Paradox Interactive sort un nouveau jeu, c’est tous les amateurs de Grand Strategy qui sont aux anges. Cette fois, le studio s’attaque à la Rome antique avec Imperator: Rome.
Res Publica Romana
Les jeux de Grand Strategy ne sont clairement pas faits pour les estomacs fragiles, et Paradox s’en est fait une spécialité. Après le moyen-âge, la Renaissance, la Seconde Guerre mondiale et la conquête galactique, le studio suédois s’est dit qu’il serait intéressant de revenir un peu plus loin du temps. L’Antiquité et tous les empires qu’elle a vus naître semble parfaite pour le job.
Imperator: Rome se déroule alors en 304 av. J.-C., soit 450 ans après la fondation de Rome. Chaque partie dure 300 ans et donnera l’occasion de réimaginer l’Histoire selon ses désirs et ses actions en prenant la tête d’une des grandes puissances de l’époque… ou d’une simple petite tribu qui vit sa petite vie avant de se faire manger par une plus grosse.
L’action se déroule principalement en Europe et au proche orient, la Méditerranée étant le centre du monde de cette époque. Rome n’est pas encore la grande cité-État qui marquera l’Histoire et Alexandre le Grand vient de mourir laissant un vaste empire très divisé. Les nations jouables vraiment intéressantes se comptent sur les doigts d’une main, mais le contexte historique est réellement passionnant et fidèlement retranscrit.
La carte du monde est plutôt jolie et vraiment engageante, bien que très intimidante avec ses centaines de régions et territoires à conquérir. Même en ayant un certain bagage culturel, il n’est pas impossible d’apprendre un truc ou deux sur l’époque. On peut remercier la traduction française de qualité (mais pas infaillible) pour se plonger plus facilement dans l’Antiquité.
Je suis venu, j’ai vu, et je n’en crois pas mes yeux
Le titre ressemble beaucoup à un Crusader King ou un Europa Universalis : des menus de partout, des statistiques dans tous les sens, des milliards de paramètres à prendre en compte avant de faire la moindre petite action et un peu d’austérité pour faire bonne figure. Autant dire que si on n’est pas habitué à ce genre de jeu, on finit vite noyé sous la masse d’informations qui nous tombe sur le coin de la gueule, mais le plaisir de la découverte se trouve également un peu là.
Il y a bien un tutoriel pour apprendre les bases, mais après nous avoir expliqué rapidement quelques concepts, ce dernier termine avec un “farfouille un peu partout et tout devrait bien se passer” avant de partir en nous faisant un bisou sur le front. Certaines tâches demandées mériteraient de meilleures explications, mais on se rend vite compte que c’est fait un peu exprès.
C’est à force d’explorer les menus contextuels qu’on apprend et qu’on retient les informations importantes. Bon, c’est loin d’être parfait parce qu’il manque certaines notions vitales pour tout maîtriser, mais à force d’acharnement et de curiosité, ça passe.
Cependant, l’interface n’est vraiment votre allié pour tout comprendre. Si les différents menus sont plutôt explicites avec des infobulles qui se révèlent être indispensables, certains pourraient penser que de grosses améliorations devraient être apportées à ce niveau, notamment sur la carte du monde quand un filtre d’information est activé.
Une fois qu’on a compris comment retrouver les infos qui nous intéressent, il est temps d’en faire quelque chose.
Socialis scala
Après avoir dompté le côté a priori très austère de la gestion du pays, on a tous les outils auxquelles on peut s’attendre d’un jeu Paradox Interactive.
Si le développement et les campagnes militaires sont quand même en vogue à cette période de l’Histoire, on se retrouve avec énormément d’autres facettes de sa nation à gérer. Tout y passe : la politique intérieure, la croissance démographique, la taille et les droits des différentes castes sociales, les routes commerciales, la religion, les avancées sociétales et technologiques, la fatigue de la guerre, etc.
Toutes n’ont pas vraiment d’impact vraiment marqué, comme la religion qui n’est qu’un moyen d’octroyer quelques bonus bien ciblés, mais dans l’ensemble on a vraiment l’impression d’être à la tête d’un pays avec tous les enjeux et les problématiques que cela implique. Pour peu qu’on arrive à se plonger dans les nombreux chiffres et leur signification, on s’y croit.
Le jeu n’oublie pas d’être vivant également, avec des événements aléatoires qui varient selon la nation jouée. Il faudra faire attention aux différentes familles qui font vivre la vie politique du pays et s’assurer qu’elles ne manquent de rien. Si elles se sentent lésées, elles peuvent tenter de foutre le boxon et de déstabiliser le pays. S’il se trouve qu’un personnage illustre déloyal est à la tête d’une armée, attendez-vous à la voir se retourner contre vous.
Tout un tas d’outils permet de contrôler ce genre de déconvenue, comme nommer des personnalités à différentes fonctions ou bien tenter de les soudoyer ou bien vous lier d’amitié avec les personnages déloyaux. Faire enfermer la femme d’un opposant peut être un bon moyen de pression également. Laissez parler votre créativité.
La démocratie républicaine, c’est sympa, mais si vous en avez marre d’entendre vos sénateurs se plaindre, vous pouvez opter pour une dictature ou une monarchie. On vous cassera moins les pieds, mais ces modes de gouvernements offrent leurs propres défis.
Cependant, il y a quand même un souci qui me chiffonne à propos d’Imperator: Rome, c’est qu’on sait pas trop qui on incarne. Selon le dirigeant de la nation que l’on contrôle, peu de choses changent, si ce n’est quelques bonus apportés par la partie politique au pouvoir. La stratégie du joueur change peu et cela n’impacte pas vraiment les décisions à prendre (gros problèmes imprévisibles à part qui peuvent déstabiliser le pays). Votre dirigeant peut être assassiné, mais on continue à jouer quand même. À croire que c’est le pays qui a une volonté propre. C’est beau quand on y pense, mais il faut quand même passer outre ça. C’est un aspect qui aurait pu être importé de Crusader Kings.
De plus, les fameux événements ne sont pas toujours logiques, puisqu’il m’est arrivé une fois qu’un sénateur se noie sous les louanges d’un peuple en liesse, pour que deux jours plus tard, on me dise qu’il est connu pour être égoïste et corrompu. Il y a des choses à améliorer à ce niveau-là. Tout de même, certains effets boule de neige offrent de sacrés moments narratifs systémiques.
Rome n’a pas mis la misère au monde en un jour
L’aspect militaire du titre se fond parfaitement avec toutes les autres mécaniques de jeu, mais prend un certain temps d’adaptation pour déceler toutes les subtilités (comme le reste du jeu, en fait).
Contrairement à un Total War, il n’est pas question de micro gérer une bataille après que deux armées se soient rencontrées, mais de donner des instructions selon la composition de son armée et de celle d’en face pour obtenir de puissants bonus de dégâts. Il faut également ne pas oublier la nature du terrain, le moral des troupes, le général à la tête et les capacités de ravitaillement de la région pour ne pas subir l’attrition, voire même la météo.
Quand votre empire commence à être bien trop gros à gérer, vous pouvez tout à fait automatiser le comportement d’une armée, histoire de ne pas à gérer la protection aux frontières ou bien optimiser la conquête des différentes provinces d’une région à annexer. Oh, et on prend soin de ses armées, parce qu’un contingent de légionnaires, ça ne se monte pas comme ça.
La diplomatie est alors capitale à gérer, puisque la guerre, c’est sympa, mais ce n’est pas du goût de vos citoyens qui vont finir par se lasser. On ne conquiert jamais une province sans raison, sinon votre score de tyrannie augmente et vos voisins vont tenter de se liguer contre vous pour vous remettre à votre place.
Développer son économie tout en conquérant la Méditaranée est un beau défi. On regrettera juste que l’IA ne brille pas spécialement. Si elle ne fait pas de vraies bêtises, elle ne se démarque pas non plus par des stratégies incroyables. Pour régler ça, il y a donc le multijoueur. Il est conseillé d’avoir des copains dans le même délire que vous, mais vous risquez de passer de très bons moments à base de coups de couteau dans le dos. C’était un peu ça la politique en 300 ans av. J.-C. Étendu sur un weekend avec un peu de pizza et de bière, c’est parfait.
Ils sont fous ces Romains
Imperator: Rome est déjà un bon jeu signé Paradoxe Interactive avec beaucoup de choses à apprendre et à maîtriser qui peut vous tenir en haleine pendant pas mal d’heures. Certains aspects sont un peu trop survolés et d’autres font peu sens, mais on aime l’exhaustivité des choses à gérer. Seulement, après avoir maîtrisé tous les aspects du titre et avoir touché aux différentes nations principales, on tourne en rond un peu trop facilement. Cependant, connaissant le studio, le titre ne va sûrement pas s’en tenir là et de nombreuses mises à jour gratuites (et payantes) sont sûrement d’ores et déjà en route.
► Points forts
- Le contexte de la Rome Antique immersif
- Une carte gargantuesque
- Être à la tête d’un empire complexe et vivant
- Conquêtes militaires et diplomatie font bon ménage
- Le système de génération des personnages
- De la narration qui nait du gameplay
- Bonne ambiance sonore
► Points faibles
- Le tutoriel qui vous lâche un peu trop vite
- De nombreux facteurs qui n’ont pas l’impact qu’on aimerait
- Combats navals inintéressants
- Les traits des personnages sous-exploités
- Certaines informations importantes sont dures à atteindre
- Mais, on contrôle quoi, au juste ?
Alea jacta est
War Legend a bénéficié d’une copie fournie par l’éditeur de ce jeu.
Configuration de test :
- GPU : NVIDIA RTX 2080 Ti
- CPU : Intel i9 9900k
- RAM : 32 Go
- Installé sur SSD
Imperator: Rome est disponible sur PC, Mac et Linux.
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