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Plus de deux ans après son financement sur Kickstarter, le RTS qui prend racine dans l’univers alternatif de 1920+ imaginé par Jakub Różalski, Iron Harvest est enfin disponible. Est-ce que le titre n’est qu’un Company of Heroes avec des mechas ? Il y a plein d’idées intéressantes en rab’, mais les boulons ne sont pas assez serrés pour que le bouzin ne casse pas la figure au bout de deux pas.
MechWarrior 1920+
Vous ne connaissez peut-être pas Iron Harvest, mais il se peut que vous soyez familier avec son univers, sobrement baptisé 1920+. Un univers étendu qui a débuté en 2014, alors que Jakub Różalski s’amusait à dessiner des robots géants Dieselpunk dans des peintures impressionnistes, représentant la campagne d’Europe de l’Est. Le monsieur ne s’est pas douté de l’engouement qu’un un tel mélange des genres provoquerait.
Impressionné par les travaux de l’artiste polonais, Jamey Stegmaier le contacta pour créer Scythe, un bijou de jeu de plateau stratégique qui donna vie à cet univers, où Różalski a pu librement exprimer son art à travers de nouveaux dessins. Il ne manquait plus grand-chose pour que 1920+ prenne vie via un autre média : le jeu vidéo était tout trouvé. En 2018, King Art Games (The Dwarves) lance alors un Kickstarter : Iron Harvest. C’est financé, objectif accompli. J’ai même donné de l’argent, tiens !
Dans le monde de 1920+, la révolution industrielle a eu un tournant encore plus spectaculaire et la Première Guerre mondiale s’est réglée à coups de mechas mortels et aux formes diverses. La Révolution d’octobre n’a pas eu lieu et Nicolas II est toujours Tsar de Russie… ou plutôt, L’Union Rusviet. Le second Reich devient la Saxonie et la Pologne Polonia essaie de survivre tant bien que mal entre ces deux superpuissances qui se regardent en chiens de faïence. On est face à un univers alternatif où tout est familier et étranger à la fois, et c’est bigrement intéressant.
Man vs. Machines
Il n’y a pas à dire, la direction artistique héritée des travaux de Różalski défonce. Chaque faction possède sa personnalité propre et les mechas sont terrifiants sur le champ de bataille, grâce à de très jolies animations qui donnent un réel sentiment de puissance à ces machines d’acier sur pattes, détruisant couvertures et maisons qui auraient l’audace d’être sur le passage. Oui, une maison, ça ose tout. J’ai eu un rictus quand j’ai vu que les ondes de choc des canons pliaient les hautes herbes à proximité.
Il n’y a pas à dire, la direction artistique héritée des travaux de Różalski défonce.
Et au milieu de ça, on retrouve l’infanterie qui fait son maximum pour survivre. Les débuts de parties ressemblent beaucoup à du Campany of Heroes, première inspiration évidente dans le gameplay : système de couvert et ressources périodiques à base de captures de points. Il existe beaucoup de types d’infanteries différents, et la bonne idée est de pouvoir récupérer le matériel laissé par les morts pour changer leur classe à la volée: grenades, lance-flammes, canons anti-mechs, ingénierie, etc, communes à toutes les factions.
Le souci, c’est que dès que les mechs s’en mêlent, vos petits bonhommes que vous placez de façon soignée sur le champ de bataille afin de couvrir leurs flancs se font bolosser comme jaja. Il y a un réel problème d’échelle avec Iron Harvest et les véhicules sont tout simplement trop puissants. De même, il y a tellement de spécialités d’infanterie qu’il y a une chance sur deux que vous n’ayez pas la bonne pour contrer cette d’en face, et vous passerez le plus clair de votre temps à marteler la touche de retraite pour vous refaire une santé. Les soldats ne serviront alors qu’à capturer et protéger les points, point.
Dès que les mechs s’en mêlent, vos petits bonhommes que vous placez de façon soignée sur le champ de bataille se font bolosser comme jaja.
Iron Harvest vous invite pourtant à prendre soin de vos unités, puisque les niveaux d’expérience permettent de débloquer des compétences vraiment intéressantes (et pas trop nombreuses, parce que le micromanagement, ça va deux minutes), mais j’ai toutes les peines du monde à mener une tactique sans accrocs. Je suis peut-être mauvais, mais le jeu passe son temps à vous punir au lieu de vous laisser l’occasion de vous adapter.
L’autre problème vient du fait que les unités ont autant d’instinct de conservation qu’un bébé de deux ans sur le point de mettre ses doigts dans la prise électrique. Il arrive régulièrement qu’une unité ne riposte pas sous le feu ennemi, et vue la durée de vie d’une unité d’infanterie, on aurait apprécié qu’elle se mette à couvert quand ce dernier est proche. Quelques soucis de pathfinding et de temps de réaction aux ordres vous feront souvent criser.
Quelques soucis de pathfinding et de temps de réaction aux ordres vous feront souvent criser.
Pourtant, les différentes factions sont plutôt bien équilibrées, avec une belle variété de méchas aux forces et faiblesses bien claires, mais qu’est-ce qu’ils sont lents… Le jeu n’a jamais eu pour vocation d’être rapide, et leur vitesse met bien en avant leur capacité de destruction, mais c’est généralement celui qui a apporté le plus gros calibre qui gagne la rencontre, parce qu’une fois engagé, il est difficile de changer de tactique. Et encore, on parle de cas où votre gros mécha n’arrive pas après les premiers affrontements, où il aurait été très utile il y a 2 (véritables) minutes.
L’Esprit de la machine
De son côté, le mode campagne se donne beaucoup de mal pour raconter une histoire : scènes cinématiques en jeu ou cutscenes avec le moteur du titre, la qualité est très inégale et nous donne l’impression que le studio aurait limite dû trouver une autre solution. Ça se laisse regarder, mais on oscille entre le tout juste correct et le vraiment vilain.
Les trois campagne se suivent et offre un scénario global sympathique mais sans plus, avec des protagonistes qui possèdent chacun des animaux uniques pour toujours plus de classe. Encore une fois, on apprécie l’univers d’Iron Harvest pour sa substance et l’imaginaire qu’il stimule, pas vraiment pour son lore.
On apprécie l’univers d’Iron Harvest pour sa substance et l’imaginaire qu’il stimule, pas vraiment pour son lore.
Même si les missions de la campagne tentent certains trucs intéressants, comme balader un train blindé à protéger (mais également utile au combat) à travers une carte, la résistance offerte par l’IA est ahurissante. Encore une fois, je peux être mauvais (à force de me plaindre, j’ai l’impression d’être passé à côté d’un truc), mais l’ennemi inonde le joueur de vagues incessantes sans aucun moyen de respirer. On cherche désespérément les moments pour se regrouper afin d’organiser une contre-attaque et s’atteler aux objectifs. Il y a un énorme problème de rythme et il m’est déjà arrivé de passer deux heures sur une seule mission, à galérer toujours sur les mêmes pcches de résistance (sans pour autant perdre).
Pire exemple : sur le point de détruire le dernier objectif de la mission, un amas entier de forces ennemies est apparu de nulle part… directement sur mes troupes. Je peux vous dire que j’ai tiré une sacrée tronche ; je n’avais pas besoin de ça. La preuve que l’IA triche et ne se sert pas de l’économie de la carte pour générer ses unités. Idem pour le mode survie qui est absurde, tant il est impossible de reconsolider ses forces entre deux vagues, même en facile, et sans malus. J’ai transpirais moins sur le ladder de StarCraft II, et j’étais Gold.
Par contre, en mode escarmouche (qui permet de gagner des points d’expérience de compte en acceptant des défis), c’est une autre histoire, car l’IA est incapable de réagir correctement à vos décisions stratégiques, vous laissant volontiers les objectifs jusqu’à ce que vous obteniez assez de points de victoire pour l’emporter. C’est dommage, parce que sur le papier, le titre semble très intéressant en multijoueur, mais il faudra prendre le temps de poncer cet aspect pour voir si le gameplay global tient vraiment debout, ou si je m’énerve tout seul dans mon coin depuis plusieurs jours.
Plus ils sont grands…
Iron Harvest possède une réalisation très solide qui aurait pu lui permettre de se hisser en haut du panier, mais des soucis d’équilibrage, de game design et de finition l’empêchent d’achever pleinement son potentiel. Toutes ses idées sont bonnes, mais seulement quelques-unes fonctionnent. Pourtant, commander des mechas du début du siècle à travers le champ de bataille et contempler la désolation qu’elles laissent derrière elles est un vrai plaisir en soi qui rend la chose encore plus dommageable. On attendra volontiers les mises à jour à venir, parce que j’ai réellement envie d’aimer ce jeu de tout mon être.
Ce qu’on a aimé :
- Une direction artistique de haute volée
- Le chaos est jubilatoire
- De nombreuses options tactiques…
- Plein de modes de jeu et défis
Ce qu’on n’a pas aimé :
- … peut-être trop pour être carré
- La puissance brute l’emporte sur la tactique
- Des soucis de level design pour la campagne
- L’IA des unités est parfois crispante
- L’IA ennemie aussi, tiens
- Pas mal de bugs gênants
- Des cinématiques vraiment pas belles
Ce jeu est fait pour vous si :
Vous désirez un héritier de Company of Heroes avec un contexte original et prenant.
Ce jeu n’est pas fait pour vous si :
Vous n’aimez pas qu’un jeu propose des options de gameplay finalement inutiles.
WarLegend.net a bénéficié d’une copie presse fournie par l’éditeur de ce jeu.
Configuration de test :
- GPU : NVIDIA RTX 2080 Ti
- CPU : Intel Core i9-9900k
- RAM : 32 Go DDR4
- Installé sur SSD
Iron Harvest est disponible sur PC et le sera à une date ultérieure sur Xbox One et PlayStation 4.