Plus de 2 ans après un Wildlands sympathique, mais non sans défauts, Ubisoft remet le couvert avec une suite, baptisée Ghost Recon Breakpoint. Ce nouvel opus, toujours basé sur la coopération, nous plonge cette fois-ci en plein Pacifique Sud, dans une contrée hostile remplie de soldats surentraînés, de drones implacables, de textures baveuses et de bugs en tout genre.
La menace fantôme
Après une bêta ouverte qui avait laissé de nombreux joueurs dubitatifs quant à la qualité finale du titre d’Ubisoft, Ghost Recon Breakpoint pointe enfin le bout de son fusil en direction des joueurs, pour un résultat des plus mitigés.
Laissant de côté les paysages ensoleillés de la Bolivie, Ubisoft nous emmène cette fois-ci dans un archipel lointain, situé au beau milieu du Pacifique sud. On incarne une nouvelle fois Nomad, leader d’une unité Ghost, qui va très vite se retrouver dans une situation pour le moins délicate.
On incarne une nouvelle fois Nomad, leader d’une unité Ghost.
Alors que vous êtes envoyé sur Auroa, siège de la société Skell Tech, pour enquêter sur la disparition mystérieuse d’un navire de guerre, votre escadron d’hélicoptères est abattu en plein vol par un essaim de drones particulièrement létal.
Tandis que vous tentez de rentrer en contact avec les autres survivants, ils sont assassinés par les Wolves, une unité d’élite dirigée par un Ghost renégat du nom de Cole D. Walker (interprété au passage par l’acteur Jon Bernthal qui joue The Punisher dans la série Netflix éponyme). Sans aucun contact avec l’extérieur, vous allez devoir survivre en territoire hostile, tout en levant le voile sur le mystère qui entoure Skell Tech et la trahison de Walker.
Un pitch de départ certes classique, mais qui souligne l’envie d’Ubisoft de nous proposer un opus plus orienté vers la survie. Une évolution logique pour une licence qui se veut réaliste et authentique.
On auroa pas le temps de souffler
Dans Breakpoint, votre personnage est lent et vulnérable. Il peut subir des blessures qui ralentiront ses déplacements et sa jauge de fatigue est là pour vous rappeler que vous n’êtes clairement pas dans un Assassin’s Creed. Vous allez devoir lutter contre des ennemis redoutables, mais également contre l’archipel lui même. Auroa est un gigantesque monde ouvert qui regorge de biomes différents. Jamais les pentes ardues, les régions enneigées et les marais vaseux n’auront paru aussi inhospitaliers.
Auroa est un gigantesque monde ouvert qui regorge de biomes différents.
L’immersion n’en est que renforcée et pousse le joueur à étudier son environnement. D’autant que les panoramas sont plutôt jolis si l’on met de côté certains effets de fading assez dégueulasses. L’exploration est d’ailleurs une composante essentielle de Breakpoint. Certes, vous pouvez simplement rusher l’histoire, mais vous passerez à côté d’une bonne partie de ce qu’offre le titre. De plus, chacune de vos escapades est régulièrement récompensée par des informations disséminées aux quatre coins de la carte, informations qui permettent de révéler l’emplacement de lieux importants, de schéma d’armes ou encore d’accessoires.
De plus, monde ouvert oblige, on retrouve bien évidemment la liberté d’approche qui a fait le succès de Wildlands, mais également les affrontements tactiques qui demanderont méthodologie et planification. On peut, par exemple, tirer sur les pneus des voitures pour éviter que celles-ci ne nous suivent, ou encore détruire les lumières afin de planifier une infiltration de nuit. Breakpoint se paie même le luxe d’ajouter l’une des meilleures mécaniques de la série : la possibilité de se camoufler dans le décor à la manière de Schwarzy dans le film Predator. Une mécanique très pratique contre les drones, mais surtout extrêmement immersive.
Ghost Recon Breakpoint aurait pu devenir une sérieuse alternative à la série des ArmA, si seulement Ubisoft n’avait pas décidé de saboter son propre jeu en le sortant 6 mois trop tôt et avec des choix de game design complètement absurdes.
Ghost Recon Brokenpoint
Car oui, vous pouvez très bien prendre tout ce que je viens d’écrire plus haut et l’envoyer valser à grand coup de rangers. N’ayons pas peur des mots, Ghost Recon Breakpoint est fini à la pisse. Que ce soit au niveau des animations, des collisions, de l’optimisation ou encore des contrôles, le titre est une véritable catastrophe. Le simple fait de monter sur un rocher peut devenir un pur calvaire, sans parler de la caméra qui change d’épaule en permanence, le personnage qui se met à couvert 1 fois sur 2 (pratique pour l’infiltration) ou encore les ennemis qui fixent les murs des bâtiments après vous avoir repéré.
Le titre est bourré de moments où vous allez avoir envie de vous facepalm la tronche à grands coups de parpaing. Je me souviens encore de la fois où j’ai tenté de récupérer une caisse planquée dans un bâtiment totalement fermé. Après en avoir fait le tour, je décide de m’allonger pour voir s’il n’y aurait pas une entrée secrète en dessous. Alors entrée secrète, j’en sais rien, mais je me suis retrouvé instantanément téléporté à l’intérieur, je venais littéralement de traverser le plancher. Alors oui, j’ai pu récupérer la fameuse caisse, mais j’étais également fait comme un rat — notre plus proche point de téléportation étant à des kilomètres.
J’ai alors demandé à mon camarade de chercher un moyen d’ouvrir de l’extérieur, et dans un élan de génie, il s’est allongé pour regarder sous le bâtiment. 2 secondes plus tard, on était 2 cons coincés à l’intérieur d’une cabane de 25m² avec comme seule solution de se faire exploser la poire à coup de C4. Un grand moment vidéoludique.
Un drone de mélange
Mais comme sortir un jeu totalement bugué du cul, ce n’était pas encore assez, Ubisoft a également décidé de trucider ce qu’il restait de la licence Ghost Recon à grands coups de MK48. Non content de nous avoir pondu un système de niveau dans Wildlands qui trahissait légèrement le côté tactique et réaliste de la série, Ubisoft s’est dit que ce serait bien de continuer à creuser dans cette direction.
De ce fait, Breakpoint reprend ce même système en y ajoutant, à coup de truelle, des niveaux pour les objets et du butin à foison (parce que c’est amusant de changer d’arme toutes les 30 secondes, hein Ubisoft). Le problème, c’est que contrairement aux autres Shooter Looters du marché, Breakpoint se heurte lui-même à son propre concept, car peu importe le niveau des ennemis, vous tuez toujours en un coup dans la tête. Alors, comment justifier le score d’objet de notre personnage ? Eh bien, en ajoutant des ennemis “sacs à PV” par l’intermédiaire des drones. Comme ça, si vous n’avez pas fait tout le contenu additionnel afin de monter votre équipement, vous ne pourrez tout simplement pas tuer certains ennemis comme les tanks Béhémoth ou, au pif, le boss final.
Vous vous êtes peut-être aussi demandé pourquoi Breakpoint demandait une connexion internet obligatoire, eh bien la réponse se trouve à Erewhon. C’est dans ce hub que vous croiserez des dizaines d’autres joueurs comme vous, apparemment seuls rescapés de leur escadron eux aussi. Des joueurs qui viendront s’agglutiner devant la seule boutique de la zone en spammant les emotes tels des joueurs de MMO devant l’hôtel des ventes de leur capitale.
À vouloir The Divisionner son jeu à tout prix, Ubisoft trébuche et dévale la pente du bon sens, tête la première.
Et c’est à ce moment-là que Breakpoint commence à se prendre les pieds dans le tapis. À vouloir The Divisionner son jeu à tout prix, Ubisoft trébuche et dévale la pente du bon sens, tête la première. Chacune des mécaniques du titre vient étrangement s’opposer à une autre. L’immersion tant mise en avant par Ubisoft disparaît aussitôt que l’on pénètre dans Erewhon. Le côté tactique de la série, pourtant extrêmement poussé, vient se heurter à des mécaniques de RPG malvenues et des bugs à foison. Et je ne parle même pas de l’exploration en véhicule qui devient un véritable calvaire, la faute à une physique totalement à la ramasse.
On finit incontestablement par se demander ce qui a bien pu passer par la tête d’Ubisoft lors du développement du jeu. Enfin, jusqu’à ce que l’on tombe sur l’onglet Boutique. Et là, tout devient étonnamment clair. La connexion obligatoire, la présence des joueurs dans le hub, les niveaux d’objets, l’artisanat, tout est pensé afin d’inciter les joueurs à dégainer la carte bleue. Alors certes, ce n’est pas la première fois qu’Ubisoft intègre une boutique dans un de leurs titres, mais ça n’avait jusqu’à présent jamais entaché l’expérience de jeu.
Tout est pensé afin d’inciter les joueurs à dégainer la carte bleue.
Fort heureusement, dans un élan de lucidité, Ubisoft a fait en sorte que le mode Ghost War (pvp) fasse table rase du score d’objet et permette à tout le monde de s’affronter sur un pied d’égalité, boutique ou pas. Mode Ghost War qui, d’ailleurs, ne compte que 2 modes de jeu en 4vs4 : Élimination et Sabotage. Le premier vous demandera simplement d’éliminer l’escouade ennemie pour remporter la victoire, tandis que le second reposera sur l’accomplissement d’objectifs. L’équipe attaquante aura pour mission de poser et défendre une bombe sur l’un des 2 emplacements prévus, pendant que les joueurs défenseurs devront, de leur côté, empêcher l’explosion. Il s’agit de loin du “meilleur” mode de jeu, le mode Élimination se résumant globalement à une partie de cache-cache plutôt molle du genou.
Cependant, tout n’est pas à jeter dans ce Ghost Recon Breakpoint, et il est possible de passer de très bons moments, plus particulièrement si vous jouez en coopération. L’arbre de compétences et les différents gadgets, par exemple, permettent de spécialiser son Ghost afin de l’adapter à son style de jeu. Il s’agit là d’un bon moyen de diversifier son expérience de jeu, tout en donnant la possibilité aux joueurs de créer de réelles synergies entre membres d’une même escouade. Même si, il faut bien l’avouer, le jeu reste assez facile dans son ensemble si vous optez pour la difficulté Standard.
En Extrême, c’est une autre histoire : les ennemis sont extrêmement vigilants et vous donneront du fil à retordre, vous obligeant à préparer votre approche avec minutie. Une approche qui finira probablement par foirer lorsqu’un de vos camarades aura la brillante idée de sauter en parachute, crachant son hélicoptère en plein milieu du camp… nan, je ne vise personne.
On a atteint le point de rupture
En définitive, résumer l’expérience Breakpoint n’est pas chose aisée, car le titre s’engouffre littéralement dans une spirale de contradictions. On retrouve bien évidemment le gameplay tactique et la liberté d’approche de Wildlands, saupoudré néanmoins de composantes MMO et RPG qui viennent littéralement rentrer en conflit avec l’ADN même de la série. De plus, redoutant probablement les grosses sorties de fin d’année, Ubisoft a eu la bonne idée de sortir son jeu beaucoup trop tôt. Le résultat est une énorme orgie de bugs qui ferait passer n’importe quel titre de Bethesda pour un exemple de finition. Non, Ghost Recon Breakpoint n’est clairement pas la suite tant attendue de Wildlands. Le titre vous fera peut-être passer de bons moments entre potes, mais au final, vous n’en garderez comme souvenir que le reflet d’un énième jeu générique sans âme ni personnalité.
► Points forts
- De jolis panoramas
- La liberté laissée aux joueurs
- Le camouflage à plat ventre
- Un jeu pensé pour la coopération
- Une tonne de contenu
- Drôle malgré lui
► Points faibles
- Une technique inégale
- Des bugs à foison
- Animations rigides pour du Ubisoft
- Un scénario peu inspiré
- La connexion obligatoire
- Les ennemis “sac à PV”
- Beaucoup trop de loot
- Pas de PNJ alliés en solo
- IA aux fraises
- Les microtransactions
- La conduite des véhicules immonde
- Le hub principal, un calvaire
Un jeu qui porte bien son nom
Configuration de test :
- GPU : GTX 1080
- CPU : AMD Ryzen 5 1600X 3.90Ghz
- RAM : 16 Go DDR4
- Installé sur SSD
WarLegend.net a bénéficié d’une copie presse fournie par l’éditeur de ce jeu.
Ghost Recon Breakpoint est disponible sur PC, PS4 et XB1.
J’ajoute mon petit grain de sel : ce jeu est effectivement proposé dans un état honteux, avec à sa base la volonté de mettre en avant les microtransactions. C’est vrai que ça a cartonné pour Star Wars Battlefront 2, autant s’inspirer des succès. On n’en est pas à ce point, mais de gros soucis viennent de là : quand on construit un jeu dans le mauvais sens, ça génère forcément quelques problèmes. À jouer en coop exclusivement, et encore nous on s’est marré à faire les cons et mater des bugs. C’est cher payé pour ça, d’autres le font pour moins de 5 balles.