Il y a quelque temps, Konami se séparait de Kojima, créateur de la licence Metal Gear Solid, dans des conditions loin d’être claires. Pour autant, l’entreprise japonaise n’avait aucune intention de lâcher cette série et c’est avec fierté qu’elle annonçait par la suite l’arrivée de Metal Gear Survive, spin off de Metal Gear Solid V dans lequel nous incarnons un homme de Big Boss censé friter du zombie, un virage à 90°… droit dans le mur ?
Tuer la poule aux œufs d’or et violer le cadavre
Autant le dire immédiatement et sans détour : le nom “Metal Gear” n’a rien à foutre ici. Nous sommes dans le cas de figure de ce qu’on appelle une décision marketing – reprendre une marque connue pour inciter le consommateur à l’achat.
Metal Gear Survive vous offre quelques images de Big Boss et Metal Gear Solid V sous un angle particulier et en profite pour vous présenter sa propre histoire. Enfin histoire, il faut le dire vite… Et puis à partir de là tout part en cacahuète grillée à sec avec supplément de sel.
Vous vous êtes fait arracher le bras en vous battant pour Big Boss, mais un type du nom de Goodluck, interne à l’organisation, décide de vous envoyer dans un monde parallèle pour affronter les errants (ce sont des zombies hein) afin de sauver le monde.
Le nom “Metal Gear” n’a rien à foutre ici.
En effet, il semblerait que ces petits rigolos créent des trous de ver et menacent d’envahir notre planète. Et pour vous persuader de vous battre pour lui, il vous a infesté du parasite des errants, ce qui fait que pour trouver un remède, vous devez chercher la source du problème.
Le tout saupoudré de références plus ou moins grossières à l’univers Metal Gear Solid histoire de bien rappeler que vous vous y trouvez. Ce qui n’est pas con puisque vous allez oublier, croyez-moi.
L’incrust’ de Citizen Erased :
Si vous êtes fan de la saga comme moi, vous avez déjà eu quelques hauts le coeur à l’annonce de Metal Gear Survive. Un Metal Gear sans la patte de Kojima, c’est comme imaginer… euh… enfin, c’est inimaginable, quoi.
À part votre background de soldat de Diamond Dogs et quelques clins d’oeil sans subtilités à l’univers de Metal Gear (comme une infirmière avec le visage de Quiet, sans explications), on n’y fera quasiment plus jamais référence dans la narration du jeu. Les scènes cinématiques faussement inspirées par la cinématographie de Kojima ne rendront également jamais hommage à l’héritage de la série. Oh, et dites adieu aux discussions philosophiques qui façonnent également son identité.
Seul l’aspect visuel de MGS 5 est réellement mis à profit, quitte à copier/coller beaucoup d’éléments.
Encore une œuvre à rajouter au CV de David Goodenough
David Goodenough est un personnage de la chaîne Joueur Du Grenier
Enfin je crois, parce qu’avec la narration radicalement foirée, j’avoue ne pas bien savoir exactement de quoi il retourne. Pour tout vous dire, au début, j’ai cru que mon personnage n’était pas entré dans le trou de ver qui avale la Mother Base.
Le problème, c’est que TOUT le jeu est comme ça et l’histoire est bourrée d’incohérences que je vous épargnerai afin de vous éviter de spoil mais concrètement, l’emmental a moins de trous.
Les personnages sont très mal écrits et ont la profondeur de personnalité d’un poulpe sous valium.
Et les dialogues… Seigneur les dialogues… les personnages sont très mal écrits et ont la profondeur de personnalité d’un poulpe sous valium :
- Reeve qui joue les gros bras, mais fait mine de cacher une sensibilité que sa surdose de testostérone lui empêche visiblement d’envisager (ce n’est pas caricatural ça, tiens !)
- Miranda l’infirmière complètement frappée du bulbe qui veut tenter de soigner les errants ou communiquer avec eux – meuf, ils n’ont PLUS DE TÊTE ! Et toi t’es infirmière ! Cohérence +1000.
- Nicholas, un mec qui te dit sans ciller que “tout va bien parce que c’est un rêve“, mais que bon à la rigueur, même si c’est réel tant mieux parce que c’est cool…
- Et il y en a d’autres ! Tous n’ont pas de nom d’ailleurs, pourquoi s’embêter ? Si on peut leur filer des pseudos génériques… Moi j’aurais voté pour un code-barre tant qu’à faire.
L’incrust’ de Citizen Erased :
Oh mon dieu que c’est très mal écrit. Ne jouez pas à Metal Gear Survive pour ses personnages ou son scénario.
On sait que Kojima en fait parfois (vraiment) trop pour avoir une histoire riche et complexe, mais même Platinum Games a réussi à en faire 1000 fois plus avec Metal Gear Rising qui est un jeu d’action pur et dur.
Rigidité cadavérique
Pour ce qui est des graphismes, on reprend le moteur de MGSV. Le Fox Engine a bien vieilli et le rendu est plutôt correct, mais Konami aurait pu faire des efforts sur les animations et les faciès des personnages.
Ces derniers ont du mal à traduire des émotions (enfin sans que ça fasse rire, s’entend), et pour ce qui est des animations… eh bien disons que je n’aimerais pas être à la place des rescapés que je ramène au camp parce qu’un sac à patates serait probablement traité avec plus de soins.
Les environnements sont correctement réalisés, mais ceux de jungle sont plus marquants. Pour ce qui est du début du jeu, le paysage désertique semble un peu trop uniforme, mais les ruines viennent rehausser le tout en toute cohérence.
Au-delà de ça, la direction son est correcte au niveau des bruitages et la musique fait son travail. En revanche, s’il était possible de modifier voire retirer les marques de satisfaction très sonores de notre personnage lorsqu’il boit ou mange quelque chose qui lui plaît à un niveau… jouissif, cela nous éviterait de nous imaginer dans Metal Jouir, remake porno bas de gamme qui j’en suis sûr existe ou viendra à exister.
L’incrust’ de Citizen Erased :
Si Metal Gear Survive est plutôt joli, cela confirme l’envie qu’a eu Konami de créer un jeu à partir du Fox Engine qui était déjà prêt à l’emploi. Que ce soit pour la partie technique ou le gameplay, un jeu AAA sans aucun effort.
Ça partait bien pourtant
Côté gameplay, Metal Gear Survive n’a pourtant pas à rougir au premier abord. Les affrontements se révèlent sympathiques et les mécanismes du jeu de survie sont très bien maîtrisés par Konami : on trouve régulièrement du nouveau matériel, des recettes, de quoi améliorer son camp. À la rigueur, on pourra reprocher une progression bien trop lente dans l’introduction des mécanismes, mais l’ensemble tient la route.
Vous pourrez ainsi fabriquer votre propre équipement à travers un système de récolte et d’artisanat bien foutu qui fait que de nombreux objets sont récoltables autour de vous pour être ensuite transformés à un établi.
Côté gameplay, Metal Gear Survive n’a pourtant pas à rougir au premier abord.
Il sera aussi possible d’aller récupérer des survivants (qui arrivent à respirer dans les Cendres mortelles jusqu’à votre arrivée, avouez que la vie est bien faite) et de les répartir en différentes équipes pour gérer votre camp et le maintenir à flot.
Le problème en somme, c’est qu’arrive à un moment l’incontournable répétitivité et on sent bien que Konami a cherché à la repousser, justement en ralentissant l’arrivée des mécanismes de gameplay afin d’avoir régulièrement de nouvelles choses à découvrir.
Arrive à un moment l’incontournable répétitivité.
Mais le constat s’impose après à peine une dizaine d’heures de jeu : oui, Metal Gear Survive tombe dans l’écueil de la répétitivité à souhait – explorer, activer un trou de ver, choper des ressources, vider son sac, recommencer.
L’incrust’ de Citizen Erased :
Si la motivation de la création du jeu était de faire un clone de MGS 5, encore heureux que le gameplay tienne le coup. Si l’ergonomie est à jeter par la fenêtre sur PC, on arrive quand même à prendre un certain plaisir lors des découvertes des mécaniques de jeu. Mais étant donné que la série MGS 5 est à connotation militaire tactique, la moitié des commandes ne servent plus à rien contre des zombies décérébrés.
Le magnétisme de la couverture est alors plus chiant qu’utile et les armes de corps-à-corps donnent vraiment l’impression d’avoir été ajouté au gameplay de MGS 5 de façon forcée et à l’arrache, qui n’ont alors plus la même sensibilité du gameplay de base.
Angoisse niveau bac à sable
Autre problème : jamais on ne doit réellement lutter pour sa survie. Déjà qu’on ne comprenait pas ce que “Metal Gear” foutait dans le titre, voilà que même “Survive” se vide de sa signification.
Le titre se montre très facile et il suffit tout simplement de planter irrémédiablement une clôture entre vous et vos adversaires pour vous épargner la moindre goutte de sueur. Quelques séquences se montrent bien sûr plus tendues, mais rien qui ne m’ait fait me dire : “cet objectif est foutu“, loin s’en faut.
Et lorsque je parle de planter une clôture, c’est véridique : posez-en une grâce à la magie du trou de ver (non parce qu’au point où en arrive Metal Gear Survive en termes scénaristiques, on en est vraiment au stade du “ta gueule, c’est magique“) et la magie du pathfinding répondra en écho en envoyant les errants droits sur elle, même s’il y a largement la place de passer à côté. Même si un avion pouvait atterrir de chaque côté.
Pour ce qui est des fameuses “Cendres” mortelles où vous risquez de vous perdre… rassurez-vous vous êtes tout de même tranquille puisque si vous vous éloignez trop le marqueur d’objectif que vous avez placé réapparaîtra et, au pire, il y a régulièrement des loupiottes pour vous indiquer qu’il y a un éventuel avant-poste.
L’incrust’ de Citizen Erased :
Surprise, le système de crafting est très classique, mais efficace, et les mécaniques d’exploration et de cartographie sont bonnes. Il en résulte alors un jeu de survie correct, mais qui n’apporte absolument rien au genre.
Seulement, on est quasiment jamais à court de ressources de base et gérer autant d’éléments devient vite une plaie à la longue. Le système de faim et de soif est intéressant sur le papier, mais rapidement handicapant pour pas grand-chose.
On a vraiment l’impression que les développeurs ont piqué des idées dans les jeux de survies occidentaux qui font des ravages sur Steam ces dernières années sans vraiment trop les comprendre.
Gold Gear Survive
Enchaînons avec un élément dont Konami a pourtant eu largement le temps de se passer aux vues des polémiques actuelles : les microtransactions. Ah, quel bonheur de respirer à nouveau dans ce sac à vomis.
Metal Gear Survive propose à son tour de passer à la caisse. Après l’achat du jeu. Encore. Par exemple, il vous en coûtera dix bonbecs pour débloquer un slot de personnage supplémentaire.
Metal Gear Survive propose à son tour de passer à la caisse. Après l’achat du jeu. Encore.
Mais on ne va pas s’arrêter en si bon chemin : agrandir l’inventaire ? Allonge les thunes. Envoyer une équipe en reconnaissance ? Aboule l’oseille. Booster certaines récoltes et les cristaux, monnaie principale du jeu pour l’expérience et le paiement de l’artisanat ? CRACHE LE FLOUSE !
Au départ, vous ne le sentez pas venir, mais une fois que vous êtes bien avancé dans le jeu, votre portefeuille risque fort – très fort – de vous démanger. Surtout si vous jouez seul.
Multijoueur sous les projecteurs
Car il existe de très gros avantages à jouer en multijoueur. L’objectif de Konami avec Metal Gear Survive est très clairement d’encourager le jeu à plusieurs (ça et les connexions régulières avec les récompenses quotidiennes, un classique désormais).
Après quelques parties avec l’ami @citizenerased, un constat s’impose : les ressources et l’XP perçues en multijoueur sont conséquentes (et de fait, payer pour un boost qui multiplie certaines ressources et les points d’expérience reçus devient hautement attractif).
Problème : le multijoueur paraît un brin bâclé avec un système de missions de coopération à débloquer plutôt que la proposition de réelles parties complètes avec gestion de camp et compagnie. On se retrouve avec de bêtes missions de tower defense, de récupération de ressources, dans la plus pure tradition du grinding répétitif et insipide.
Le multijoueur paraît un brin bâclé
En plus de cela, le titre n’adapte pas sa difficulté au nombre de joueurs. Ainsi, impossible de jouer à deux, vous voilà obligés de passer par un matchmaking agonisant du fait du peu de personnes sur le jeu – à moins bien sûr que vous ne préfériez mourir à la première occasion, vous verrez c’est fun !
L’incrust’ de Citizen Erased :
Le multijoueur est la fausse bonne idée de ce titre. Déjà que vous allez galérer à trouver du monde en ligne (personne ne veut s’infliger ça), le mode multi vous emmènera dans des niveaux dédiés. Il est alors impossible de rejoindre un pote pour l’aider à développer sa base et récupérer des ressources.
Le but est de défendre un objectif face à des ordres de zombies bien trop forts. Le pire, c’est que même si vous vous foirez comme des grosses merdes, les récompenses sont bien supérieures pour un temps de jeu équivalent à farmer dans le mode solo.
Metal Gear-ira pas de ses blessures
Sans être fan de la série Metal Gear (je n’ai pas eu l’occasion d’y jouer, contrairement à @citizenerased, tout aussi dépité à l’heure actuelle), me voilà pourtant très déboussolé par ce que Konami nous propose là avec ce “Metal Gear Survive“. Comment ne pas se sentir floué par l’utilisation de la célèbre licence de Kojima simplement histoire d’en extraire tout le jus commercial ? Car le titre se serait appelé simplement “Survive” et aurait créé un autre univers qu’il ne s’en serait pas plus mal porté – bien au contraire à mon humble avis. L’écriture dans sa globalité est lamentable et n’a rien d’intéressant à offrir, pas même l’humour – qui ne provoque pas l’esquisse d’un sourire. Les graphismes sont corrects, mais était-ce vraiment si difficile de bosser les animations et visages ? En termes de contenu, le gameplay offre certes des moments sympathiques durant les dix premières heures de jeu avec un genre survie vraiment maîtrisé par Konami, mais ensuite l’hyper-répétitivité s’installe et ne restent plus que le manque de challenge, l’interface ultra consolisée (sincèrement, c’est presque du foutage de gueule à ce niveau), le bestiaire ridiculement maigre et les microtransactions.
► Points forts
- L’écriture… non je déconne !
- Le Fox Engine a de beaux restes
- L’artisanat est très bien maîtrisé
- C’est à vous de marquer sur votre carte les points intéressants (ressources)
- De nombreux outils mis à disposition…
► Points faibles
- … mais à gérer via une interface loin d’être toujours claire et intuitive si l’on joue sur PC
- Scénario ‘port’nawak
- Les personnages sont à assommer à coups de pelle
- Koh-Lanta s’approche plus d’une véritable expérience de survie (et y’a pas de zombies)
- Narration dégueulasse
- Répétitif à fond les manettes
- Microtransactions
- Multijoueur peu adaptatif et qui aurait mérité d’être plus intéressant qu’une simple session de grinding entre le fromage et le dessert
- 0 angoisse, y compris dans les “Cendres”
- Les visages et certaines animations
- Bestiaire très, très limité
Ça sent le sapin
WarLegend.net a bénéficié d’une copie presse offerte par Konami. Testé sur PC.
Vidéo-test de Metal Gear Survive
Metal Gear Survive est disponible sur PC, PS4 et XB1.
Solid Snake doit se retourner dans sa tombe ! :'(