E3 – L’ouverture au public, une fausse bonne idée ?
On s’en était déjà plaint lors de la Paris Games Week, les événements précédemment réservés à la presse sont de plus en plus ouverts au public. L’E3 ouvrait ses portes à 15 000 personnes supplémentaires cette année, avec des incidences sur l’organisation et la sécurité.
Le public qui sème la chaos
Comme dit plus haut, cette année le LA Convention Center a accueilli 15 000 personnes supplémentaires par rapport à l’année passée. Si de nombreuses raisons sont évoquées, c’est surtout au niveau des conséquences qu’il faut réfléchir. Un semaine après l’événement, des retours plutôt négatifs sont parvenus, tels qu’une sécurité laxiste ou encore un public désordonné qui se croyait à un spectacle plutôt qu’à un salon de jeu vidéo.
Dans une publication postée le 16 juin sur son blog, Ismail Rami, co-fondateur du studio Vlambeer, explique son sentiment de malaise durant l’E3. Il commence par introduire un petit historique du salon qui, il le rappelle, était uniquement fait pour l’industrie il y a encore peu de temps. L’ascension du streaming a toutefois bousculé beaucoup de choses, rendant le Showfloor globalement délaissé contre d’opulentes conférences données par les plus grands éditeurs, avec beaucoup de spectacle.
Cela a laissé le Showfloor dans une position précaire : l’E3 était à l’origine un événement réservé à l’industrie (éditeurs / journalistes), mais le showfloor et les stands sont devenus moins attrayants depuis que les entreprises arrivent à attirer plus d’attention à l’extérieur de l’événement. En réalité, le showfloor est devenu un lieu de rencontre et l’endroit privilégié pour les interviews de développeurs.
Il explique alors comment les organisateurs ont fait pour redonner de l’intérêt à l’événement en lui-même, délaissé au profit d’une couverture des conférences.
Pour 2017, l’E3 a radicalement changé : l’exposition permet désormais au public de visiter les stands des différents éditeurs/développeurs. C’est une étape qui devrait assurer la survie du salon, et qui a rendu de l’intérêt au showfloor. Les organisateurs ont fait en sorte que les visiteurs non-professionnels soient reconnaissables en leur attribuant des badges jaunes fluos, tranchant avec ceux des exposants et de la presse, et l’enthousiasme de cette audience a représenté un gigantesque boost au moral pour les exposants.
Il attaque ensuite le cœur du sujet : les problèmes constatés durant l’événement.
Malgré tout cela, l’événement a paru, aux yeux des développeurs et de la presse, beaucoup plus maladroit. C’était un afflux de 15 000 personnes supplémentaires qui, de façon compréhensible, créaient le chaos dès qu’un show destiné aux consommateurs avait lieu. Ce chaos a été palpable à plusieurs moments : lors d’une bagarre, des files immenses, lors de l’ouverture durant laquelle de nombreuses personnes furent bousculées ou encore lorsqu’il fallait faire des ajustements en plein milieu d’un show.
Il s’attaque ensuite aux problèmes qu’ont connu les différents représentants de la presse.
La presse ne peut plus se déplacer rapidement d’un rendez-vous à un autre à cause de la foule qui se déplace de façon moins cohérente, une complainte qui a souvent raisonné à travers le hall. Des conversations confidentielles ont du être déplacées à cause d’un grand nombre de vloggers qui faisaient une couverture du hall à l’aide de leur smartphone.
Il entame alors une complainte sur le fait que le salon ne semblait juste pas prêt à accueillir autant de monde, exemples à l’appui.
Il y avait plus de problèmes avec le fait que l’événement n’était pas prêt pour l’accès au public, comme le manque de volontaires ou de gardes à l’extérieur des stands qui s’en étaient pourvus, une distinction peu claire entre les parties privées et les parties publiques, une circulation difficile à certains endroits clés, ainsi qu’une politique quasi non-existante pour vider les lieux aux heures de fermeture.
Il reste cependant compréhensif sur le fait que 2017 représentait une année-transition pour l’E3.
Toutefois, il ne s’agit que d’épreuves liées à la transition et je comprends que l’E3 est dans une année de transition. Un grand nombre de ces problèmes peuvent être réglés facilement en copiant sur les événements industrie/grand public – la Gamescom à Cologne, en Allemagne, par exemple, dispose d’un jour réservé aux personnes de l’industrie et une partie business séparée pour que tout le monde puisse faire son travail pendant que l’audience parcourt les différents stands.
On arrive alors au dernier problème survenu durant l’E3 : la sécurité.
L’événement aurait malgré tout pu être acceptable, mais il reste une dernière chose : le manque déconcertant de sécurité. Pour chaque jour de l’événement, qui était sécurisé par une entreprise de sécurité privée, j’ai essayé de pénétrer dans le bâtiment sans porter mon badge. J’ai réussi à chaque fois sur la période de trois jours qu’a duré l’E3, et à chaque fois je portais un sac à dos qui n’a pas été fouillé une seule fois. Il aurait dès lors été facile de faire entrer une arme dans le hall et qu’un drame se produise avant que les gardes puissent réagir.
Ceci est inacceptable. Après les récentes menaces liées aux armes à la Comicon de Phoenix, la popularité des armes aux Etats-Unis, et la quantité de colère et la méchanceté lâchée en ligne sur les jeux vidéo, il ne s’agit pas d’un état sûr pour un événement aussi critique que celui-ci. Toutes les conférences de presse — même le booth de Devolver Digital qui se trouvait sur un parking de l’autre côté de la rue — avaient une meilleure sécurité – qu’il s’agisse de détecteurs de métaux, de fouilles des sacs, ou encore de chiens anti-bombe. Ces mesures sont et devraient être un minimum pour n’importe quel hall d’exhibition qui doit gérer une foule de 70 000 personnes.
Ismail Rami conclut en disant que tout n’était pas noir, et que la transition est probablement nécessaire pour assurer l’avenir de l’E3. Toutefois, il considère que la sécurité ne devrait pas souffrir de cette transition et qu’elle devrait être exemplaire dès le début.
On espère donc que le comité d’organisation prendra en compte ces observations et que l’E3 de l’année prochaine sera un exemple de sécurité afin d’éviter qu’un drame n’entache ce salon. De même, nous sommes en droit de nous attendre à ce que la sécurité soit plus qu’exemplaire dans les différents événements européens et à travers le monde, surtout en ces temps d’insécurité.