Épinglé juste avant la sortie de Red Dead Redemption 2, Rockstar est probablement le studio qui en fait le plus à l’heure actuelle pour changer.
“Il y a toujours de mauvaises graines, mais on sent que leurs jours sont comptés”
Lorsque la culture toxique d’une entreprise est révélée, il y a plusieurs écoles :
- Celle de Quantic Dream aka le déni suivi du retour de flamme
- Celle de CD Projekt RED aka c’est la vie
Et puis il y a celle de Rockstar. Rockstar qui suite à la tempête de caca de fin 2018 a envoyé un mail à son staff à l’automne dernier, pour le prévenir que tout allait changer.
Ces derniers mois, nous avons entrepris un gros travail à travers tous les départements de notre entrepris en inspectant nos procédures afin de déterminer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, là où nous sommes bons et là où nous pourrions nous améliorer. Nous espérons que la majorité d’entre vous avez déjà ressenti certains de ces changements et que ceux pour qui ce n’est pas le cas les verront bientôt.
Et là où l’on pourrait s’attendre à ce que ce mail ne soit qu’un coup de com’, il n’en est rien. Rockstar a bel et bien mis en place des changements drastiques de sa culture d’entreprise, comme le rapporte Kotaku qui a pu parler à quelques employés.
La première mesure est probablement la plus importante : les heures supplémentaires sont désormais optionnelles et sont rémunérées 1.5 fois plus que les heures normales. Mais c’est loin d’être tout, puisque les employés, en cette période de confinement, rapportent recevoir fréquemment des mails leur recommandant de ne pas trop travailler et leur rappelant que la priorité est leur bien être et leur santé.
Rockstar deviendrait-elle communiste ? Blague à part, ce genre de management est très réconfortant venant d’une boîte qui pèse aussi lourd que Rockstar et montre que cette voie est possible.
Autre décision de taille : les managers jugés toxiques ont tous été virés et remplacés. On pourrait croire qu’il s’agit de quelques personnes, mais là encore Rockstar n’a pas fait les choses à moitié puisque la décision s’est étendue aux directeurs de studios. Ainsi les patrons des studios de San Diego (États-Unis) et de Lincoln (Royaume-Uni) ont dégagé le plancher.
Par ailleurs, le studio a tenu des meetings sur le harcèlement sexuel et s’est assuré les services d’une entreprise de coaching appelée Mindful Talent afin de former et sensibiliser ses managers.
Un employé raconte :
C’est comme s’il y avait une opération en cours pour se débarrasser des mauvaises graines. Il y en a encore qui traînent, ne vous méprenez pas, mais on sent que leurs jours sont comptés.
Une partie du problème est bien entendu l’ampleur des projets de Rockstar. Les jeux qui sortent des fourneaux du studio sont toujours colossaux et cela représente évidemment énormément de travail.
Selon un employé toutefois, ce n’est pas tant l’ampleur le problème, mais Dan Houser. Après un congé sabbatique, l’un des deux dirigeants de Rockstar a finalement quitté l’entreprise en début d’année. C’est celui-là même qui avait déclaré fièrement faire des semaines de 100 heures avec l’équipe en charge du scénario, ce qui avait conduit à des investigations de la part de Kotaku ayant révélé la culture très toxique de la boîte (qu’on connaissait déjà, mais pas à ce point-là).
Il était apparemment la principale raison du crunch, car il était connu qu’il demandait beaucoup d’améliorations et de réécritures de dernière minute, ce qui impliquait une quantité astronomique de travail pour beaucoup de monde.
Les employés interrogés par Kotaku sont unanimes : la situation s’améliore et ils le ressentent. Certains qui envisageaient de tirer leur révérence envisagent à présent de faire leur carrière au sein du studio.
Malgré tout, ils restent lucides et précisent qu’il reste à voir ce que va donner toutes ces belles décisions sur la durée et, surtout, si elles survivront à l’approche d’une sortie.
On le sait, la période qui précède la parution d’un produit final est toujours la plus intense et celle qui concentre la plus grosse phase de crunch.
Il faudra effectivement passer tout cela à l’épreuve, et même si Dan Houser est pointé du doigt, Rockstar entend à priori diminuer l’ampleur de ses projets, tout du moins dans leur forme initiale. Est ainsi mis en avant le jeu-service, avec la possibilité de sortir un titre moins imposant (mais considérant les standards de Rockstar, cela resterait un gros jeu, rappelle Kotaku) suivi de mises à jour régulières. Reste à savoir s’il faudra repasser à la caisse pour avoir ce qui de fait pourra être considéré comme le jeu complet, ou si ces mises à jour seront gratuites.
GTA 6 sera le premier concerné.
Notons que cette décision fait écho aux récentes déclarations de Strauss Zelnick, patron de Take-Two, qui possède Rockstar.