Imaginez un instant : un jeu Dragon Ball en monde ouvert, aux atours d’RPG, sur fond de combat nerveux, au fil d’une histoire bien plus que culte. La formule parfaite en somme, qui a tout pour faire frissonner les fans, et pourquoi pas, attirer ceux curieux de découvrir la légende de Son Goku. Si seulement il ne fallait pas subir un monde ouvert tout droit sorti des limbes des années 2000.
L’épopée des légumes guerriers
Après plus de 35 années d’existences et presque tout autant d’adaptations vidéoludiques à son actif, on pourrait s’étonner que Dragon Ball ait quoi que ce soit de plus à nous raconter. Pourtant, une jolie pâte anime et une musique nostalgique plus tard, nous voilà déjà à bord du train Dragon Ball Z: Kakarot, prêt à vivre une fois encore les moments les plus forts du manga. Je tiens à dire qu’utiliser “We Were Angels” dans les trailers est désormais considéré comme de l’antijeu marketing.
Cette fois-ci, CyberConnect 2 est aux commandes des Guerriers Z, avec comme intention première d’exploiter jusqu’à la moelle l’amour des fans pour cette histoire iconique. De Raditz au terrible Majin Boo, Dragon Ball Z: Kakarot retrace avec précision toute la trame de l’œuvre originelle (même si de mon côté, je regrette un peu l’absence des péripéties de petit Goku). Sur ce point-là, on ne peut nier que le titre est réussi : très peu d’éléments scénaristiques sont omis, et il est possible d’explorer en détail l’univers créé par Akira Toriyama.
Or, le jeu s’avère bancale là on attendait de lui le meilleur, je veux parler de la mise en scène. Loin d’un ratage complet — on a tout de même droit à nos petits frissons d’excitation — cette dernière reste tout de même bien en deçà de ce qu’on pouvait espérer. Cela est d’autant plus vrai quand on connait le passif du studio, passé maître dans l’art de la mise en scène façon manga avec les Naruto Ultimate Ninja Storm. Là ou ces titres défrisés parfois mêmes les meilleures parties de l’anime d’origine, on en est bien loin en ce qui concerne Kakarot où trop souvent, seule la nostalgie maintient à bord.
Loin de moi l’idée saugrenue de comparée Naruto à Dragon Ball ; pour autant, force est de constater que l’un a reçu moins d’attention que l’autre à cet égard. Lorsque venu l’heure du passage emblématique, comme, exemple tout à fait pris au hasard, la mort de Krilin, la mise en scène tombe complètement à plat. Je ne compte pas le nombre de fois où elle perd tout effet dramatique, soit parce qu’elle va trop vite, soit parce qu’elle ne cherche juste pas à se mettre en valeur le moment opportun.
Cela ne l’empêche pas de faire mouche à quelques reprises (sur ce plan-là, la saga de Boo se veut étrangement bien plus réussie), mais on en vient presque à ressentir de la frustration face à ce manque un poil cruel d’investissement.
À ce compte-là, on peut aussi pointer du doigt la désagréable censure qui rajoute une vilaine tâche à ce tableau. Elle témoigne d’une utilisation très maladroite là il aurait pourtant était simple qui n’aide en rien les cinématiques déjà paresseuses. Même pour Freezer coupé en deux — puis en plus petits morceaux après – dont l’aspect “gore” n’était que très peu présent dans le matériau original, notre imagination doit faire tout le travail.
Lorsque venu l’heure du passage emblématique la mise en scène tombe la plupart du temps complètement à plat.
On ne sait que trop bien que CyberConnect 2 est capable de prouesses lorsqu’il s’agit de délivrer des cinématiques d’enfer, et ce Dragon Ball méritait de briller de mille feux.
Rayon magiiiique !
Dragon Ball oblige, le système de combat se devait d’être le fer de lance de Kakarot. Manette en main, les sensations sont là, la nervosité est au rendez-vous tandis qu’on laisse s’extasier notre âme d’enfant à chaque lancé de kamehameha et transformation en Super Saiyan. Pour le coup, on reconnaît bien le style très visuel de CyberConnect 2 couplé à un gameplay des plus simple à prendre en main.
Enchaîner les ennemis avec des attaques du plus bel effet se veut être un jeu d’enfant. Le titre conserve néanmoins un léger côté technique appréciable, notamment au travers de la téléportation. Elle nous demande ainsi d’aiguiser notre sens du timing afin d’esquiver les attaques, une quasi nécessitée dans le cas des combats de boss. Cela aurait mérité d’être un peu plus approfondi, mais au final on ne lui en tiendra pas rigueur.
On laisse s’extasier notre âme d’enfant à chaque lancé de kamehameha et transformation en Super Saiyan.
D’ailleurs, ces derniers donnent lieu à des affrontements plutôt palpitants, portés par de courtes mises en scène lors de certaines attaques. Un outil d’immersion efficace aidé qui plus est par une difficulté en adéquation avec l’univers du manga, bien qu’assez facilement outre passé si tant est qu’on soit adepte du farm d’expérience intensif.
Si les combats aguichent la rétine, ils n’en restent pas moins imparfaits. Passé les premières heures de jeu, on ne peut s’empêcher de ressentir une certaine monotonie ; quelque part la faute à cette fidélité au manga qu’arbore le jeu. Nombre de techniques, et bien évidemment la majorité des transformations, ne sont disponibles que plus tard dans l’aventure. Il faut alors attendre la seconde partie de la saga des Cyborgs pour briser la routine qui s’était installée.
Là encore, la saga Boo s’accapare tous les lauriers, puisqu’on peut s’adonner à cœur joie à toutes les capacités et transformations de notre arsenal, procurant le panache qui pouvait parfois faire un peu défaut.
En outre, quelques soucis de caméra sont à déplorer. De manière générale, les affrontements ne subissent pas l’effet brouillon et conservent une certaine clarté. Par contre, en fonction de l’endroit où l’on se trouve (surtout lorsqu’on est au niveau du sol), la caméra peine à garder l’action en joue. Il suffit que l’adversaire balance la sauce de kikoha et l’écran devient un pâté de pixels illisible. Un constat flagrant dès lors que les escarmouches impliquent plusieurs ennemis.
Cette nouvelle adaptation vidéoludique des aventures de notre Saiyan/Terrien préféré ne se contente pas de fournir sa dose d’adrénaline. L’ensemble est “soutenu” par un aspect RPG qui… a le mérite d’exister ? Tout comme beaucoup de fans, je trouve l’idée d’un RPG Dragon Ball toujours alléchante, pour peu que ce ne soit pas un terme lancé au hasard. Ce qui est relativement le cas ici.
Ne pas se méprendre : les éléments RPG sont bien visibles. On y trouve statistiques, objets consommables, arbres de compétences et autres fonctionnalités standards du genre. Le hic est qu’en tout et pour tout, rien ne vient vraiment justifier leur présence ; même l’arbre de compétences pourrait tout aussi bien être remplacé par des capacités débloquées au fil des quêtes/de l’histoire — sachant que c’est déjà en partie le cas.
Le système de repas n’a vraiment d’intérêt qu’arriver dans le contenu de fin de jeu, tandis que les consommables ne sont là que pour simplifier la vie. En dehors de la possibilité de choisir nos attaques à la volée, la seule fonctionnalité vraiment intéressante s’avère être le Tableau communautaire, qui apporte un léger contexte stratégique dans notre façon d’appréhender les personnages et dans notre progression.
C’est là tout le problème de la partie RPG du titre : à aucun moment elle ne nous est nécessaire.
Les communautés se dotent toutes de bonus bien distinct, allant de la simple augmentation d’expérience aux boost de caractéristiques. Il faut alors apprendre à gérer les “Emblèmes d’âme”, de petits jetons venant déterminer le rang global d’une communauté. Chacun d’eux influe plus ou moins sur le niveau d’un tableau ; des affinités existent entre les emblèmes, de même que leur efficacité dépend de la communauté à laquelle ils sont assignés. Ils disposent eux aussi d’un niveau qui leur est propre, que l’ont peut augmenter en offrant des cadeaux.
Les effets engendrés par le Tableau communautaire sont utiles et nombreux, l’utilisation vite assimilée, mais reste néanmoins dispensable. Vous pouvez tout à fait faire l’entièreté du jeu sans jamais poser les yeux sur ce système. C’est là tout le problème de la partie RPG du titre : à aucun moment elle ne nous est nécessaire.
Goku, pêche et kikoha
L’autre aspect du jeu qui promettait monts et merveilles (aux yeux des fans tout du moins), c’est bel et bien le Dragon World en monde ouvert. Eh bien, je ne vais pas y aller par quatre chemins : non d’un Kaïo Shin que c’est mauvais. J’ai l’impression que tout a été calculé pour qu’on veuille passer le moins de temps possible à parcourir la Terre. Déjà, le MONDE ENTIER est recouvert d’Orbes Z à en gerber ses senzus, ce qui ne laisse aucune place à une quelconque immersion lors des phases libres.
Le plus drôle, c’est que ramasser ces orbes ne rime à rien, puisque même les combats subsidiaires en donnent bien plus que si on passait une heure à en récolter.
Tiens, en parlant de récolte, sachez que Kakarot s’est fait une joie d’inclure tout ce qui caractérise un bon jeu Dragon Ball : de la chasse, de la pêche, de la cueillette et le classique, mais néanmoins populaire “minage au kikoha”.
Mais si encore les quêtes annexes étaient bien… sauf qu’évidemment on a le droit au meilleur de l’inutile et de l’inintéressant. La quasi-totalité d’entre elles se résume à aller chercher 4 pommes dans les arbres du coin à la demande d’un PNJ trop flemmard pour faire 3 pas. L’unique intérêt se trouve dans la rencontre avec divers personnages issus du manga — incluant ceux apparus dans les tout débuts. On explore alors un peu plus en détail le Lore, bien que cela reste extrêmement limité et sans réelle valeur ajoutée.
Heureusement, ces histoires secondaires s’avèrent en général très rapides à terminer et plutôt généreuses en récompenses. Enfin, comme tout le reste, ce n’est bon qu’à être un élément de plus qui n’est vraiment là qu’afin de compléter des objectifs en vue d’un 100 %.
[Pour les quêtes annexes], évidemment, on a le droit au meilleur de l’inutile et de l’inintéressant.
Comme si cela ne suffisait pas, le monde ouvert s’impose comme une exposition grandeur nature de la technique vieillotte intrinsèque au titre. Les décors affichent des textures dignes des premiers jeux PS3, et ça, ce n’est que si on évite de trop s’approcher. En contrepartie, les personnages ont droit à une modélisation plutôt soignée — non pas sans accroc — tout comme les attaques, agréables à l’œil. Toujours est-il qu’on peine à croire qu’il s’agit d’un jeu sorti sur la fin de cette génération de console.
La direction artistique, restant en tout point fidèle à la pâte unique de Dragon ball, parvient malgré tout à sauver les meubles. On arrive quand même à apprécier survoler les différents paysages qui ont façonné la série durant toutes ses années. C’est là d’ailleurs le véritable point positif de cette balade à ciel ouvert : on peut s’amuser à recueillir des informations précises du manga d’origine (Dragon Ball sans le Z). Elles se présentent sous la forme de petite carte, arborant fièrement des images de l’anime de 1986.
Une petite touche personnelle qui certes, s’attaque surtout au plus nostalgique d’entre-nous, mais peut s’avérer appréciable pour quiconque n’a connu que les Z, GT ou Super.
Le véritable point positif de cette balade à ciel ouvert : on peut s’amuser à recueillir des informations précises du manga d’origine (Dragon Ball sans le Z).
Les nuages sans la magie
Pris dans sa globalité, Dragon Ball Z: Kakarot est avant tout un parc à thème où l’on peut s’imprégner de tout ce qui fait du manga de Toriyama un succès planétaire depuis plus de 30 ans. L’univers y est retranscrit avec justesse et fidélité au point au même que le public de longue date parviendrait en découvrir davantage. Quand on y ajoute des combats qui tiennent la route, on ne saurait le qualifier de mauvais jeu. Malheureusement, ce dernier souffre des tous les “à côté” qu’on a voulu lui incorporer. L’aspect RPG se veut superflu au possible, les quêtes hors scénario sont d’un ennui mortel, et le monde ouvert est une énorme tâche sur un tableau qui avait de quoi être étincelant. Même la mise en scène, pourtant point fort de CyberConnect 2, s’avère fébrile à plus d’une reprise. Cela ne devrait pas empêcher les fans et moins fans de s’amuser, mais après autant de jeux vidéo – parfois excellent comme Dragon Ball FighterZ – sous la tutelle des Guerriers Z, tout Saiyan sait qu’il est temps de repousser les limites, et non l’inverse.
► Points forts
- L’histoire de Dragon Ball Z sans en perdre une miette
- Une véritable encyclopédie de l’œuvre d’Akira Toriyama
- Présence de certaines musiques originales
- Difficulté plutôt bien dosée
- Un système de combat nerveux comme on l’aime…
- La mise à scène offre de bons moments…
- Une progression des personnages bien menée…
► Points faibles
- … bien qu’il faille patienter pas mal de temps avant de vraiment en profiter
- … quand elle ne retombe pas complètement à plat
- … même si très linéaire pour les besoins du scénario
- Techniquement à la ramasse (surtout les décors)
- Ouuh la vilaine censure !
- La partie RPG, très superflue
- Une caméra pas toujours très fiable en combat
- Meublage à coup de combats sans saveur et de quêtes Fedex
- La grande majorité des quêtes secondaires : complètement inutile et inintéressante
- La pêche, la chasse et la cueillette, ce n’était pas obligé. Non vraiment, il ne fallait pas.
- L’exemple parfait du mauvais monde ouvert
- La traduction française parfois un peu aux fraises
Ils n’ont pas tendu la bonne carotte
Configuration de test :
- GPU : NVIDIA GTX 1080 Ti
- CPU : Intel Core i7-7700K @4.6GHz
- RAM : 16 Go DDR4
WarLegend.net a bénéficié d’une copie presse fournie par l’éditeur de ce jeu.
Dragon Ball Z: Kakarot est disponible sur PS4, Xbox One et PC.
J’ai commencé le jeu et je suis sur la saga Freezer, je suis content de lire que ça s’améliore un peut après.
Je pense que tu as tout bien résumé même si perso ayant grandi avec cette licence ma nostalgie lui aurait mis un peut plus ^^
J’ai bataillé corps et âme pour ne pas laisser la nostalgie prendre le pas sur mon test haha.
Mine de rien, quand tu as l’anime/manga d’origine en tête, les scènes du jeu arrivent quand même à te happer.