Cinq ans auparavant, Ori imprégnait à jamais nos âmes sensibles de sa magie en pixels. Le plus petit des grands héros à poil blanc revient à la charge dans une épopée enchanteresse qui fait honneur à son héritage.
Cador des esprits
Porter les mêmes premières lettres ne rend pas la succession à Ori and the Blind Forest plus aisée. La pépite que nous livrait Moon Studios en 2015 brille encore dans nos mémoires, ses somptueux décors colorés et son univers féerique en figure de proue. Mais le petit esprit sylvestre en a encore sous les poils ; Ori and the Will of the Wisps entend bien reprendre le flambeau sans perdre une seule flammèche.
Le jeu part sur les mêmes bases que son aîné. Dès les premières secondes de la cinématique d’introduction, on comprend que le ton va être similaire à travers une histoire simple qui s’apprête à jouer avec nos émotions. Sur ce plan, le second volet reprend là où s’arrêtait le premier, avec comme élément de départ la venue au monde de l’attendrissante chouette Kun.
Ori and the Will of the Wisps s’épure de toute complexité narrative pour laisser les pixels faire leur poésie.
Pour peu que vous soyez familier avec l’opus précédent, ce nouveau personnage ne vous est pas complètement inconnu. Pour autant, nul besoin que ce soit le cas pour apprécier cet épisode à sa juste valeur.
Désormais prêt à battre des ailes, la jeune Kun cherche à voler malgré son aile atrophiée. Fort heureusement, sa famille, constituée d’Ori, Naru et Gumo, sont là pour lui prêter mainforte et avec un peu d’ingéniosité, parvienne à lui faire découvrir les cieux. Toutefois, son baptême de l’air tourne mal lorsqu’elle se retrouve séparée d’Ori à la suite d’une tempête. À présent engouffré dans les terres de Niwen, Ori part à la recherche de son amie égarée.
On en vient alors à très vite renouer avec l’adage de la licence : Ori and the Will of the Wisps s’épure de toute complexité narrative pour laisser les pixels faire leur poésie. Tout ce nouveau pan d’univers nous est présenté sous des allures de contes de fées, petit bout par petit bout, baigné dans une mélancolie de tous les instants.
Direction sublimistique
Compte tenu de ce qu’on avait déjà avec Ori and the Blind Forest, je ne vous apprends très certainement rien en disant que le jeu est magnifique. Et ce n’est pas là une simple question de moteur graphique ou de modélisation réussie, TOUT a été poli dans les moindres détails. Les différents jeux d’ombres et de lumière aguiche la rétine, déjà fasciné par la direction artistique qu’on ne saurait trop acclamée.
Certes, on retrouve quelques décors sous le signe du déjà-vue, mais de manière générale, Ori and the Will of the Wisps nous fait voyager par delà des paysages aussi chatoyants qu’inédits. On se retrouve avec des visuels qui témoignent d’une quasi-indécence, tant on en savoure chaque aspect. Quoi qu’on en dise, il s’agit là d’une véritable œuvre d’art qui s’affiche sur notre écran.
Quoi qu’on en dise, il s’agit là d’une véritable œuvre d’art qui s’affiche sur notre écran
De plus, la fine équipe de Moon Studios a été aux petits soins sur les animations, en adéquation avec le travail fourni auparavant si ce n’est avec une clarté légèrement revue à la hausse. Lisibilité améliorée donc, mais encore perfectible. Lorsque plongé en pleine action, il devient assez ardu de bien assimiler ce qui se déroule devant nos yeux. Rien de bien méchant, on s’y fait plutôt vite et en aucun cas cela ne nuit à l’expérience.
Histoire de vraiment prendre une claque artistique monumentale, ce beau tableau est soutenu par des compositions musicales à se damner. Soyons clair, rares sont les jeux à proposer une bande-son aussi belle et aussi bien amenée. Chaque note vient décupler l’émotion ressentie, sans jamais s’égarer de son propos. Pour dire, Gareth Coker aux commandes, ce sont plus de 100 personnes qui se sont attelées à donné à Ori ce souffle si délicieusement mélodieux.
Au final, on obtient une douzaine d’heures — sur une seule partie du moins — intenses portées par une esthétique ainsi que des musiques qui viennent redéfinir le mot “magique”. C’est un fait, Ori est une petite merveille technique à bien des égards. Un opéra de couleurs et de personnages attachants qui font de ces nouvelles péripéties en Niwen un pur bonheur à vivre.
Bien affiner ses larmes
En dépit de toute la mignonnerie qui suinte de ce folklore, ne vous méprenez pas : le jeu n’a aucune intention d’être une balade de santé. Même en mode normal, le défi est de taille.
Au regard de simples images fixes, difficile de s’en rendre compte, mais Ori se veut souvent propulsé à un rythme presque frénétique. Nombre de puzzles environnementaux demandent un enchaînement de mouvements dément. Les schémas de déplacements deviennent très vite un casse-tête à mesure qu’on acquiert les différentes compétences. Dès le premier quart du jeu, une simple manœuvre pour passer à un étage supérieur fait appel à tous nos réflexes.
Tout l’aspect plate-forme respire l’exigence et chaque obstacle franchi offre un vrai sentiment de satisfaction. Moon Studios fait encore une fois preuve d’une remarquable ingéniosité dans le level design.
Bien entendu, le challenge ne s’arrête pas aux puzzles. Une belle palette d’adversaires viennent nous barrer la route, la plupart du temps positionné exactement où il faut pour autant s’attaquer à nos PV qu’à nos nerfs. C’est sans parler des boss, impressionnant, imposant, délivrant des combats là aussi corsé comme il se doit.
Moon Studios fait encore une fois preuve d’une remarquable ingéniosité dans le level design.
Les développeurs ont clairement tenu à conserver une difficulté relevée. Malgré tout, Will of the Wisps gagne en accessibilité, entre autres grâce au nouvel arsenal d’Ori. Fini le simple smash bouton pour de pauvres projectiles, dites bonjour a l’épée spirituelle, aux lances de lumières, au shuriken spectral ou encore à la régénération de santé.
Qui plus est, les multiples compétences d’action, paramétrables sur les touches principales de la manette (A, Y, B), peuvent être interchangées à la volée. Les possibilités d’approches se veulent ainsi sacrément plus variées, surtout qu’elles servent par la même occasion un dynamisme accru des affrontements.
On retrouve aussi des capacités passives, cette fois-ci sous la forme de fragments spirituels qu’on insère dans des emplacements dédiés. Là encore, il s’agit de bonus qu’il nous est permis de modifier à tout moment en fonction des besoins. Ce sont par ailleurs des outils de spécialisation avec lesquels on peut par exemple s’amuser à booster notre arc jusqu’à qu’il s’apparente plus à une gatling.
Le très bon hériter
Dans l’idée, Ori and the Blind Forest proposait ce qu’il y avait de plus classique dans le genre Metroidvania et sa suite n’a guère changé de cap. Une grande carte interconnectée, des passages secrets et une exploration en aller-retour qui s’approfondit à mesure qu’on acquiert de nouvelles capacités… Sur le concept même, ça ne brille pas d’originalité, mais il n’empêche qu’Ori fait preuve d’une maestria dans ce domaine.
Tout au long de l’épopée, on a droit à une progression qui ne connaît que peu de temps mort. Même lorsque le jeu aime à nous perdre en route — ce qui reste rare — on court, saute et virevolte à une telle allure qu’à aucun moment on ne se lasse de parcourir les contrées de Niwen. Ces mécaniques de jeu si bien huilées s’avèrent d’autant plus mises en lumière lors des épreuves spirituelles, des courses contre la montre faisant la part belle de toutes nos capacités de déplacements.
On court, saute et virevolte à une telle allure qu’à aucun moment on ne se lasse de parcourir les contrées de Niwen
En outre, le titre se permet de subtils emprunts aux autres cadors de sa catégorie, notamment Hollow Knight, pour ne citer que lui. Les orbes d’expériences laissent place à la “lumière spirituelle”, une monnaie d’échange visant à se procurer compétences, fragments et même des cartes auprès des PNJ.
Il est aussi bon de noter la présence de checkpoint automatique, venant remplacer la sauvegarde manuelle en échange d’orbes d’énergies. Bonne ou mauvaise chose, les avis risquent de diverger, toujours est-il que l’aspect “die and retry” prend ici une dimension moins frustrante.
Eh oui, à l’inverse de son aîné, le jeu se paie le luxe d’avoir une jolie pléthore de personnages en tout genre venu agrémenter son univers atypique. En plus des marchands itinérants, on croise la route de nombreux habitants de Niwen, dont les Mokis, plutôt avare en dialogue, mais qui s’éprend à fournir des quêtes annexes à tout va.
Ces dernières s’avèrent en général assez banales et dénuées de réels intérêts. La plupart du temps, il est question d’aller d’un point A a un point B pour livrer ou récupérer un objet, moyennant une récompense au final pas si folichonne.
Néanmoins, certaines parviennent à sortir du lot en apportant une plus-value au Lore instauré. Je pense essentiellement à la Clairière de la source, que l’on est amené à restaurer petit à petit, débloquant dans la foulée de nouveaux passages jusque là impraticables.
Ori l’enchanteur
Sous ses airs de 1,5, Ori and the Will of the Wisps n’en reste pas moins la suite parfaite d’un jeu qui avait déjà tout pour lui. Le gameplay a été minutieusement peaufiné pour un rythme effréné, des affrontements bien plus engageant, baigné dans un level design qui symbolise l’excellence. Mais surtout, on se trouve à nouveau face à un jeu d’une beauté sans égale, narrant une histoire touchante à coups de fabuleux visuels et de compositions musicales qui le sont tout autant. Un voyage magique au sens le plus pur, un bijou vidéoludique que nous ne sommes pas prêts d’effacer de nos mémoires.
► Points forts
- Visuellement stupéfiant
- Bande-son somptueuse
- Une aventure féerique qui frappe en plein cœur
- Level design toujours au top
- Une progression bien menée de bout en bout
- Des combats plus engageants et dynamiques
- Gameplay riche en nouvelles possibilités
- Des boss mémorables
- Difficulté dosée comme il faut
- Des quêtes annexes qui appellent à plus d’exploration…
► Points faibles
- … même si la plupart manquent pas mal d’intérêts
- Lisibilité globale encore perfectible
- Quelques bugs par-ci par-là
- Un brin de déjà-vu
- Ça manque un peu de Kun
Grâce à Kun, c’est super chouette
Configuration de test :
- GPU: NVIDIA GTX 1080 Ti
- CPU: Intel Core i7-7700k @4.2Ghz
- RAM : 16 Go DDR4
- Installé sur SSD
WarLegend.net a bénéficié d’une copie presse fournie par l’éditeur de ce jeu.
Ori and the Will of the Wisps est disponible sur Xbox One et PC.