Ça faisait un bon moment qu’on avait plus revu Age of Wonders, et pour la peine Triump Studios à décidé de nous envoyer en l’air jusque dans les étoiles. Ce que Civilization: Beyond Earth a foiré, Age of Wonders: Planetfall est-il capable de le défoirer ?
Ground control to major Tom
Pour la première fois de sa longue histoire, Age of Wonders se la joue Team Rocket et s’en va vers d’autres cieux. Au sein du firmament, vous pourrez rencontrer et jouer 6 peuples : l’Avant-Garde, l’Assemblage, les Kir’kos, les Amazones, le Syndicat et les Dvars.
Chacun des peuples a ses spécificités.
Déjà avec cela, Triumph Studios frappe fort puisque là où un Civilization n’a que très peu à proposer en termes de variété d’une civilisation à une autre, ici chacun des peuples a ses spécificités. L’Avant-Garde va par exemple se concentrer sur les dégâts lasers et kinétiques tandis que les Kir’kos se rangent du côté de la biochimie et des attaques psioniques. On se retrouve avec un bon équilibre entre les différentes factions, que l’on observe également du côté du design avec des unités graphiquement très marquées malgré les rôles similaires qu’elles remplissent.
Le premier contact se veut agréable, avec un tuto bien fourni qui nous introduit à l’univers complexe, que ça soit au niveau de la trame ou du gameplay, de ce nouvel Age of Wonders.
Planète faille
C’est à partir du moment où les personnages ouvrent la bouche que ça commence à coincer. Mentionnons d’emblée que la traduction a probablement été réalisée lors d’une soirée bien arrosée, aussi aimerais-je vous suggérer de la fuir comme la peste et de faire le jeu intégralement en anglais (seuls les textes peuvent être traduits). Pour vous donner un petit exemple, Planetfall, qui constitue tout de même le nom du jeu – excusez du peu – et une action particulièrement importante, à savoir l’atterrissage sur une planète ; ceci a donc été traduit par “Chute de planète”, ah merde.
La traduction a probablement été réalisée lors d’une soirée bien arrosée.
L’univers d’Age of Wonders: Planetfall est très riche et travaillé. Vous trouverez régulièrement des citations, notamment pour les programmes de recherche réussis ou encore via la narration environnementale. Il y a toute une encyclopédie (très velue, dans le bon sens du terme pour les passionnés, dans le mauvais sens pour les néophytes) à consulter et qui permet de se rendre compte que la licence a beaucoup à offrir. Toutefois, la narration en elle-même n’offre que peu d’intérêt, avec des personnages caricaturaux au possible, lâchant des répliques sans saveur et auxquelles on croit autant qu’à la mort de Marion Cotillard dans Batman.
Les divers événements manquent d’impact et la qualité de la traduction ainsi que de l’écriture n’arrange rien. Stellaris, par exemple, fait infiniment mieux en n’ayant pour ainsi dire pas de scénario en tant que tel, juste avec ses anomalies à étudier.
En gros, on a un bon terreau pour réaliser un magnifique par-terre des fleurs les plus délicates du monde, et on y a planté des choux. Des choux de Bruxelles. C’est dégueulasse, personne n’aime les choux de Bruxelles.
La couleur tombée du ciel
Ceci mis de côté, Age of Wonders: Planetfall nous offre de magnifiques cartes générées de manière procédurale, que l’on prendra plaisir à explorer après avoir créé notre commandant. On nous offre même quelques options de personnalisation, loin d’être indispensable mais sympathique.
La palette colorée et la variété des environnements donnent l’impression d’évoluer dans un monde totalement inédit et renforce le plaisir de l’exploration.
La palette colorée et la variété des environnements donnent l’impression d’évoluer dans un monde totalement inédit et renforce le plaisir de l’exploration ainsi que de l’expansion de notre empire naissant. On évitera toutefois de se rapprocher des textures d’eau, mais de toute manière le plaisir comme l’aspect pratique résident dans la contemplation globale.
D’ailleurs, en dézoomant on peut avoir accès à une carte stratégique très imagée et très bien foutue puisqu’elle nous permet en un coup d’œil comment optimiser notre expansion, déterminer les frontières et les localisations des autres empires.
En combat, c’est un peu moins joli du côté des unités et de leurs animations. En revanche l’environnement se montre toujours superbe avec une très grosse variété, qui constituait déjà un point fort sur l’opus précédent.
L’âge de l’ennui
Age of Wonders: Planetfall vous propose grosso-modo 2 pans principaux : la gestion et le combat. L’aspect gestion recouvre la construction, l’amélioration et l’expansion des colonies ainsi que la génération de ressources et la création d’armées. Lorsque l’on arrive sur une planète, il est possible de créer une colonie à un point déterminer et de débuter son expansion.
Contrairement à un Civilization, la carte est prédécoupée en secteurs avec des emplacements de construction en leur centre. Chaque secteur dispose de ressources spécifiques parmi : l’énergie (monnaie), la recherche, la nourriture, la production. Rien de bien déroutant ici, la nourriture permet de faire croître sa population tandis que la production détermine la durée de construction. Une colonie pourra s’étendre jusqu’à 2 secteurs de distance, ce qui signifie envoyer une armée pour annexer un secteur dans un rayon de 2 “cases” chaque fois que la population de ladite colonie le permet.
En plus des prédispositions de ressources, il existe des bâtiments spécifiques dans certains secteurs. Ceux-ci devront être explorés par une seule armée (jusqu’à 6 unités) et leurs ennemis vaincus avant de pouvoir être annexés. En contrepartie, ils donneront des bonus en rab. Un ajout très agréable qui permet de diversifier davantage une carte déjà très variée.
Seulement voilà, l’aspect gestion peine à trouver son intérêt : les bâtiments ne coûtent pas d’argent, ils coûtent de la production. Au bout du compte, chaque colonie, chaque secteur annexé peut disposer de presque tous les bâtiments existants. En gros, adieu la spécialisation de ville, même si certains édifices empêchent la construction d’autres, notamment dans les secteurs, on n’est jamais face à un choix crucial.
L’aspect gestion peine à trouver son intérêt.
En découle un gameplay franchement barbant puisqu’on se content de cliquer à la chaîne sans nécessairement se les brouter à choisir. Pire, une fois que la liste des bâtiments est écoulée, la colonie ne peut pas s’autogérer. Elle ne passe pas automatiquement sur la production d’énergie ou de recherche, il faut le faire à sa place, sans quoi on ne peut pas terminer le tour de jeu. Ce qui fait qu’on se retrouve à faire une liste de tâches “Produire de l’énergie” en double-cliquant comme un cinglé.
Le pire réside dans les parties assez avancées ou l’on voit beaucoup d’unités et que l’on redoute de cliquer sur “Terminer le tour”, pour la simple et bonne raison que même dans Civilization, l’attente n’a jamais culminé à ce point. C’est bien la première fois que je garde une page internet ouverte sur mon deuxième écran pour passer le temps en attendant que les pengus terminent de faire bourlinguer leurs unités entre deux cases juste pour cramer tous leurs points de mouvement.
L’âge du plaisir
Le véritable intérêt d’Age of Wonders: Planetfall est à aller chercher du côté des combats. Lorsqu’un conflit surgit, vous pouvez choisir de le résoudre automatiquement ou bien de prendre vous-même le commandement de vos troupes (recommandé pour les combats risqués), sachant que la configuration de vos troupes sur la carte du monde a un intérêt puisque plusieurs armées adjacentes seront embarquées dans l’affrontement et disposées de la même manière. Notons au passage que, si dans Age of Wonders III vous aviez le temps de souffler une nouvelle bougie avant que le chargement d’un combat se fasse, Planetfall s’en sort à merveille et nous fait glisser dans l’affrontement l’air de rien.
Si dans Age of Wonders III vous aviez le temps de souffler une nouvelle bougie avant que le chargement d’un combat se fasse, Planetfall s’en sort à merveille.
On peut ainsi monter jusqu’à 42 unités par combat, une sorte de jeu d’échec avec des fusils lasers et des bestioles galactiques. Il existe 8 unités spécifiques, de l’organique au mécanique et, comme dit plus haut, aux attributs marqués en fonction du peuple. En situation de combat, vous devrez planifier vos coups et vous adapter, car l’IA ne vous fera pas de cadeau (pas du tout).
Pour vous permettre de vaincre, vous aurez droit à une flopée de pouvoirs via vos unités standards, mais aussi les divers héros que vous pourrez recruter de manière régulière ainsi que les opérations. Récupérées via la recherche, elles permettent d’assister vos troupes, d’occasionner des dégâts, de saper le moral des troupes adverses, etc.
En plus de tout cela, il vous sera possible de customiser vos unités grâce à une sélection de mods variés. Et pour le coup ça fonctionne très bien. Chaque unité peut embarquer jusqu’à trois mods, et chaque nouvelle configuration crée un modèle que l’on peut produire directement dans sa colonie. Cela permet de s’adapter à de nombreuses situations, en fonction des armées et des peuples que l’on affronte.
Quelques regrets du côté de la gestion du moral : des troupes qui font la gueule vont presque invariablement manquer leurs tirs, et cela peut véritablement vous pourrir un combat sans que vous ne disposiez de beaucoup de recours.
L’âge de l’entre-deux
Mais vous n’êtes pas forcé d’aller au front. Du moins pas tout le temps. Certains bâtiments génèrent de l’influence et des factions peuvent vous donner des quêtes, qui figurent d’ailleurs pour la plupart au rang des événements manquant cruellement d’intérêt.
L’influence constitue la monnaie diplomatique. Grâce à elle, vous pourrez par exemple réclamer un secteur occupé par des indépendants, mais aussi recruter des unités chez eux. Si de prime abord cette mécanique apporte un intérêt renouvelé à la diplomatie, toujours un peu en berne dans les 4X, elle devient rapidement un automatisme sans enjeu : du moment qu’on peut payer, ça passe. En soi, ce n’est pas tant de la diplomatie qu’un deuxième système marchand, plus restreint.
Notons les arbres de recherches sociétaux et militaires, très étoffés et qui accompagnent bien l’évolution du joueur en lui permettant de développer ses colonies ainsi que sa puissance de feu. On a bien ce sentiment de progression, notamment à travers les opérations que l’on débloque ainsi que via les nouveaux mods d’armes.
Un dernier mot pour parler de la bande-son, pas franchement marquante et qui pour tout dire manque un peu de saveur. On sent bien que la composition s’est voulue très “sci-fi” en employant des instruments stéréotypés… pour un résultat plutôt stéréotypé, forcément. Néanmoins, cette BO est plutôt sympathique et accompagne bien les parties, faute de les sublimer.
Chute de planète
Age of Wonders: Planetfall offre une approche différente du 4X qui se concentre davantage sur les combats. Si cet aspect est très maîtrisés et offre des moments aussi exigeants que gratifiants, on regrette que la gestion soit nettement moins maîtrisée et, pour tout dire, barbante. Restent des cartes aléatoires superbes, une bande-son typée sci-fi sympathique, mais un peu trop stéréotypée, ainsi qu’une évolution constante appréciable grâce aux arbres de recherche étoffés et une diplomatie décevante. En définitive, un bon 4X, pour peu que vous ayez le temps, notamment d’attendre entre chaque tour.
► Points forts
- Les cartes, superbes
- Combats exigeants et gratifiants
- Bon équilibre des unités
- Arbres de recherche bien étoffés
- Possibilité de customiser ses unités avec les mods
- Une énorme palette de héros
- Design de unités marqué et poussé
► Points faibles
- La traduction est franchement à revoir
- Écriture nazebroque
- Le temps d’attente entre les tours est ridicule
- Gestion aux fraises
Chute de planète
Configuration de test :
- GPU : NVIDIA RTX 2080
- CPU : Intel Core i7-9700k @ 5GHz
- RAM : 16 Go DDR4
- Installé sur SSD M.2
WarLegend.net a bénéficié d’une copie presse PC fournie par l’éditeur de ce jeu.
Age of Wonders: Planetfall est disponible sur PC.