Le deal à 100 millions de dollars
Suite à une enquête menée par Kotaku sur l’environnement sexiste qui a longtemps perduré dans les bureaux de Riot Games, le géant responsable de la franchise League of Legends avait conclu un accord pour reverser 10 millions de dollars à plus de 1000 employées et ex-employées en 2019. Aujourd’hui, le Washington Post rapporte que Riot Games devra finalement dédommager 2 fois plus de personnes… avec un versement 10 fois plus élevé que prévu.
L’enquête publiée par Kotaku en 2018 avait mis en lumière une “bro culture” au sein des bureaux de Riot Games qui portait préjudice aux employées et collaboratrices externes, victimes de harcèlement et de discriminations diverses. Au-delà de devoir supporter le tempérament de certains de leurs collègues masculins, les femmes qui représentaient 20% de la masse salariale au moment des faits étaient confrontées à des problèmes malheureusement trop courant dans l’industrie : discrimination à l’embauche, plafond de verre pour les promotions et salaires inégaux pour un même poste.
Après le montage d’un recours collectif qui avait motivé Riot Games à trouver un accord en reversant 10 millions de dollars à plus de 1000 collaboratrices (employées et externes), deux organismes dédiés au respect des droits du travail en Californie (la DFEH et la DLSE) ont estimé que le géant américain pourrait se permettre de faire un effort supplémentaire.
Deux ans plus tard, Riot Games devra finalement verser 80 millions de dollars aux 2 300 personnes représentées par la class action, toutes ayant travaillé pour Riot Games entre 2014 et aujourd’hui. 20 millions supplémentaires sont également dégagés pour rembourser leurs frais juridiques.
Pour l’avocate qui représente l’ensemble des victimes, Genie Harrison, c’est bien évidemment une bonne nouvelle :
C’est un grand jour pour les femmes de Riot Games et pour les femmes de toutes les entreprises de jeux vidéo et de la tech qui méritent un lieu de travail exempt de harcèlement et de discrimination. Nous apprécions l’introspection de Riot et son travail depuis 2018 pour devenir une entreprise plus diversifiée et inclusive.
Pour le directeur de la DFEH Kevin Kish, c’est une également une victoire pour l’état de Californie qui redouble d’efforts ces derniers temps pour ce ce que les grandes entreprises qui opèrent sur son sol soient exemplaires au niveau de leur environnement de travail. C’est le même organisme qui a engagé des procédures à l’encontre de Blizzard en juillet 2021, à l’origine de la crise que traverse actuellement le groupe Activision-Blizzard pour des faits similaires.
Cet accord historique reflète l’engagement de la Californie en faveur de l’application stratégique et efficace par le gouvernement des lois solides de l’État en matière d’égalité de rémunération, de lutte contre la discrimination et de lutte contre le harcèlement. S’il est déposé par le tribunal, ce décret indemnisera les employés et les sous-traitants touchés par la discrimination sexuelle et le harcèlement, assurera un changement durable sur ce lieu de travail et enverra le message que toutes les industries en Californie, y compris l’industrie du jeu, doivent offrir un salaire égal et des lieux de travail libres da discrimination et le harcèlement.
Sur le crédit de Riot, l’entreprise a mené une introspection depuis 2018 sur sa politique de lutte contre le harcèlement avec une emphase sur l’inclusivité au sein de ses locaux. Le studio avoue au Washington Post qu’il ne peut pas effacer les erreurs du passé, mais qu’il fait son possible pour arranger les choses, petit à petit.
Nous avons dû faire face au fait que malgré nos meilleures intentions, nous n’avions pas toujours été à la hauteur de nos valeurs. En tant qu’entreprise, nous étions à la croisée des chemins ; nous pouvions nier les défauts de notre culture, ou nous pouvions nous excuser, rectifier le tir et construire un meilleur Riot. Nous avons choisi cette seconde voie. Si nous sommes fiers du chemin parcouru depuis 2018, nous devons également assumer la responsabilité du passé. Nous espérons que ce règlement reconnaît correctement ceux qui ont eu des expériences négatives à Riot.
Pourtant, Riot traîne encore quelques casseroles à ce jour, comme le rappelle volontiers le journal. En effet, le dossier qui couve depuis 2018 n’aborde pas les plaintes de harcèlement qui ont été soumises cette année, et plus particulièrement celle qui a visé son PDG Nicolo Laurent en janvier, accusé par son assistance de lui avoir fait des avances sexuelles non-sollicités. Toutefois, sa position ne serait pas en danger, une enquête indépendante n’ayant pas réussi à obtenir des éléments lui permettant de confirmer des cas de méconduite de la part du PDG français. En réalité, la plaignante, Sharon O’Donnell, serait déjà connue pour chantage et dépôts de plaintes abusifs.