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Jeu exceptionnel, mesures exceptionnelles
Plus Cyberpunk 2077 s’approche d’une potentielle sortie, plus la tension et la fatigue semblent monter chez CD Projekt Red. Avec son prochain jeu repoussé une fois de plus, les discussions et révélations autour des conditions de travail au sein du studio se multiplient. Les développeurs ont la tête dans le guidon et les perspectives ne sont pas glorieuses en interne, révèle Jason Scheier sur Twitter.
Look, a CDPR dev told me recently that they’d just clocked a 100-hour week. Another (former) dev just told me they saw some of their friends there and they looked “physically ill.” So kindly gtfo with the “but but but I work long hours too” responses
— Jason Schreier (@jasonschreier) October 27, 2020
Que Cyberpunk 2077 obtienne un délai de 3 semaines est inhabituel, mais cela ne changera probablement pas grand-chose pour les développeurs, dont beaucoup allaient cruncher en décembre de toute façon pour un patch post-lancement. Mais j’espère que la réalité devient plus claire pour ceux qui ont essayé de le nier. Ecoutez, un développeur de CDPR m’a dit récemment qu’ils venaient de boucler une semaine de 100 heures. Un autre (ancien) développeur vient de me dire qu’il a vu des amis là-bas et qu’ils avaient l’air «physiquement malades». Merci de ne pas m’emmerder avec des réponses “mais moi aussi je travaille beaucoup”.
Une bonne hygiène du temps de travail aurait dû être une des priorités du développement de Cyberpunk 2077, CD Projekt Red ayant été traumatisé par la charge ahurissante imposée par le bouclage de The Witcher 3. Une garantie faite à Jason Schreier quand le journaliste travaillait encore chez Kotaku.
Malheureusement, à l’approche du lancement, le studio s’est vu contraint d’obliger ses collaborateurs à venir travailler le samedi, jusqu’à la date de sortie. Étonnamment, la plupart des développeurs ont appris la nouvelle via la presse, ce qui souligne déjà un premier souci de management en interne.
Quitte à enfoncer le clou, Schreier révèle dans un autre tweet que les développeurs ont également découvert l’annonce du report au 10 décembre en même temps que le public via les réseaux sociaux. Ambiance.
En bref, des signes qui mettent possiblement en évidence un studio en souffrance, même si la direction incarnée par Adam Badowski veut nuancer les choses. L’ensemble de l’équipe serait compréhensive et fière de son jeu, et annoncer une période de crunch intense serait “l’une des décisions les plus dures” que le directeur de studio n’ait jamais eu à faire.
“Je vous jure, les gars, ce n’est pas ce que j’ai voulu dire”
Malgré la bonne volonté apparente des dirigeants de CD Projekt, le co-PDG de la boîte polonaise Adam Kiciński a sorti une drôle de déclaration lors d’une réunion avec les investisseurs, à l’occasion du bilan trimestriel du groupe :
À propos du crunch, ce n’est pas si terrible, et ça ne l’a jamais été. Bien sûr, c’est une histoire qui a été récupérée par les médias et quelques personnes ont crunché de façon intense, mais une part importante de l’équipe n’a pas du tout été soumise au crunch, surtout qu’ils ont [déjà] terminé leur travail. Il est plutôt question du département QA (Assurance Qualité, ndr), des ingénieurs et des programmeurs — et ce n’est pas si grave. Évidemment, cela risque d’être légèrement étendu, mais nous avons des retours de l’équipe ; ils sont contents des trois semaines supplémentaires, ce qui fait que nous ne sommes pas inquiétés vis-à-vis du crunch.
Un point de vue qui est en totale contradiction avec les témoignages rapportés, et par extension des principes avancés par le studio. Les témoignages que le crunch est devenu une norme dans l’industrie ne manquent pas. Le fait que cela détruise des vies aussi et coupe l’envie de travailler dans le jeu vidéo aussi. Le dérapage de Kiciński a alors suscité de vives réactions sur les réseaux et — on suppose — en interne.
En effet, Jason Schreier — encore et toujours — a reçu une copie d’un mail envoyé par le PDG de CD Projekt à l’ensemble de ses collaborateurs, le lendemain de la publication du fameux compte-rendu. Il semble en avoir gros sur la patate :
Du plus profond de mon cœur, j’aimerais m’excuser auprès de tout le monde à propos de ce que j’ai dit mardi, lors la réunion téléphonique avec les investisseurs. Je ne voulais pas émettre de commentaire sur le crunch, je l’ai pourtant fait, et je l’ai fait d’une façon dénigrée et blessante. Pour tout avouer, ce n’est que maintenant […] que je réalise la véritable portée de mes propos. Je n’ai rien à dire pour ma défense. Ce que j’ai dit n’était pas juste malheureux, c’était vraiment grave. Pour ça, veuillez s’il vous plaît accepter mes plus profondes et honnêtes excuses.
S’agissait-il d’un moyen de détourner l’attention des investisseurs d’un problème réel ou d’un cynisme de la direction qui se révèle uniquement en coulisse ? Même si Schreier rapporte volontiers que la plupart des employés de CD Projekt Red s’y plaisent et sont fiers de leur travail, tout semble loin d’être parfait dans le studio de Varsovie.
On espère juste qu’on n’aura pas besoin de récupérer des développeurs à la petite cuillère lors de la sortie de Cyberpunk 2077, le 10 décembre.
Dans tous les tafs, il y a "des coups de bourre". ce n’est pas nouveau et pas prêt de s’arrêter. S’il y a bien un secteur dans lequel cela se vérifie, c’est bien l’industrie des jeux video. C’est même ce qui fait parfois la légende d’un jeu. Je pense même, que cela se produisait encore plus "avant" que de nos jours. Lorsque les projets étaient intimes, et viscéraux comme l’ont pu les sorties de Doom, Quake et Unreal Tournament. Ce qui change : maintenant de grosses équipes (plus d’impact), projets plus longs, donc plus difficile de tenir sur la distance, la médiatisation. ce qui ne change pas —> la passion du metier et l’energie que chacun peut investir dans la réalisation d’un projet qui lui est cher.