La fin d’une (courte) aventure
Ceux qui connaissent la gestion de projets chez Google ricanaient déjà lors de l’annonce de Stadia, mais la plaisanterie est devenue réalité : le géant du net ferme son studio de développement, Stadia Games and Entertainment. C’est en tout cas ce qu’indique brièvement Phil Harrison, le manager en chef du service.
Suite au succès de Cyberpunk 2077 sur la plateforme (sûrement des joueurs déçus des versions PS4/Xbox One), Harrison se dit ravi que le concept du service soit validé par ses utilisateurs. Toutefois, les objectifs de Stadia vont changer : plutôt que de proposer une plateforme avec une identité et créations propres, Stadia va se recentrer sur des partenariats avec les tiers.
En 2021, nous intensifions nos efforts pour aider les développeurs et éditeurs de jeux à tirer parti de notre technologie de plate-forme et à proposer des jeux directement à leurs joueurs. Nous voyons une opportunité importante de travailler avec des partenaires à la recherche d’une solution de jeu basée sur l’infrastructure technique et les outils de plate-forme avancés de Stadia. Nous pensons que c’est la meilleure façon de faire de Stadia une entreprise durable à long terme qui contribue à la croissance de l’industrie.
C’est un aveu d’échec camouflé que nous délivre Phil Harrison, le type qui a lancé la PS3 et la Xbox One, malgré un ton enthousiaste. En effet, peu de temps avant l’annonce de Stadia, Google a investi dans deux studios de développements à Montréal et Los Angeles, avec pour ambition de développer des jeux exclusifs. Le groupe n’avait d’ailleurs pas hésité à embaucher des stars du milieu pour aboutir à cet objectif, comme la célèbre Jade Raymond, productrice des premiers Assassin’s Creed.
- Compte tenu de notre volonté de tirer parti de la technologie éprouvée de Stadia et d’approfondir nos partenariats commerciaux, nous avons décidé de ne pas investir davantage dans l’apport de contenu exclusif de notre équipe de développement interne [Stadia Games & Entertainment], au-delà des jeux prévus à court terme. En se concentrant davantage sur l’utilisation de notre plateforme technologique pour les partenaires de l’industrie, Jade Raymond a décidé de quitter Google pour poursuivre d’autres opportunités.
- Nous apprécions grandement la contribution de Jade à Stadia et lui souhaitons la meilleure des chances dans ses projets futurs. Au cours des prochains mois, la plupart des membres de l’équipe SG&E passeront à de nouveaux rôles. Nous nous engageons à travailler avec cette équipe talentueuse pour trouver de nouveaux rôles et les soutenir.
Cette nouvelle est assez surprenante, tant l’investissement dans cette division de développement a semblé conséquent. Dans la supposition que Google n’ait pas eu la patience d’attendre que ses jeux soient prêts, Jade Raymond a prévenu d’entrée que l’attente serait longue.
La fermeture de Stadia Games & Entertainment devrait impacter 150 développeurs, révèle Kotaku. Traînant une sacrée poisse avec elle, Jade Raymond démissionne de son poste de vice-présidente et quitte Google.
Manifestement, Stadia a du mal à attirer du monde. S’il n’est pas encore question de fermer le service comme beaucoup de gens le fantasment (il suffit de voir le nombre de projets ambitieux chez Google annulés de façon abrupte), le géant du net semble vouloir commencer à maîtriser ses coûts.
Pourtant, Stadia fait son possible pour améliorer son attractivité, comme des kits manette/Chromecast offerts aux abonnés YouTube Premium, mais le modèle économique ne semble pas correspondre au public, où chaque jeu nécessite un achat en bonne et due forme.
En parallèle, le xCloud de Microsoft ne nécessite qu’un abonnement au Game Pass Ultimate pour être accessible, avec le catalogue que l’on connaît. NVIDIA semble également tirer son épingle du jeu, via la possibilité de jouer à des titres disponibles sur différentes plateformes de jeu PC comme Steam ou l’Epic Games Store.
Sans les fonctionnalités novatrices annoncées dès le premier jour et une offre qui peut réellement rivaliser avec les autres plateformes, on voit difficilement comment Stadia pourrait être un service prêt à remplacer une machine physique.