le fait le plus probant vient sûrement de Guillaume de Fondaumière, cofondateur et ami de David Cage, qui aurait été viré pour “comportement très personnel, mauvaise exécution des tâches et refus de suivre les directives” en 2016, touchant alors plus de 100 000€ d’indemnités via la procédure expliquée plus tôt. Le souci, c’est qu’il a réintégré officiellement la boîte immédiatement après, ayant alors touché directement de l’argent de la société sans rien avoir fait de plus… et son salaire a augmenté de 2000€.
Quant à David Cage, ce dernier est régulièrement traité de “tyran” par les anciens employés, qui considéreraient ses collaborateurs comme des outils pour arriver à la finalité de son projet. Si un certain respect du monsieur est quand même affiché par d’anciens et actuels collègues, dû à sa capacité à être sur tous les fronts dans les projets, il ne supporterait pas qu’on le contredise et les autres personnalités fortes, comme la fois où des vétérans de l’industrie ont été recrutés pour débuter les travaux sur Detroit. Des divergences artistiques se sont vite révélées et la collaboration s’est arrêtée là. On est face à un personnage haut en couleur très nuancé, mais qui ne fait pas l’unanimité.
Il est là du matin au soir, il connaît toutes les scènes par cœur, il fait la musique, il écrit, il est à fond dans le projet. C’est une mentalité de marche ou crève. Mais comme patron, je préfère l’avoir lui qu’un gestionnaire. Il préfère perdre de l’argent, mais passer plus de temps pour que le jeu soit vraiment fini.
Bien évidemment, David Cage et la direction du studio rejettent catégoriquement ces accusations. C’est sur Twitter qu’on peut retrouver un communiqué officiel.
— Guillaume#becomehuman (@GdeFondaumiere) January 14, 2018
Sur le plan personnel, David Cage se défend de l’ambiance potache qui règne à Quantic Dream du fait qu’il ne peut pas être homophobe, puisqu’il a travaillé de près avec des militants qui défendent ce sur quoi l’ambiance de la boîte est accusée (il a sûrement un pote noir, aussi).
Vous voulez parler d’homophobie ? Je travaille avec Ellen Page [sur Beyond: Two Souls], qui se bat pour les droits LGBT. Vous voulez parler de racisme ? Je travaille avec Jesse Williams [sur Detroit], qui se bat pour les droits civiques aux États-Unis… Jugez-moi pour mon travail.
En revanche, il n’y a pas eu de réponse catégorique par rapport aux accusations de licenciements douteux. La seule rhétorique qu’il y a eu à sur ce point est que “c’est parfaitement légal et que cela ne regarde personne“. Comme quoi, il y a forcément un fond de vérité qui dérange.
Comme le précise CanardPC, “souvent présenté comme un modèle de l’industrie française, on pourrait s’attendre à ce que Quantic Dream se montre exemplaire“. On aimerait le croire et être sûr que tout va bien, surtout pour un studio aussi important et aussi visible que Quantic Dream à l’international, mais on est forcé de constater que tout le mystère et les aprioris qui planent autour des conditions de travail du jeu vidéo s’avèrent fondés pour certains. CanardPC et Médiapart continueront sûrement leur investigation sur divers gros studios afin de mieux lever le voile sur cette omerta, pourtant connue, qui mérite d’être levée et de remettre en perspective des habitudes de l’industrie qui sont loin d’être saines.
Les hyennes partent en chasse dans les poubelles. Ca sent deja le canard mouillé.
C’est cheum mais standard dans le secteur.
C’est un peu comme ça dans l’it et c’est pour ça qu’on aime.
On est des techs, on aime le troll, on aime se remettre en question, on dit ce qu’il y a sans passer par quatre chemin et on avance. This is tech industry.
L’erreur est de recruter des moldus et de s’etonner qu’ils trouvent ça complétement toxic.
Je trouve bien plus toxic les gens qui font 35H à la minute prêt et qui sont dans un mindset industriel plus qu’innovant.