Évidemment, les femmes sont bien plus touchées
Le média suédois Breakit rapporte (via Games Industry) qu’une enquête mené conjointement par deux syndicats révèle que près de la moitié des employés de Paradox Interactive aurait été victimes de “mauvais traitement”. Il serait question de bizutage, mais surtout de sexisme qui toucherait l’ensemble de l’entreprise.
Sur les 400 employés de l’éditeur (qui possède aussi ses propres équipes de développement), 133 personnes ont été questionnées sur leur environnement de travail. Ainsi, 44% affirment avoir déjà subi un préjudice moral, ce qui comprend 30% des hommes, mais surtout 69% des femmes interrogées, ces dernières représentant 26% de l’échantillon.
C’est une histoire qui se répète beaucoup dans l’industrie, puisque l’enquête révèle une certaine “culture du silence” au sein de Paradox, rapportant que les plaintes de la plupart des victimes auprès du management n’auraient jamais été accompagnées de façon efficace. “Les cas de mauvais traitement sont un problème systématique et bien trop courant chez Paradox”, concluent les deux syndicats suédois, Unionen et Sveriges Ingenjörer.
Le rapport aurait été soumis à l’exécutif de l’entreprise le lundi 30 août, avant d’être diffusé au sein des employés 2 jours plus tard. Le lendemain, la démission de la PDG Ebba Ljungerud est rendue publique, en raison “de points de vue divergents sur la stratégie de l’entreprise pour l’avenir”. En effet, le nouveau (et ancien) PDG de Paradox, Fredrik Wester, affirme qu’il s’agit d’une coïncidence, puisque le départ de Ljungerud n’aurait aucun lien avec la prise de connaissance du sondage.
En réaction, Paradox fait comme la plupart des entreprises récemment épinglés pour mauvais traitement de ses employés et cas de harcèlement moral ou sexuel : une contre-enquête, comme le rapporte Eurogamer.
- Nous avons connaissance d’une enquête menée au sein de l’entreprise sur ce sujet, et des résultats qui ne sont évidemment pas satisfaisants. L’équipe de direction veut s’assurer que ces données soient prises en compte, mais prendre des mesures immédiates et directes est juridiquement difficile en raison de la nature informelle de l’enquête (et du partage des résultats qui survient juste avant de subir le changement de PDG, ce qui a été assez chargé pour nous). Nous travaillons actuellement à concilier l’enquête informelle avec nos propres recherches internes, et sommes impatients d’agir.
- Paradox est actuellement en train de faire appel à une société externe et neutre pour effectuer un audit approfondi de nos processus et une enquête complète auprès des employés. Cela nous aidera à progresser dans tous les sujets sur lesquels nous avons travaillé à améliorer ces dernières années — le harcèlement et les abus seront primordiaux parmi ceux-ci, mais nous examineront également des sujets tels que l’embauche et la rémunération impartiales, la sensibilisation continue aux préjugés, l’inclusion, et plus encore.
Les mauvaises habitudes
Même si l’entreprise possède une image sympathique de boîte qui développe et édite essentiellement des jeux stratégiques de niche comme Stellaris, Imperator: Rome ou le carton Crusader Kings III, ce n’est pas la première fois que Paradox Interactive est pointé du doigt pour des problèmes d’environnement de travail, comme le souligne déjà Rock Paper Shotgun l’année dernière, presque jour pour jour.
En octobre 2019, Paradox Interactive a reçu de très mauvaises notes sur Glassdoor, un site d’évaluation d’entreprise pour les employés. Comme souvent, le département de contrôle qualité (QA) aurait subi pas mal de préjudices, à commencer par un manque de considération flagrant des employés et des rémunérations à ras les pâquerettes.
Cette mise en lumière de la situation est survenue lorsque Paradox a fermé de façon très brutale tout le département au printemps 2019, du jour au lendemain sans prévenir les principaux intéressés (ni les développeurs qui comptaient sur eux). En dehors de proposer des postes “encore pires” selon les dires, Paradox n’aurait pas cherché à protéger efficacement ses anciens employés.
Malgré des positions hostiles vis-à-vis des syndicats et certains efforts pour s’en passer, la direction de Paradox signera finalement un accord collectif avec Unionen et Sveriges Ingenjörer début juin 2020, ces deux mêmes syndicats qui annoncent aujourd’hui que la situation ne s’est pas franchement amélioré depuis.