Il est assez rare d’avoir l’occasion de pousser un grand “cocorico !” et de mettre les mains sur un jeu édité et développé par des Français. Bénéficiant d’un concept intéressant et d’une patte graphique léchée, Masters of Anima s’inspire de concepts précédemment explorés, mais quid de son identité propre ?
La science golémique, c’est pas Ottomatique
Masters of Anima commence en vous mettant dans la peau d’Otto, un apprenti aspirant au rang de maître de l’Anima. Mais l’Anima, kézako ? Dans le monde de Spark, les golems et les gardiens se livrent bataille pour le contrôle de la région et du mont Spark. Un monde à la fois mécanique et merveilleux qui voit s’affronter des golems massifs (les méchants) et des gardiens (les gentils), créatures plus modestes invoquées justement par les maîtres de l’Anima.
Golems et gardiens obéissent au doigt et à l’œil de leurs créateurs, qu’ils soient bien intentionnés ou non. C’est un peu l’équivalent de Matrix avec des golems (et un peu plus d’imagination).
Seulement Otto, qui parle avec un charmant accent écossais, ça ne le botte pas vraiment de contrôler des gardiens. Alors qu’il échange avec sa dulcinée Ana, le devoir l’appelle et il se traîne péniblement vers le temple de Maître Jahku pour parachever sa formation. L’occasion de se familiariser avec la base du jeu: on invoque des gardiens, on leur demande de pousser une statue histoire de dégager le passage et on leur ordonne d’attaquer des mannequins. Un tutoriel sommaire et efficace.
Et là, en plein entraînement, le maléfique Zahr invoque de puissants golems pour venir perturber la formation à peine achevée du jeune Otto. Le temps de rentrer chez lui, le vil félon a déjà capturé la promise d’Otto, Ana, en emprisonnant son âme, son esprit et son corps à différents endroits de Spark. Commence alors une quête enchanteresse pour récupérer la bien-aimée du héros des griffes de Zahr.
Le jeu jouit d’un certain cachet grâce auquel le joueur parvient à s’attacher à Otto et Ana.
Même si le scénario est très convenu, le jeu dispose d’un univers graphique très agréable et surtout d’une écriture très inspirée qui nous font apprécier les quelques phases narratives. Il jouit d’un certain cachet, couplé à un univers très féerique, grâce auquel le joueur parvient à s’attacher à Otto et Ana. Les personnages charismatiques, qui ne manquent pas d’humour, sont superbement doublés (en anglais uniquement).
Pas de détente pour les gardiens
C’est là que commence véritablement l’aventure d’Otto. Notre héros met les mains dans le cambouis et alterne de petites énigmes et les affrontements contre les golems invoqués par Zahr. Les phases d’énigmes sont très proches de ce qu’on pourrait retrouver dans un Pikmin. Vous pouvez envoyer vos sbires détruire des pierres pour libérer un passage ou bouger ces dernières pour en créer un. Plus tard dans le jeu, les différentes formes de gardiens (5 au total) viennent poser de nouvelles énigmes, telles que la traversée de zones que seuls certains golems peuvent éclairer, ou encore la création d’abris pour vous frayer un passage.
Des énigmes simplistes et peu intéressantes dans l’ensemble. Heureusement, la superbe direction artistique et le level design astucieux sauvent ces phases de jeu de l’ennui.
Si certains gardiens meurent pendant votre traversée du désert ou suite à un effondrement de rochers malvenu, qu’à cela ne tienne. Otto n’a qu’à en recréer de nouveaux jusqu’à remplir la limite. Comment faire ? Avec de l’anima pardi ! L’anima dans le monde de Spark, c’est comme les boulons dans les jeux MECANO, il y en a PARTOUT. Merci donc à tous les vases qui jonchent les montagnes de Spark et qui, une fois brisés par Otto, vous apportent le précieux anima nécessaire à la création de gardiens.
Les énigmes simplistes sont sauvées par une superbe direction artistique et un level design astucieux
Masters of Anima n’a clairement pas été conçu comme un jeu d’énigmes et ça se voit. La progression dans les niveaux est plutôt bien rythmée et le jeu introduit de manière graduelle de nouvelles subtilités pour casser la monotonie des énigmes. Une petite course contre le temps dans une grotte qui s’effondre par ci, une petite collecte de perles dans un niveau plus ouvert par là…
Les niveaux sont assez réussis dans l’ensemble et variés des points de vue graphique et mécanique. On pourra regretter la linéarité de certains niveaux, même si cela est contrebalancé par une exploration gratifiante. En effet, trouver des fragments d’anima permet d’augmenter sa réserve et donc d’augmenter son nombre maximal de gardiens.
Golems de jade
Mais voir ses gardiens tomber comme des mouches n’est pas réservé aux phases d’exploration. Préparez-vous à en perdre une multitude dans les combats. En effet, les premiers combats peuvent paraître à la fois déroutants et très intuitifs. Je m’explique : on est très vite confronté à deux voire trois golems dans des arènes closes et c’est ensuite à nous de les gérer au mieux à travers la micro gestion, comme dans un Overlord. Cependant, le nombre de gardiens que l’on peut contrôler grimpe très vite et il est presque impossible de garder un œil sur 70-80 gardiens durant un combat. Et même si le jeu est très intuitif, l’action est souvent assez confuse.
Les premiers combats sont toutefois très abordables. Le petit nombre de gardiens vous permet de vous familiariser à la micro gestion. Vous devrez à la fois diriger vos gardiens vers les golems adverses et les garder en mouvement pour les protéger des attaques de zone des ennemis. L’ensemble est très maniable (si vous personnalisez les contrôles sur PC) au clavier-souris et à la manette, tant que vous n’avez pas une multitude de gardiens à surveiller.
Il faut toutefois un certain temps d’adaptation, surtout à la manette, car le combat nécessite une gymnastique des doigts assez précise si vous voulez minimiser vos pertes. D’ailleurs, le jeu a la désagréable habitude de noter tous les combats et de nous dire : “Eh regarde t’as perdu trop de golems et t’as vraiment traîné sur ce combat”. Si vous êtes complétiste, les combats de Masters of Anima peuvent vous pousser dans vos derniers retranchements. Personnellement, je me contentais de tuer ces maudits golems.
Les combats sont longs. Très longs, trop longs.
Là où le bât blesse, c’est que les combats sont longs. Très longs, trop longs. En soi, le jeu n’est pas difficile, car il est rare de tomber à court d’anima, mais les ennemis sont de véritables sacs à PV. Si vous avez le malheur de vous faire déchiqueter un régiment de gardiens, le temps nécessaire pour remplir à nouveau son armée peut être assez long. En résultent des combats qui traînent en longueur et qui sont en plus cloisonnés, c’est-à-dire que les ennemis vous attaquent dans une zone précise de laquelle vous ne pouvez vous échapper.
Autant vous dire que si vous êtes confrontés à trois golems, il est préférable de la jouer tactique et de concentrer vos forces sur un en particulier pour écourter le combat. Autre conseil : usez et abusez du cri de guerre d’Otto, qui permet d’améliorer l’attaque de vos gardiens ou de contrer une attaque ennemie.
Les combats deviennent vite une petite corvée et souffrent du manque de variété des ennemis. Ils sont aussi gâchés par les comportements agaçants de vos gardiens. En effet, les nouveaux gardiens n’attaquent pas automatiquement la cible la plus proche. Résultat: il n’est pas rare de se retrouver avec quelques troufions tire-au-flanc qui vous suivent bêtement tant qu’ils n’ont pas reçu d’ordre. De même, lorsque vous les éloignez du danger, il arrive que ces idiots se remettent à charger un golem enragé du fait qu’ils ne sont pas suffisamment loin du combat pour ne pas y retourner tête baissée.
Penalty j’souris aux gardiens
Il ne faut pas enlever à Masters of Anima la dimension stratégique des combats. Car même si ceux-ci se révèlent très confus, il ne suffit pas d’envoyer le paquet dans un golem pour en triompher. Il y a un équilibre à trouver entre dégâts infligés et anima récupéré. Ce serait ballot de vous retrouver, comme moi, à court d’anima et donc cul nu face aux golems.
Car oui, Otto peut attaquer, mais vous feriez mieux de protéger ses fesses, car pas d’Otto, pas d’Anima. Au passage, distribuer les points de compétences à Otto est totalement inutile lorsque vous avez la possibilité de le faire évoluer. Il faudrait vraiment que vous le fassiez exprès pour que ce joyeux luron meure. Prenez plutôt soin des gardiens et contentez-vous de taper les golems lorsque vous avez gagné le combat.
Finalement, même si Masters of Anima ne brille pas par ses combats, il demeure un jeu fort agréable à parcourir. Au cours des huit heures approximatives qu’il vous faudra pour finir le jeu (une douzaine pour le 100% en ligne droite), on s’ennuie rarement et c’est bien là l’essentiel. Nul doute que la charmante direction artistique et l’écriture astucieuse (surtout les dialogues entre les différentes parties d’Ana) contribuent au charme de ce jeu imparfait, mais très attachant de par son univers enchanteur. Toutefois, je ne peux m’empêcher de penser que le jeu aurait gagné à avoir des combats plus variés et un nombre de gardiens plus faible.
►Points forts
- Superbe direction artistique
- Écriture inspirée
- Univers féerique
- Prise en main rapide et intuitive
- Commandes personnalisables
- Des niveaux variés
- Bien rythmé et long comme il faut
- Combats stratégiques
►Points faibles
- Énigmes simplistes
- Combats confus et trop longs
- Manque de variété dans les combats et les ennemis
- Comportements étranges des gardiens
- Scénario un peu convenu
Otto, passion invocation
Testé sur PC. WarLegend a bénéficié d’une copie du jeu fournie par l’éditeur.
Masters of Anima est disponible sur PC, PS4, Xbox One et Switch.
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