Un vrai souci de quota
Tiens, une nouvelle “rassurante” des locaux de Blizzard, fraîchement livrée par le journaliste Jason Schreier pour le compte de Bloomberg : Brian Birmingham vient de quitter l’entreprise après 17 ans de boîte. La raison ? Le directeur technique de World of Warcraft: Classic a refusé de soumettre des évaluations négatives d’employés, pourtant imposées par un système managérial introduit en 2021 au sein de Blizzard.
Illégale en France sous certaines formes, la méthode de Stack Ranking – ou “d’évolution à 360°” – a pour ambition d’évaluer l’ensemble du personnel pour donner des axes d’amélioration au cas par cas, avec des promesses de bonus à la clé en fonction des performances. Que se passe-t-il quand la très grande majorité des employés fait très bien son travail, sans réels axes d’amélioration qui rentrent dans les critères, mais que des quotas d’évaluations négatives existent ?
Et bien, c’est le dilemme auquel a été récemment confronté Brian Birmingham, techniquement obligé de mettre déclasser un employé qui n’avait pourtant pas grand-chose à se reprocher, passant son statut “en phase de réussite” à “en développement”. Cela a une influence non négligeable sur les bonus annuels de l’employé, mais surtout sur ses perspectives d’évolution de carrière qui se mange alors un sacré coup de frein.
Brian Birmingham avait déjà été très vocal sur le sujet sur Twitter en 2021, et aurait réussi, jusqu’à maintenant, à forcer la possibilité de se passer des quotas d’évaluations négatives. Mais c’était ça, c’était avant. L’exemple cité ci-dessus aurait eu raison de la patience du directeur technique, qui s’est alors fendu d’un mail destiné à l’ensemble du studio.
- Lorsque les chefs d’équipe ont demandé pourquoi nous devions faire cela, les directeurs de World of Warcraft ont expliqué que même s’ils n’étaient pas d’accord, les raisons invoquées par la direction étaient qu’il était important de presser les moins performants afin de s’assurer que tout le monde puisse continuer à évoluer. Ce type de politique encourage la concurrence entre les employés, le sabotage du travail des autres, le désir des gens de trouver des équipes peu performantes dans lesquelles ils peuvent briller, pour finalement éroder la confiance et détruire la créativité.
- Si cette politique peut être inversée, peut-être que mon Blizzard pourra encore être sauvé, et si c’est le cas, j’aimerais continuer à y travailler. Si cette politique ne peut pas être inversée, alors le Blizzard Entertainment pour lequel je veux travailler n’existe plus, et je devrai trouver un autre endroit pour travailler.
Avant d’envoyer son email, Birmingham avait bien précisé à un chargé des ressources humaines qu’il était prêt à reconsidérer son départ si Blizzard abandonnait le Stack Ranking, mais cet entretien n’aurait eu que pour effet de confirmer sa démission. Évidemment, le leadership du studio a demandé à Brian Birmingham d’être discret sur le sujet, ce qu’il refusa, comme le précise le mail rapporté par Jason Schreier.
On nous a demandé de garder cela confidentiel car il s’agissait d’une discussion en cours et nous ne voulons pas que les dirigeants d’Activision aggravent les choses. Cette menace de représailles ne peut pas être autorisée à motiver nos actions. Même si c’est légal, ce n’est certainement pas éthique, et je ne peux pas le soutenir.