11 développeurs et ex-développeurs de Blizzard révèlent aujourd’hui les secrets derrière le développement compliqué de Diablo IV.
Une seconde extension fauchée avant la naissance
Tout a commencé “fin 2013 ou peut-être début 2014”, comme le rapporte Jason Schreier de Kotaku – journaliste à qui l’on doit de nombreuses révélations. À cette époque, la sortie de Reaper of Souls est proche. C’est alors que le management de Blizzard annonce avec fracas que la 2e extension de Diablo III ne verra finalement pas le jour. La nouvelle est très mal accueillie et signe le début d’une nouvelle ère pour Diablo et la Team 3 – l’équipe de développement en charge de la licence.
Ils ont dit à l’équipe : “Vous avez fini Reaper of Souls, c’est une très bonne extension. Malgré tout nous pensons que la meilleure chose à faire pour la licence est d’aller vers Diablo IV, peu importe la forme qu’il prendra.”
Il s’agit des propos de l’un des 11 développeurs et ex-développeurs de Blizzard que Jason Schreier à interrogés. Tous ont gardé l’anonymat en raison de l’interdiction qui leur a été donnée de parler avec la presse.
Reaper of Souls n’étant même pas encore sorti au moment de cette annonce, elle fait l’effet d’un coup de massue pour l’équipe qui prend cette décision comme un véritable manque de confiance, comme si le travail réalisé sur la première extension et les avancées qu’elle représentait par rapport aux critiques faites à Diablo III (et elles étaient nombreuses, les critiques comme les avancées) n’avaient aucune importance. “Ils pensaient que Diablo III était une immense foirade.”
La perception globale était que le management pensait : “cette équipe s’est franchement plantée.”
Rappelons que le titre a effectivement connu des moments très difficiles avant de se présenter sous un jour plus satisfaisant : le lancement a été un échec cuisant (ah, la fameuse erreur 37, les heures d’attente…), une expérience très mal équilibrée, un hôtel des ventes faussant purement et simplement le principe même du jeu, les aspects cartoonesques largement décriés par la communauté…
La Team 3 a bossé dur pour remettre le navire à flot et y est finalement parvenu – les 30 millions d’exemplaires vendus (chiffre de juin 2015) sont là pour en témoigner. Reaper of Souls constituait l’aboutissement du lent processus de transformation vers un Diablo 3 qui ressemble à un Diablo.
Beaucoup de gens étaient abasourdis [par l’annulation]. Je pense que nombre d’entre eux se disaient : “Nous avons fait des erreurs avec Diablo III, mais nous avons appris et avons créé Reaper pour montrer ce dont nous étions capables. Nous avons rectifié le tir et Reaper est vraiment bon.” Je pense que beaucoup de gens ont eu la sensation que nous avions compris et que nous savions comment faire – et la 2e extension, quelle qu’elle eût été, aurait été l’ultime expression de cela… Les voir tout jeter à la poubelle sans même voir comment Reaper allait s’en sortir, ça a vraiment fait mal.
La moitié de l’équipe de développement déserte
Nous sommes en mars 2014, Reaper of Souls sort dans toutes les bonnes crémerie, et la Team 3 est en décrépitude. Les développeurs désertent vers d’autres projets Blizzard ou quittent carrément l’entreprise. Un ancien employé qui bossait sur l’extension raconte :
À ce moment-là, ils avaient l’équipe de développement Diablo la plus puissante qu’ils avaient jamais eu, ils l’ont éparpillée aux 4 vents.
Trêve d’extensions, l’heure était à Diablo IV, et les membres restants de la Team 3 ont donc commencé à imaginer Diablo IV, sous la houlette de Josh Mosqueira – celui-là même à qui l’on devait le retour aux sources de Diablo avec Reaper of Souls.
Sous le nom de code Hades, Diablo IV s’oriente dans une direction révolutionnaire pour la licence comme pour l’entreprise : un Dark Souls-like en vue à la 3e personne.
Après 2 années de développement apparemment très compliquées, le projet est à son tour annulé et Josh Mosqueira quitte lui aussi le navire Blizzard – qu’il l’ait en raison de l’annulation ou que son départ soit la cause de celle-ci reste obscur.
Quoi qu’il en soit, c’est à ce moment que la décision est prise de chercher à donner un peu de satisfaction aux fans avec “Le Retour du Nécromancien“, une classe vendue la bagatelle de 15€ – de quoi aigrir la satisfaction en question.
À côté de cela, le projet Fenris voit le jour. Vous vous en doutez, il s’agit du reboot du développement de Diablo IV. Celui-ci adopte une forme bien plus traditionnelle et ce, sur bien des points.
Sans coup Fenris
Toutes les sources de Jason Freier le confirment : Fenris reste à l’heure actuelle le nouveau Diablo dans les couloirs de Blizzard. Le projet signe un retour à la vue isométrique traditionnelle de la série, mais en plus de cela, l’objectif est clairement de se rapprocher de l’ambiance d’un Diablo II afin d’oublier bien vite ce qui est perçu dans les hautes sphères de Blizzard comme une erreur “irrécupérable” – Diablo III.
Beaucoup de gens sentaient que Diablo III s’était éloigné de ce qui faisait l’identité de Diablo en termes de style artistique et d’effets de sorts.
Cette phrase vient d’un employé actuel de la firme d’Irvine, propos qu’il complète en ajoutant que Fenris a pour visée de ressembler davantage à Diablo II. Un autre développeur précise :
Ils veulent que ça soit cru et sombre, [se débarrasser] de tout ce qui était considéré cartoonesque dans Diablo III… Faire ce qui effrayait les gens dans Diablo II, mais de façon moderne.
Bien entendu, le développement en est encore à un stade précoce, et c’est justement la raison pour laquelle Blizzard ne souhaite pas communiquer à son sujet. Le spectre de Titan (des cendres duquel est né Overwatch) hante l’entreprise, qui persiste à le voir comme un échec cuisant, tout simplement parce qu’il n’est jamais effectivement sorti, à l’instar d’un Starcraft: Ghost.
2 personnes internes à Blizzard affirment qu’un teasing était bien prévu pour Diablo IV à la Blizzcon mais que, faute d’avoir un build en temps et en heure, cela a été abandonné. D’un autre côté, un employé de la branche Overwatch qui bossait sur le programme de l’événement affirme qu’il n’en a jamais été question.
Dans tous les cas, un développement si précoce signifie aussi que beaucoup de questions se posent encore : il n’est par exemple pas exclu de revenir à une vue à la 3e personne au lieu de la 3D isométrique emblématique de la licence.
D’autre part, il serait apparemment question de penser les villes comme des hubs où l’on verrait les autres joueurs et où il serait possible de grouper afin de réaliser des donjons instanciés, à l’image d’un Destiny. L’idée serait d’avoir le contenu Diablo solo que les joueurs chérissent, et en plus de ça du contenu optionnel à faire en multijoueur.
L’article de Kotaku précise qu’il ne faut pas s’attendre à une sortie avant 2020 et que les années suivantes ne sont pas à exclure pour une parution.